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Actualités - OPINION

ÉCLAIRAGE - Une opposition archiplurielle et divisée sur la nécessité d’une bataille dont Beyrouth serait le cœur Gabriel Murr 2002, Assem Salam 2004 ?

En 2002, c’était sans doute calculé, probablement inespéré : la victoire de Gabriel Murr contre sa nièce Myrna Murr Aboucharaf dans la législative partielle du Metn-Nord avait été celle, archétypale, de l’opposition chrétienne unie tant bien que mal et bon gré mal gré contre le pouvoir. Notamment contre l’un de ses plus grands barons, proches parmi les proches du chef de l’État, le député Michel Murr. Malheureusement amputée par les vices du régime, cette victoire retentissante n’a néanmoins pu être possible que grâce à un concept simplissime et naturel dans l’absolu mais qui devient, au Liban, d’une complexité et d’une ambiguïté inouïes : la bataille électorale. Sachant, surtout, qu’il y a eu ensuite la fameuse mais foireuse expérience de la législative 2003 de Baabda-Aley. En 2004, l’opposition chrétienne se retrouve, une nouvelle fois, devant la même urgence : comment optimaliser l’union interne ? Avec un écueil gigantesque : doit-on oui ou non privilégier la bataille ? Et si oui, quel en serait le cœur ? En 2004, il y a le toujours très bkerkéen et incontournable Rassemblement de Kornet Chehwane (KC), avec ses mille maisons et autant de divergences, pour l’instant encore élégamment feutrées : le Renouveau démocratique de Nassib Lahoud, le PNL de Dory Chamoun, les FL, le FL Toufic Hindi, l’opposition Kataëb des Gemayel père et fils, le binôme nordiste Moawad-Frangié, Gebrane Tuéni, le tandem kesrouanais Souhaid-Bone, etc. En 2004, il y a le très populaire Courant patriotique libre (CPL), régenté avec une maestria, plus ou moins fanatiquement accueillie chez ses aficionados, par un Michel Aoun qui semble, du moins pour l’instant, avoir compris les vertus du vin aqueux. Notamment à Jounieh, Jbeil ou, surtout, Chiyah, où règne depuis des années un des gendres de... Michel Murr. Les représentants de KC et du CPL ont signé il y a quelques jours au grand soulagement d’une majorité de Libanais – qui ont déjà oublié les quelques grincements de dents plus ou moins audibles qui ont accompagné ou suivi le paraphe du texte – le protocole de Sodeco, un document furieusement branché. Qui a clairement défini un indispensable et très heureux dénominateur commun à l’opposition plurielle pour les municipales printanières : « L’opposition contre le pouvoir. » Un dénominateur commun qui a été trouvé à l’issue de rounds homériques, un « oui » arraché au forceps par des âmes charitables et hippocratiques aux quelques réticents qui estimaient, à tort ou à raison, qu’ils avaient une revanche à prendre après la partielle de Baabda-Aley, que l’on ne pouvait toujours pas faire confiance à Michel Aoun, que l’ancien Premier ministre en exil continue de penser qu’il est le seul opposant, etc. Il n’empêche, il reste, maintenant que l’opposition est unie certes très fragilement, à concrétiser tout cela sur le terrain. En tranchant pour la bataille électorale, presque unaninement considérée par l’opinion publique comme une expression nécessaire de la démocratie. Sachant que le seul véritable et grand combat dans lequel peut s’engager aujourd’hui l’opposition, et en recueillir éventuellement les mêmes fruits qu’en 2002, sans risquer cette fois d’être volée, c’est Beyrouth. Même si des tests-clés auront lieu très certainement au Metn et ailleurs. Et pour livrer cette bataille 2004, contre, cette fois, le Premier ministre, il y a l’intransigeant Assem Salam. « Enfin un musulman prêt à s’exposer dans l’opposition... » Cette phrase doit faire sourire le seigneur de Moukhtara. D’autant qu’il ne s’agit pas de n’importe qui, lorsque l’on connaît le passé éminemment politique du cousin de Saëb bey à la tête de l’Ordre des ingénieurs et architectes, et son présent qui ne l’est pas moins, au sein du RD de Nassib Lahoud. Sauf que tout le monde n’est pas d’accord dans l’opposition pour livrer bataille avec Assem Salam. « Cela ne vaut pas la peine » ; « Comment s’allier avec le Hezbollah et les Ahbache ? », « Comment accepter de faire le jeu de la Syrie qui veut contrer Rafic Hariri ? » ; « Comment peut-on accepter d’affaiblir le Premier ministre au risque de renforcer le chef de l’État ? »... Voilà les principaux arguments exposés par les antibataille au sein de KC (sans compter les considérations personnelles des uns et des autres à qui l’on aurait promis une place pour un de leurs hommes sur la liste de Rafic Hariri, qui aurait rencontré quelques grands ténors de l’opposition). Des arguments auxquels les partisans de la bataille répondent en soulignant que non seulement Assem Salam serait prêt à officialiser son opposition à l’ensemble du pouvoir en place et à se prononcer publiquement contre toute reconduction ou prorogation, mais que KC qui le parraine et le RD auquel il appartient ont ouvertement martelé leur refus fondamental de voir la Constitution amendée ne serait-ce que d’une virgule. Les probataille insistent également sur l’importance d’une mobilisation chrétienne éclatante, que seul pourrait garantir le combat électoral ; ils rappellent que si le round beyrouthin est annulé, c’est l’ensemble du très vulnérable accord national entre KC et le CPL qui pourrait se retrouver en ruines, enfin, ils mettent en avant la très grande correction des hezbollahis dans le cadre électoral. Gabriel Murr 2002, Assem Salam 2004 ? Ce dernier a insisté sur le fait qu’il ne sera pas le candidat d’une seule opposition, quelle que soit sa couleur confessionnelle. Il s’agit donc maintenant d’arriver non seulement à mettre tout le monde d’accord au sein de l’opposition chrétienne, mais de réussir, ensuite, à fédérer celle-ci avec l’opposition musulmane. Ce qui semble finalement mille fois plus simple dès que l’on prononce le nom de Assem Salam, qu’appuient désormais l’ensemble des pôles musulmans antihaririens. Ne reste encore, ou presque, que son grand ami Walid Joumblatt qui ne s’est pas prononcé. Assem Salam pourrait fort bien devenir celui grâce auquel l’essence toute théorique du protocole de Sodeco deviendra réalité concrète sur le terrain. À savoir l’opposition terrassant le pouvoir. Dans son ensemble. C’est bien connu, parce qu’il l’a prouvé à maintes reprises : Assem Salam ne se laissera jamais manipuler. Ni par les uns ni par les autres. Ziyad MAKHOUL
En 2002, c’était sans doute calculé, probablement inespéré : la victoire de Gabriel Murr contre sa nièce Myrna Murr Aboucharaf dans la législative partielle du Metn-Nord avait été celle, archétypale, de l’opposition chrétienne unie tant bien que mal et bon gré mal gré contre le pouvoir. Notamment contre l’un de ses plus grands barons, proches parmi les proches du chef...