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Actualités - REPORTAGE

Le témoignage des professionnels : un défi qui ne laisse pas de place à la vie privée

C’est par pur hasard que Rachad a intégré le domaine du génie informatique. En fait, trois circonstances ont contribué à cela. Étudiant en génie électrique à l’Université libanaise, il a choisi de développer pour son projet de fin d’études un projet en relation avec l’informatique. « Nous étions encore en période de guerre, les déplacements d’une région à l’autre n’étaient pas toujours faciles, et le matériel nécessaire pour la réalisation d’un projet électrique n’était pas au complet à la faculté, raconte-t-il. J’ai été par la suite à Toulouse où je me suis spécialisé dans l’architecture des ordinateurs. Mon stage, je l’ai effectué au Centre national de recherche scientifique à Toulouse où j’ai travaillé dans un laboratoire de recherches sur un logiciel de plan d’injection aux fautes. » De retour au Liban, Rachad a rejoint une société d’informatique pour réseaux, constatant qu’au Liban, le domaine du hardware n’offrait pas de chances intéressantes. L’inconvénient majeur du métier, plutôt le défi, demeure à ses yeux l’évolution rapide de cette science. « Il s’agit d’une science qui subit des modifications d’une façon rapide, indique-t-il. Il faut rester à jour avec ces changements, sinon on est vite dépassé. Et l’être humain ne pouvant tout savoir, on se sent parfois déprimé et vivant dans un stress continu. De plus, il faut savoir que l’informatique n’est pas un métier, mais un outil qui sert à faire fonctionner un domaine précis. Ainsi, pour réaliser un programme pour une société financière, il faudrait avoir des notions de comptabilité, sinon le programme sera un fiasco total. Il en est de même pour la mécanique, l’électronique, etc. C’est un domaine qui nécessite donc une recherche personnelle continue, quitte à suivre des sessions spécialisées pour la réalisation du projet. » Possibilités limitées de promotion Un autre inconvénient majeur aux yeux de l’ingénieur demeure l’impossibilité de grandir pour atteindre le sommet de la hiérarchie. « En fin de compte, nous sommes des techniciens, et le plus haut poste auquel nous espérons accéder, c’est d’être le directeur du département technique, déplore-t-il. Cela conduit beaucoup d’entre nous à pousser encore plus loin les études supérieures pour être promus à des postes plus importants. » Et de poursuivre : « L’ennui également est un défi à relever. Au bout d’un certain temps, on sent qu’on n’a plus envie de rester planté derrière son ordinateur à créer des programmes, surtout lorsque le savoir-faire est acquis et les petits secrets de l’ordinateur dévoilés. Il n’y a plus de mystères cachés. J’ai eu la chance de devenir directeur du département technique d’une société informatique, sinon j’aurai changé sûrement de carrière. » Et de conclure en signalant que l’un des plus grands problèmes rencontrés au Liban, c’est la recherche du gain rapide, alors que « nous avons un potentiel humain assez important ». Or, il s’agit d’un domaine qui nécessite de gros investissements et à long terme. « Les grandes entreprises l’ont compris, dit-il. Mais celles qui viennent d’être créées ont un long parcours à faire. J’estime que la meilleure solution pour le Liban demeure dans la sous-traitance des projets destinés à l’étranger, comme c’est le cas en Inde, qui demeure l’un des plus importants pays dans la programmation. Nous pouvons concurrencer l’Inde dans le savoir-faire, mais malheureusement pas dans les salaires. » Couper la voie à la concurrence Ingénieur en télécommunications, Stéphanie travaille depuis près de douze ans dans la branche de Beyrouth de Murex, une société internationale spécialisée dans l’informatique financière. Chargée au début du support client, Stéphanie a rejoint, il y a sept ans, l’équipe responsable du contrôle de qualité. « Je me charge de la validation de tous les programmes et j’aide à la rédaction des cahiers des charges, note-t-elle. C’est un domaine passionnant qui vous pousse à découvrir des choses nouvelles d’une façon constante et rapide, puisque le marché financier évolue à son tour rapidement. Mais cela présente aussi un inconvénient, car vous devez suivre de près cette évolution pour couper la voie à la concurrence qui est assez importante. Un autre inconvénient demeure à mon avis : la disponibilité. Vous pouvez être appelée à voyager du jour au lendemain. Cela me passionnait quand j’étais célibataire. Mais actuellement, avec mes enfants, il m’est plus difficile de le faire, sachant que ces déplacements me manquent, d’autant qu’ils sont très enrichissants. C’est la raison pour laquelle, d’ailleurs, j’effectue aujourd’hui un travail plus sédentaire. » Stéphanie considère que l’informatique financière est un secteur qui présente de nombreux défis à relever. « Il faut que nous actualisons nos systèmes d’une façon constante, sinon nous risquons de perdre nos clients, insiste-t-elle. Ces derniers étant rares, nous ne pouvons pas nous le permettre. Nous devons par conséquent introduire constamment dans nos systèmes toutes les nouveautés techniques ainsi que celles qui se présentent sur le marché financier. » En ce qui concerne l’avenir de l’informatique au Liban, Stéphanie estime que c’est la science de l’avenir. « Elle intervient dans tous les domaines, signale-t-elle. Au Liban, nous avons du retard par rapport aux pays développés, notamment au niveau institutionnel. Le jour où le gouvernement décidera de se rattraper, il créera un grand marché d’emplois. » Pas de place à la vie privée Élie travaille dans le domaine de la programmation depuis près de trente ans. Il a choisi d’être programmeur-analyste parce qu’il était passionné par le domaine. « Je ne peux pas travailler dans un secteur que je n’aime pas », avoue-t-il. Affirmant que l’informatique est à la base de toute avancée technologique dans le monde (téléphonie mobile, télécommunications, satellite, etc.), Élie déclare être pessimiste quand à l’avenir du métier au Liban. « Il n’existe pas un marché susceptible d’absorber le flot de diplômés lancés sur le marché de travail chaque année. Il y a dix ans, le marché était plus avantageux. Actuellement, avec le marasme économique, les investissements qui pourront être placés dans le domaine se font rares. D’ailleurs, je ne pense pas que l’avenir de la profession est prometteur. C’est le cas de tous les métiers au Liban. Quand un secteur semble présenter un nouvel horizon ou une chance de prospérité, le gouvernement met la main dessus, le bloquant parfois. J’avais une société de programmation. J’ai dû la fermer, il y a quelques années, à cause de la crise économique. » Selon Élie, l’informatique est un domaine bouillonnant. Il n’y a pas de place à l’ennui. Ni à la vie privée.
C’est par pur hasard que Rachad a intégré le domaine du génie informatique. En fait, trois circonstances ont contribué à cela. Étudiant en génie électrique à l’Université libanaise, il a choisi de développer pour son projet de fin d’études un projet en relation avec l’informatique. « Nous étions encore en période de guerre, les déplacements d’une région à...