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Actualités - CHRONOLOGIE

Communautés - Conférence sur le thème « Religion et démocratie » à l’Unesco-Paris Audeh : « Nous aspirons à une société où les hommes sont vraiment libres »

« Nous aspirons à une société où les hommes sont vraiment libres, où la responsabilité sociale prévaut et où les intérêts personnels et les allégeances avilissantes n’existent pas. » C’est ce qu’a déclaré hier le métropolite de Beyrouth, Mgr Élias Audeh, au cours de la séance inaugurale de la conférence sur le thème « Religion et démocratie » à l’Unesco à Paris. Une conférence organisée par l’Association du dialogue interculturel et interreligieux (ADICR), avec le soutien de l’Organisation islamique pour l’éducation, les sciences et la culture (Isesco) et de l’Unesco, et la participation de chercheurs, universitaires, experts juridiques et spécialistes des droits humains. Plusieurs personnalités ont pris la parole au cours de la séance d’ouverture, parmi dont le directeur général de l’Unesco, Koïchiro Matsuura, le directeur général de l’Isesco, Abdulaziz Othman Altawaijiri, la lauréate du prix Nobel Shirin Ebadi, le député-maire de Toulouse, Philippe Douste-Blazy, et la présidente de l’ADICR, Samar Sassine. Les débats ont principalement porté sur « la démocratie et les sociétés plurielles ». Prenant la parole, M. Douste-Blazy a rendu hommage à Mgr Audeh « pour son action inlassable en faveur du rapprochement et de la coexistence entre les différentes religions au Liban, un pays qui m’est particulièrement cher ». Le député français a ensuite rendu un vibrant hommage au Liban : « Le général de Gaulle disait : “Le seul nom du Liban fait remuer quelque chose dans les cœurs des Français car son peuple est le seul dont le cœur n’a jamais cessé de battre au rythme du cœur de la France”. Ce lien fort, ce lien ancien, qui unit le Liban à la France et à l’Europe, a donné à ce pays une ouverture exceptionnelle sur le monde occidental. Au carrefour de l’Orient et de l’Occident, de la chrétienté et de l’islam, à la croisée des mondes : européen, méditerranéen et arabe, le Liban a justement su se singulariser et s’enrichir de cette rencontre des civilisations et des religions. » Et d’ajouter : « Je connais les nombreuses difficultés que traverse le Liban, mais je suis confiant en l’avenir de ce pays. La vitalité du peuple libanais, sa foi durant les épreuves, ses liens indestructibles avec la France et l’Europe sont autant de raisons d’espérer, pour que le Liban porte au monde un modèle de coexistence entre peuples et religions. C’est pourquoi nous sommes et serons toujours là auprès du peuple libanais pour relever ce grand défi. Le respect, la tolérance, l’esprit de dialogue, lorsqu’ils s’enracinent avec la connaissance et la confiance, sont des valeurs auxquelles chacun d’entre nous doit attacher une grande importance. » Démocratie et dignité Quant au métropolite de Beyrouth, il a prononcé une allocution de très haut niveau, imprégnée d’humanisme. « L’histoire n’est ni infaillible ni vérité absolue. Tout est éphémère. (...) Le paradis promis sur terre reste un mirage, et le nouvel ordre n’offre pas de meilleures promesses. L’histoire vécue reste gravée par la mémoire des plus forts, fût-elle l’histoire d’un individu tyran et dictateur ou l’histoire d’une communauté composant un parti englobant le peuple tout entier, sous le signe de la démocratie. La peur de la mort évoque ces types de gouvernance où les forces positives de la nature humaine, au niveau de l’individu comme du groupe, se transforment en instruments de pouvoir qui affirment l’existence et assurent la pérennité de la vie. (...) », a indiqué Mgr Audeh. « On avait beaucoup parlé du XXe siècle, espérant qu’il serait le siècle de l’amour, de la paix, de la stabilité et de l’ordre. (...) On avait estimé aussi que les systèmes s’orienteraient vers le meilleur. Vif témoin d’un temps marqué par la haine et la rancune, au lieu de la tolérance et de l’amour, l’homme de ce siècle récolte la déception et subit le choc d’un temps pétri de nihilisme, d’atrocité et d’horreur. L’homme de ce siècle s’est vu réduit à un simple carburant des intérêts des plus forts et de leurs convoitises, parce que ceux-ci pensent que le monde est leur, une propriété dont ils disposent à leur gré, tenant le langage de la vertu et ignorant son essence, pour semer la confusion et le désarroi. Les guerres, grandes ou petites, trouvent leur justification dans le besoin de garantir la paix et la sécurité. Leur but : renverser les régimes despotes pour instaurer les démocraties, nous dit-on, mais l’homme du XXe siècle ne fut que le témoin des révolutions menées au nom de la démocratie, qui n’ont fait que la détruire, et du coup anéantir l’être humain qu’elle prétendait défendre si fort : le bolchévisme en Russie, le fascisme en Italie, le nazisme en Allemagne... Ces révolutions ont méprisé, piétiné et, là où il leur était possible, détruit et exterminé les principes de la démocratie et les droits de l’homme : la justice, l’égalité et la liberté. Elles ont détraqué, paralysé toute réflexion raisonnable et déréglé toute pensée légitime et valable », a-t-il poursuivi. « Dans la démocratie, l’homme recherche le respect de l’individu, le respect de sa dignité et de sa liberté. Parler de démocratie, c’est parler de la dignité de l’être humain (...). L’homme est l’axe, le centre de la démocratie. Il est aussi le centre de la religion. Si la démocratie représente une idéologie qui réclame liberté, égalité, justice et libre choix, la religion, à plus forte raison, est digne de réclamer ces vertus et beaucoup d’autres », a ajouté le métropolite de Beyrouth. Et de plaider en faveur d’« une société où règne la justice et où se réduit le fossé séparant riches et pauvres, où la volonté de Dieu est gouvernante, où Sa paix est désirable et où on médite sur l’homme, son identité, sa liberté et sa responsabilité. Une société où on se réfère aux vertus universelles et à la multiplicité culturelle, et où on défend la souveraineté nationale, la crédibilité politique et la justice économique ». « Dans une telle société, je ne vois qu’harmonie entre la religion chrétienne et la démocratie. Au sein de leur interaction, je ne puis envisager que cette complémentarité dont on a tant besoin », a-t-il conclu.
« Nous aspirons à une société où les hommes sont vraiment libres, où la responsabilité sociale prévaut et où les intérêts personnels et les allégeances avilissantes n’existent pas. » C’est ce qu’a déclaré hier le métropolite de Beyrouth, Mgr Élias Audeh, au cours de la séance inaugurale de la conférence sur le thème « Religion et démocratie » à l’Unesco...