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Actualités - CHRONOLOGIE

Conférence - Débat à l’occasion du 41e anniversaire du traité de l’Élysée L’orientalisme en Europe : histoire et actualité

Pour marquer le 41e anniversaire du traité de l’Élysée, une conférence intitulée « Penser l’Orient » a été organisée hier par les ambassades de France et d’Allemagne, par l’Institut français du Proche-Orient (IFPO) et par l’Institut allemand d’études orientales (DMG). Au siège de l’École supérieure des affaires (ESA) rue Clemenceau, des experts français et allemands se sont succédé à la tribune pour disséquer l’orientalisme à travers les siècles, ses apports, ses faiblesses, son lien ambigu avec le colonialisme et son évolution après la disparition de celui-ci. Un représentant du ministre de la Culture Ghazi Aridi, ainsi que les ambassadeurs de France et d’Allemagne, Philippe Lecourtier et Günter Kniess, ont assisté à la séance inaugurale. Dans son mot, le ministre de la Culture a considéré que le « traité de l’Élysée devrait servir d’exemple, dans cette partie du monde, pour la mise en place d’un projet d’avenir prometteur qui brise les liens avec un passé chargé d’amertume et de haine ». Il a fait référence aux relations syro-turques, qui pourraient « servir de base à de bonnes relations entre les pays de la région et rompre avec les conflits du passé, ce qu’a illustré la dernière visite de Bachar el-Assad en Turquie ». M. Lecourtier s’est longuement étendu sur les liens entre la France et l’Allemagne qui « ont, au cours de l’année 2003, abordé une nouvelle étape dans leurs relations, imprimée et justifiée par les temps internationaux incertains que nous traversons ». Cette nouvelle étape s’est caractérisée par la confiance entre les deux pays, renforcée par le lien personnel entre le chancelier allemand et le président français, d’où le fait qu’ « aucune décision majeure n’est prise sans une consultation systématique des deux pays », d’après l’ambassadeur. Cette confiance s’est également traduite sur le fond des dossiers par « une vision commune franco-allemande sur les grandes questions européennes et internationales », et plus particulièrement sur les dossiers du Proche-Orient, notamment sur l’Irak. C’est de l’intérêt porté à l’Orient par les Européens et de l’évolution de l’orientalisme qu’a parlé M. Kniess, soulignant qu’« au présent, l’orientaliste ne se définit pas seulement par sa profession académique ». « Comme les experts de n’importe quelle vocation, a-t-il ajouté, il est appelé à participer à la vie politique, sociale et culturelle de son temps, bref à être serviteur de la société de son pays ». Mais pour lui, le plus important, c’est de « définir le rôle des orientalistes comme médiateurs vers les sociétés dans les pays orientaux pour construire une coopération véritable autour de la Méditerranée ». Marc Gaborieau, ethnologue français, a traité de ce qu’il a appelé « l’islam d’Asie », en d’autres termes d’Asie centrale, d’Asie du Sud-Est et de Chine, dans une région où cette religion est minoritaire et où elle connaît des interactions avec les autres croyances. M. Gaborieau a répertorié plusieurs attitudes adoptées par les orientalistes français envers l’islam dans cette région, dont deux sont « naïves et simplistes », selon lui : celle qui privilégie les conflits entre les musulmans et leurs compatriotes dans ces pays, niant tout effort de coexistence, et celle qui ne retient que le synchrétisme, soupçonnant ces populations de musulmans, tout comme certains intégristes d’ailleurs, de n’avoir pas conservé « la pureté de la religion ». D’autres attitudes, plus intéressantes selon lui, consistent à se pencher sur les modes de coexistence codifiés dans ces pays, sur le phénomène de recherche des convergences spirituelles et culturelles entre les communautés, etc. L’apparition des départements d’études orientales dans les universités d’Allemagne au XIXe siècle, à l’exemple de la France, a été abordé par Baber Johansen, sociologue et islamologue allemand. Qui a contesté la thèse d’Edward Saïd, lequel considérait que l’orientalisme a été utilisé comme un outil de domination, ce qui lui a attiré une riposte du commentateur Radwan es-Sayyed. Selon M. Johansen, les orientalistes allemands n’ont jamais été impliqués dans la politique et leur science a subi une évolution au cours du XIXe siècle, jusqu’à la sécularisation de la discipline (à l’origine, les orientalistes avaient une formation de théologiens). L’orientalisme français a été passé en revue par Henry Laurens, historien français. Selon celui-ci, l’utilisation politique de l’orientalisme a commencé quand le décalage entre les puissances européennes et le reste du monde s’est accentué. Au XIXe siècle, avec les conquêtes coloniales, c’est l’apparition de l’orientalisme colonialiste : les connaissances linguistiques et culturelles des orientalistes permettent de gérer les affaires des populations. Au début du siècle dernier, le système colonial est à son apogée, et les orientalistes prennent part à ce que M. Laurens appelle « la politique coloniale et musulmane ». Mais plus tard, la « science coloniale » s’est effondrée parce qu’elle n’a pu affronter un nouvel adversaire, le nationalisme arabe. La décolonisation n’a pas mis fin à l’orientalisme mais précipité sa transformation, a souligné l’expert, qui a précisé qu’« il y a autant de diplômés en sciences orientales arabes en France que dans toute l’Amérique du Nord ». Enfin, Stefan Reichmuth, professeur d’études islamiques en Allemagne, a traité de l’actualité des études islamistes et orientalistes.
Pour marquer le 41e anniversaire du traité de l’Élysée, une conférence intitulée « Penser l’Orient » a été organisée hier par les ambassades de France et d’Allemagne, par l’Institut français du Proche-Orient (IFPO) et par l’Institut allemand d’études orientales (DMG). Au siège de l’École supérieure des affaires (ESA) rue Clemenceau, des experts français et...