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Actualités - OPINION

Le Liban-Sud maintenu en réserve d’une guerre

Ce n’est plus de la politique, c’est du Lafontaine. Il y a quelque chose de caricatural dans la déclaration de Colin Powell affirmant que s’il y a eu un incident au Liban-Sud, « c’est à cause du Hezbollah ». C’est la fable du loup et de l’agneau. Colin Powell trouve « regrettable que le Hezbollah ait une fois encore été la cause d’une réaction » israélienne, estimant que « l’action délibérée qui a entraîné la perte d’une vie montre une fois de plus la nature de cette organisation ». Il oublie, ou feint d’oublier que le bulldozer était en territoire libanais, comme l’a confirmé la Finul et comme les Israéliens eux-mêmes ont fini par le reconnaître, et qu’il était en état de flagrant délit de vol et de violation de la ligne bleue. Au demeurant, Colin Powell n’a pas réagi non plus à ce qui s’était produit, quelques heures plus tôt, en Cisjordanie, où l’armée israélienne avait détruit vingt maisons et blessé trois enfants palestiniens au cours d’une incursion dont nul à Washington n’a déclaré qu’elle était « regrettable ». En haut lieu, on ne s’indigne même plus d’un tel parti pris qui doit certainement avoir, pour explication, la désinformation systématique des faits par Israël. Pour le reste, on s’en remet à la conclusion de la Finul, qui a confirmé qu’Israël avait « violé la ligne bleue » qui sert de frontière internationale entre le Liban et Israël, lorsqu’un bulldozer israélien a pénétré lundi en territoire libanais. Et pour quoi faire ? Voler de la bonne terre limoneuse pour les superficies agricoles israéliennes ! L’incident est symptomatique de la situation du moment. Israël, c’est évident, profite autant que possible du fait que Washington est de plus en plus absorbé par l’ouverture de la campagne présidentielle de 2004. Voulu ou pas, l’incident est exagéré dans le but d’exercer le plus de pression possible sur le Liban, le Hezbollah et la Syrie. Incidemment, on se félicite en haut lieu de ce que l’armée libanaise ne soit pas déployée à la frontière, car des incidents de la nature de celui qui s’est produit mardi auraient bien pu, le cas échéant, se transformer en incident frontalier entre deux pays souverains. Avec le Hezbollah, il revêt une importance politique moindre sur le plan des relations internationales, tout en ayant la même efficacité de dissuasion militaire sur Israël. L’incident a poussé un diplomate occidental en poste à Beyrouth à parler d’un véritable équilibre de la terreur entre Israël et le Hezbollah, à un niveau inférieur tout au moins. En d’autres saisons, observe ce diplomate, l’État hébreu ne se serait pas privé d’élargir son champ de représailles et de bombarder des objectifs du Hezbollah situés à l’intérieur du territoire libanais. Aujourd’hui, conscient que le parti islamiste est capable de répondre coup pour coup, ou du moins qu’il possède des moyens militaires dissuasifs, sachant aussi que l’ouverture d’un front sur les frontières nord d’Israël est rien moins que souhaitable, la réaction israélienne doit se limiter à être exclusivement politique et diplomatique, avec pour la forme un petit baroud d’honneur. Tout se passe en fait comme si aussi bien le Hezbollah et Israël savent « jusqu’où ils peuvent aller trop loin », et sont déterminés à respecter les règles du jeu. Un avantage pour le Liban, mais un avantage provisoire. En définitive, ces petites batailles limitées prouvent que le Liban-Sud est toujours gardé « en réserve » pour une grande conflagration, quand le besoin stratégique s’en fera sentir. Ce qui, avec un homme belliqueux comme Ariel Sharon, pourrait n’être qu’une question de temps. Philippe ABI AKL
Ce n’est plus de la politique, c’est du Lafontaine. Il y a quelque chose de caricatural dans la déclaration de Colin Powell affirmant que s’il y a eu un incident au Liban-Sud, « c’est à cause du Hezbollah ». C’est la fable du loup et de l’agneau. Colin Powell trouve « regrettable que le Hezbollah ait une fois encore été la cause d’une réaction » israélienne,...