Diplomatie - Lecourtier chez Obeid hier Échange d’idées sur le concept US d’un Grand Moyen-Orient

Le remodelage de la région en vue de sa démocratisation. Ce concept prôné par l’Administration Bush (autant par Powell que par des ultras comme Wolfowitz) dès avant la guerre en Irak se trouve de nouveau mis en valeur, dans le monde diplomatique, à travers une série d’articles, de commentaires ou de propos variés. Il y a certes loin de la coupe aux lèvres. Mais nul parmi les puissances qui contestent des plans américains jugés hégémoniques (unilatéralistes) ne prend à la légère un tel projet, baptisé Grand Moyen-Orient. Ainsi l’ambassadeur de France, Philippe Lecourtier, en a discuté hier avec le ministre des Affaires étrangères, Jean Obeid. Le diplomate français a explicité les vues de son gouvernement. En soulignant l’intérêt que la presse et les médias audiovisuels portent à ce dossier. Il a précisé que ces considérations, qui ont pris corps dans des cercles américains déterminés, comprenant des officiels, sont maintenant débattues sur la scène publique. Ce qui conduit les nations européennes, notamment celles qui se sentent concernées par les affaires de cette région, à participer au débat. L’ambassadeur, soulignant l’intérêt que Paris porte aux objectifs de l’initiative en question, au plan articulé sur la démocratisation, sur la croissance, sur la sécurité, a indiqué qu’il va encore en reparler avec le ministre. Ce qui laisse entendre qu’il existe une volonté de concertation permanente et de coordination. Un dialogue d’autant plus nécessaire, à son avis, que le Liban occupe une place à part dans la région (et sans doute dans le cœur des Français), du fait de son taux de démocratie. Lecourtier a ajouté que, toujours à son avis, les Libanais sont en mesure d’aider les autres (peuples de la contrée), pour jouer le cas échéant un rôle d’intermédiaire. Prié de dire si la démocratisation est envisageable dans les pays du Golfe, royaumes ou principautés, le diplomate a répondu en souriant qu’il faudrait poser une telle question aux Américains… Il a cependant enchaîné en soutenant que la France croit qu’il est possible de faire évoluer positivement les choses, dans un cadre de paix, d’équilibre et de prospérité. À condition, bien évidemment, que les initiatives viennent des pays concernés, car il serait vain de tenter de leur imposer quoi que ce soit. Aux journalistes, qui déduisent de ses propos que la France ne voit pas d’un mauvais œil des propositions présentées à la sauce US et qui se demandent si l’on peut de la sorte éradiquer le terrorisme, le diplomate a dit que cette lutte est essentielle, qu’elle concerne le monde entier. Notamment les pays de cette région, autant que l’Europe ou l’Amérique. Soulignant ensuite qu’il faut s’entendre sur ce thème non seulement sur le plan des principes, mais également au niveau des mécanismes à mettre en œuvre pour combattre efficacement le terrorisme. Lecourtier relève que dans cette région même, on voit bien les effets (désastreux) des actes terroristes qui fauchent des centaines d’innocents. Comme on a pu le voir tout récemment à Bagdad. Il ajoute que nul ne peut justifier le terrorisme, que les mouvements de résistance eux-mêmes le proclament et qu’en tout cas, il faut faire la distinction entre les deux. Enfin, interrogé sur le point de vue du ministre Obeid, l’ambassadeur a renvoyé les journalistes à l’intéressé. Mais il a quand même rappelé que Hariri pour sa part a fait des commentaires sur la question au Caire. Se voyant objecter que le président du Conseil est contre l’initiative, le diplomate a rectifié : non, ce qu’il a dit, c’est qu’il souhaitait en apprendre davantage.