Contrebande L’opération antidrogue dans la Békaa sous le feu des critiques chiites

La vaste opération sécuritaire effectuée le week-end dernier par une force de frappe de l’armée libanaise, secondée par des éléments des services de renseignements syriens, contre des trafiquants de drogue et d’armes dans divers secteurs de la Békaa et de Baalbeck a suscité de vives réactions dans certains milieux chiites qui l’ont qualifiée d’« opération médiatique ».
Le président de la Chambre, Nabih Berry, a notamment critiqué, hier, cet étalage de force. « Quel intérêt trouve-t-on à montrer qu’une région du Liban est un repaire de trafiquants ? » s’est interrogé M. Berry. « Si l’affaire relevait de la sécurité, pourquoi l’a-t-on gonflée sur le plan de l’information, et surtout, pourquoi l’a-t-on transformée en opération publicitaire ? » a-t-il souligné.
Les députés du Hezbollah avaient déjà exprimé mardi un point de vue similaire. M. Ammar Moussaoui a ainsi qualifié l’opération d’« humiliation envers la population qui a été traitée comme si elle était composée en majorité de terroristes ».
M. Nicolas Fattouche, député de Zahlé, a également qualifié l’opération de « parade » de la part des autorités « incapables de sévir dans les véritables opérations de blanchiment », dans une allusion à l’affaire de la banque al-Madina.
Dans la journée d’hier, le réprésentant du guide suprême de la révolution islamique, l’ayatollah Khamenei, cheikh Mohammed Yazbeck, a reçu une délégation des habitants de la localité de Hour Taala qui ont dénoncé les circonstances dans lesquelles se sont déroulées les perquisitions dans leur village. Prenant la parole devant la délégation, cheikh Yazbeck a vivement stigmatisé « le comportement des forces de sécurité à l’égard des habitants ». « Veulent-ils nous pousser à la révolution ? a-t-il déclaré. Pourquoi ne se comportent-ils pas de la même manière à Jbeil, au Kesrouan, à Beyrouth ou au Liban-Sud ? Nul ne saurait accepter la sauvagerie dont a été victime la population de Hour Taala. »
Un cultivateur de la région, Hussein Abou Ali, 52 ans, a souligné, pour sa part, que l’opération menée par l’armée représente « un show destiné aux Américains pour leur montrer que les Libanais et les Syriens tiennent bien la plaine de la Békaa, naguère plaque tournante du narcoterrorisme ». « Au lieu de terroriser la population, l’État ferait mieux de mettre sur pied des cultures de substitution à la drogue, qui faisait vivre des dizaines de milliers d’habitants de la Békaa », a-t-il ajouté.