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Beyrouth se focalise sur des relations syro-US plus nuancées qu’il n’y paraît

Pour le Liban, l’évolution des rapports syro-américains est capitale. Surtout à l’approche de la présidentielle, les deux parties jouant dans ce cadre un rôle de grands électeurs. Selon des politiciens, retour de Damas, l’escalade verbale de ces derniers temps ne traduit pas vraiment les réalités d’un dossier relationnel traité, des deux côtés, par une diplomatie tranquille. Un dialogue sous le manteau, qui aurait marqué récemment de sensibles progrès. Ces sources en veulent, pour preuve indirecte, les frictions larvées entre Américains et Israéliens. Car, disent-elles, chaque fois que le ciel s’éclaircit un peu entre Damas et Washington, il s’assombrit d’autant entre Washington et Tel-Aviv. Pour qui, les États-Unis ne doivent pas accepter, comme ils semblent vouloir le faire, de fractionner les demandes présentées à la Syrie, mais en exiger l’exécution en bloc. Au stade actuel, poursuivent ces sources, les rouages de l’Administration Bush, toutes tendances confondues, accordent naturellement la priorité de fait à la situation en Irak. Or, sur ce point précis, la Syrie, qui ne joue pas là des intérêts vitaux, ne rechigne pas à se montrer de bonne composition. Par contre, il n’est pas question pour elle de faire des concessions face à des exigences d’inspiration israélienne concernant le conflit régional, dossier palestinien compris. Pour Damas, il n’y a de solution possible qu’à travers une paix globale équitable, réalisée dans le cadre des résolutions de l’Onu et des principes de Madrid. Dans un entretien accordé au New York Times, le président Bachar el-Assad invite les USA à instrumenter un processus de règlement, en base d’une vision lucide du tableau régional. Il répète l’attachement de la Syrie au dispositif de Madrid. Pour relever ensuite que l’attention se focalise certes sur le volet palestinien, mais qu’en définitive il ne faut jamais oublier que la paix doit être globale. Pour enchaîner sur ce constat : aujourd’hui rien n’indique que l’on va enclencher les pourparlers concernant le volet syrien. Pourtant, souligne Assad, Damas ne pose pas de conditions préliminaires à la reprise des négociations à partir du point atteint précédemment. C’est-à-dire à partir de l’acceptation, par le gouvernement de Rabin, du principe d’un retrait israélien total du Golan. Il reste que Sharon peut à tout moment torpiller le processus d’ensemble. On sait en effet qu’il rejette l’Initiative de Genève, appréciée par Bush comme complément de la « feuille de route ». En résumé, et en pratique, les relations syro-américaines sont toujours étroitement tributaires de l’évolution du problème central, le conflit israélo-palestinien. Que les Américains ont la capacité de traiter efficacement. La question étant de savoir si, pour des raisons électorales ou autres, ils en ont vraiment la volonté.

Les retombées locales
Bien entendu, comme le souligne un ministre influent, la parfaite coordination libano-syrienne sur le plan régional s’accompagne de mesures internes de consolidation. Ainsi, la Syrie invite les parties locales à laisser de côté les sujets politiques. Comme la situation ministérielle ou la présidentielle. Ce conseil de retenue n’est pas unanimement bien accueilli. Bien qu’il recueille, de toute évidence, un nombre d’adhésions assez impressionnant. Ses partisans font valoir que la délicate conjoncture économique interdit les secousses, les polémiques, les tiraillements que susciterait tout débat sur le sort du cabinet ou sur la présidentielle. Sans compter que le changement de gouvernement ne se justifie que si l’on peut mettre en place une équipe dotée d’un véritable programme de sauvetage. Et qui serait nettement meilleure, sur tous les plans, que l’actuelle. Il ne s’agit pas de substituer des personnes à d’autres, mais d’adopter une nouvelle méthode, une approche plus efficace. Ce qui ne semble pas réalisable. Le chambardement serait même extrêmement préjudiciable, s’il devait être le résultat d’une vindicte provoquée par les conflits entre les dirigeants. Car, cela jetterait encore plus d’huile sur le feu. En liquidant du même coup tout espoir de redressement économique et financier, toute chance de réhabiliter Paris II ou de préparer Paris III. C’est bien cette impression que le ministre de l’Économie, Marwan Hamadé, a recueillie lors de sa participation au dialogue euro-libanais à Bruxelles. Où, il s’est vu demander en substance : mais où donc menez-vous par vos (dissensions) politiques l’économie du Liban ? Hamadé avait pourtant su plaider, chiffres à l’appui, un dossier libanais dont l’évolution montre, un an après Paris II, que l’économie se porte finalement mieux dans ce pays que la politique.
Quant à la présidentielle, qui doit se situer dans dix mois à peu près, il serait prématuré d’en lancer la campagne, estiment les mêmes cadres. Pour la même raison qu’il faut éviter les remous susceptibles d’affecter l’économie et le social. Cependant, des professionnels pensent qu’il ne serait pas mauvais d’ouvrir sans tarder la campagne de la présidentielle. Car, en se déclarant et en affichant leurs programmes respectifs, les candidats potentiels stimuleraient un regain de confiance. De plus, les Libanais auraient le temps de se faire une opinion, pour soutenir tel ou tel postulant qui leur paraîtrait digne d’assumer la relève. C’est là l’avis du ministre de l’Information, Michel Samaha, du vice-président du Conseil, Issam Farès, et de Sélim Hoss.
Émile KHOURY
Pour le Liban, l’évolution des rapports syro-américains est capitale. Surtout à l’approche de la présidentielle, les deux parties jouant dans ce cadre un rôle de grands électeurs. Selon des politiciens, retour de Damas, l’escalade verbale de ces derniers temps ne traduit pas vraiment les réalités d’un dossier relationnel traité, des deux côtés, par une diplomatie...