Rechercher
Rechercher

Actualités

Analyse - Koraytem se focalise sur le maintien du cabinet La confrontation directe fait place à une sourde guerre des nerfs

«Le gouvernement reste. » Laconique, Hariri se contente de ce commentaire, après sa mystérieuse visite à Damas. Il n’évoque aucun détail. Ne désigne pas les personnalités qu’il a pu rencontrer. Ne précise aucun terme de l’arrangement qu’il a manifestement conclu au sujet de la crise relationnelle qui l’oppose au régime.
Tout ce qui lui importe, de toute évidence, c’est le maintien de son équipe. Pour être aussi affirmatif sur ce point, il a dû se voir confirmer que les décideurs n’ont pas trop envie de s’empêtrer dans une crise ministérielle libanaise. On le savait du reste depuis quelque temps, par le truchement de leurs hérauts habituels. Mais un doute subsistait quand même, dans la mesure où il se répétait qu’ils n’avaient encore tranché ni sur la durée de vie du cabinet. Ni, a fortiori, sur la présidentielle.
Il est également connu que le choix des options dépend, aux yeux de Damas, de l’évolution de la situation régionale et internationale.
L’on se trouve dès lors dans une phase d’observation pour ainsi dire officialisée. Sans savoir jusqu’où elle pourrait s’étendre. Une étape qui va, selon toute probabilité, être marquée par une sournoise guerre des nerfs entre les différents protagonistes de la scène locale. Obligés de s’abstenir de tout fracassant pugilat, de s’affronter uniquement à fleurets mouchetés, à coups de crocs en jambe sournois ou de fielleuses fuites médiatiques.
À ce stade, Hariri et les ministres ne savent pas quand l’heure du départ pourrait sonner. Du même coup, le président Lahoud et son camp ignorent s’il y aurait encore moyen de larguer l’hôte du Sérail. Quant aux candidats potentiels à la présidentielle, ils ne savent pas quand ils seraient fixés au sujet de leur phobie commune, la reconduction ou la prorogation du mandat actuel.
Bien entendu, les professionnels du cru brûlent de curiosité : quels secrets le mutisme criant de Hariri, après ses contacts syriens, cache-t-il ? Et d’ailleurs pourquoi cette cloison, cette opacité dans la communication ? Comment se fait-il que, pour la toute première fois, les médias syriens, officiels ou officieux, n’aient pas mentionné la visite à Damas d’un dirigeant libanais ?
On se perd en conjectures, sur ces péripéties. Certains pensent que les Syriens n’ont pas voulu jeter de l’huile sur le feu. Dans ce sens qu’en donnant du retentissement à la visite de Hariri, l’on aurait heurté les susceptibilités de ses adversaires, les lahoudistes et les autres. D’autant que les résultats, bons ou mauvais, auraient eu l’air de s’inscrire comme un écho, ou une riposte, au récent sommet Assad-Lahoud. Selon ces sources, il est évident que la discrétion observée a pour but de couper court aux spéculations effrénées, aux rumeurs, aux interprétations tendancieuses. En un mot à la confusion accrue que tout communiqué aurait provoquée, empoisonnant encore plus un climat délétère.
En procédant de la sorte, ajoutent ces mêmes cadres, on évite de froisser ou de fâcher quiconque. Le régime reste satisfait des positions syriennes de soutien. En gardant l’espoir tout autant pour un changement ministériel que pour la reconduction. Le Sérail, de son côté, est content de pouvoir confirmer le maintien des Trente. Ce qui, à ses yeux, rend la prorogation du mandat présidentiel bien plus difficile, pour ne pas dire impossible. Chacun peut donc avoir l’impression de jouir d’une demi-victoire. Et il devient sans doute plus aisé pour les protagonistes, après leur visite consécutive à Damas, de respecter la trêve qui leur est demandée. En attendant d’être fixés sur les décisions concernant la situation ministérielle ou l’échéance présidentielle.
D’autres spéculations se trouvent centrées sur les considérations régionales. Mais aussi économiques et financières. Les professionnels qui les formulent pensent que la Syrie recule devant l’idée de remplacer Hariri. Parce qu’on voit mal qui d’autre, dans la délicate conjoncture extérieure présente, pourrait avoir son entregent et se montrer d’un concours diplomatique aussi efficace. Sans compter les pressions en cours, qui peuvent prendre à tout moment une forme militaire. De même, aucun substitut plausible ne peut limiter autant les dégâts du côté de la récession. Et ne peut contribuer aussi efficacement à préserver à tout le moins la stabilité de la livre. Dont l’effondrement provoquerait des grèves et des manifestations en chaîne.
Dans cet ordre d’idées, un changement de cabinet ne se justifierait que si l’on pouvait mettre en place une équipe exceptionnelle. Ce qui ne semble pas pouvoir se faire. Sleiman Frangié a bien résumé le tableau, après sa rencontre avec le patriarche Sfeir. En soulignant qu’il adhérerait à un gouvernement d’exception, formé de leaders capables. Mais qu’il ne voit pas de raison d’installer un gouvernement ordinaire, comme cela paraît envisagé par certains.

Émile KHOURY
«Le gouvernement reste. » Laconique, Hariri se contente de ce commentaire, après sa mystérieuse visite à Damas. Il n’évoque aucun détail. Ne désigne pas les personnalités qu’il a pu rencontrer. Ne précise aucun terme de l’arrangement qu’il a manifestement conclu au sujet de la crise relationnelle qui l’oppose au régime.Tout ce qui lui importe, de toute évidence,...