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Situation gouvernementale, échéance présidentielle Des agendas bourrés de soucis distincts pour Damas et Beyrouth

Communauté de sort peut-être, mais préoccupations largement différentes pour la Syrie et le Liban (officiel). C’est ce que reconnaît un cadre du pouvoir. Pour qui la disparité actuelle est l’une des causes principales de la forte confusion qui mine les rangs loyalistes. Un peu laissés à eux-mêmes, alors qu’ils sont accoutumés au fameux mot d’ordre. Si sécurisant pour qui n’a pas le sens des responsabilités exagérément développé. Certes, des orientations continuent à être données. Mais elles se limitent aux grands axes et ne portent plus, comme auparavant, sur les moindres vétilles du Landernau local. Dont le personnel se retrouve donc, et dès lors, perdu, égaré, déboussolé.
Au point que les déclarations des ministres, déjà peu remarquables par leur cohésion en temps ordinaires, en deviennent franchement contradictoires. Ainsi en est-il pour la question gouvernementale. Les haririens disent que le cabinet reste jusqu’à la fin du mandat présidentiel. Les lahoudistes, qu’il s’en ira après le vote du budget. Beaucoup d’indépendants estiment de leur côté qu’en réalité, Damas n’a encore pris aucune décision à ce sujet. Certains s’aventurent même à détecter des divisions, ou à tout le moins des divergences, dans les rangs des décideurs qui traitent le dossier local. Et qui auraient été de la sorte contaminés par un virus que l’on croyait spécifiquement libanais.
Il faut, sans doute, relativiser. Pour rappeler que, pris entre l’enclume américaine et le marteau israélien, les Syriens n’accordent sûrement pas beaucoup de temps de réflexion aux problèmes que leurs bons amis libanais leur posent ou leur proposent. Sur l’agenda syrien, pour revenir à cette métaphore commode, on peut lire : territoires palestiniens, Irak, Israël, USA, Turquie, Iran. À la rigueur, au chapitre Liban, Hezbollah, Sud. Ou même, pourquoi pas, Bkerké, vu sous l’angle très large de l’offensive diplomatique en direction de l’Occident. Mais les querelles interféales ne sont probablement inscrites qu’en caractères minuscules sur ces éphémérides.
Le mot même d’échéance n’évoque pour le moment et pour les Syriens que la présidentielle US. C’est-à-dire qu’on leur a clairement fait savoir qu’ils doivent s’aligner avant que la campagne des primaires ne prenne son élan, dans quatre ou cinq mois.
Pour les Libanais, par contre, la date butoir principale, c’est en principe l’élection d’un nouveau chef de l’État, l’an prochain. Mais les lahoudistes, plus exactement les ultras, s’affairent fébrilement pour gommer ce rendez-vous. En le remplaçant par la reconduction ou par la prorogation. Pour faciliter l’opération, pour la rendre possible, il faut tenter de faire sauter la capsule Hariri, qui bouchonne tout. C’est pourquoi le cabinet reste une cible urgente, malgré les signaux contraires captés à la suite du sommet bilatéral.

Attaques
On mobilise en conséquence non seulement les (nombreuses) forces politiques hostiles au milliardaire, mais aussi des milieux d’affaires ainsi que des syndicats déterminés. On attaque donc Hariri sur son territoire même, l’économie-finances. Certains exaltés ne veulent même pas attendre que le budget soit voté aux alentours de février probablement. Ils réclament à cor et à cris que Hariri s’en aille en même temps que cette déplorable année 2003. Cet empressement s’explique en réalité par la crainte qu’au printemps, la conjoncture régionale ne devienne trop agitée, ou au contraire trop apaisée, pour qu’un changement ministériel au Liban reste envisageable. Car on tiendrait à Hariri soit pour mieux affronter la tempête, soit pour négocier un nouveau moratoire financier avec les pays créanciers, au cas où la détente serait à l’ordre du jour. Ces adversaires du président du Conseil reconnaissent donc indirectement qu’il peut encore paraître comme indispensable. Il n’est pas exclu, dès lors, que les décideurs pour leur part pensent qu’il n’a jamais cessé de l’être. D’autant qu’il leur est utile, à eux-mêmes, sur un point tout à fait particulier. À savoir, comme il l’a déjà prouvé il y a quelques mois, par le surplus qualitatif consistant que son entregent international, européen surtout, peut apporter à leur actuelle contre-offensive diplomatique. Qui va être marquée, comme on sait, par une tournée européenne du président Assad.
En tout cas, et en complément aux assurances de maintien du statu quo ministériel dont parlent les haririens, il est certain que les positions actuelles des décideurs servent la cause du Premier ministre. Damas fait en effet savoir (à bon entendeur salut) que les protagonistes libanais qui se partagent le pouvoir doivent dissocier la question d’un éventuel changement ministériel de celle de la présidentielle. En ajoutant qu’il est d’ailleurs prématuré de débattre de cette élection. Ce point de vue convient aux partisans de Koraytem bien plus qu’à ceux du régime. Pour qui, répétons-le, le chambardement gouvernemental n’a de sens que s’il facilite la reconduction ou la prorogation.
Reste la rencontre Lahoud-Sfeir. Les proches du prélat coupent court à toute interprétation tendancieuse. Non, indiquent-ils, le cardinal ne modifie en rien ses positions. Il ne varie pas d’un iota sur la question de l’amendement constitutionnel. Tout en considérant, d’ailleurs, qu’il est trop tôt pour plonger dans les convulsions de la présidentielle. Le patriarche déplore fortement les querelles intestines qui paralysent l’activité et nuisent à l’économie du pays, tandis que la population souffre de la récession. Le prélat est favorable au changement radical que prône le président Hoss, car la situation devient insupportable pour les Libanais.

Philippe ABI-AKL
Communauté de sort peut-être, mais préoccupations largement différentes pour la Syrie et le Liban (officiel). C’est ce que reconnaît un cadre du pouvoir. Pour qui la disparité actuelle est l’une des causes principales de la forte confusion qui mine les rangs loyalistes. Un peu laissés à eux-mêmes, alors qu’ils sont accoutumés au fameux mot d’ordre. Si sécurisant pour...