Rechercher
Rechercher

Actualités

DOCUMENTAIRE Lamia Joreige a présenté son premier film « Houna Wa Roubbama Hounak » : citer l’absent (PHOTO)

Houna Wa Roubbama Hounak (Ici et peut-être ailleurs), 54 minutes de documentaire réalisées par Lamia Joreige, qui signe ici sa première œuvre. Suivant un cheminement esthétique implacable depuis 1993, celui des traces de guerre, l’artiste « rejoue le parcours du conflit, un parcours guidé par la ligne verte ». À partir d’une question unique, la réalisatrice va à la rencontre de personnes anonymes et leur demande si elles ont connu des disparus de guerre, dans le périmètre de la ligne de démarcation. Les réponses, et surtout les réactions, sont à elles seules révélatrices d’un postulat établi et défendu par Lamia Joreige : « À travers la répétition d’une même question et l’accumulation des réponses, on décèle la diversité des discours existants. »
Les frontières de guerre, si elles se sont estompées, n’en demeurent pas moins des blessures à vif, communes à chaque individu qui a connu, de près ou de loin, le drame d’une personne ni morte ni vivante, simplement enlevée de son environnement, mais toujours vivace dans la mémoire de ceux qui l’ont côtoyée. « À partir d’histoires personnelles, c’est la mémoire collective qui resurgit, explique la réalisatrice. Les réponses sont là pour dire, très clairement, qu’il y a autant de vérités qu’il y a de personnes. »

Le drame vécu
En effet, Lamia Joreige précise qu’il ne s’agit en aucun cas d’une enquête et qu’elle aurait d’ailleurs été incapable, sans une grande distance temporelle, d’aller, sitôt les combats terminés, sur la ligne de démarcation et poser sa question à chaud. « La grande réalité, dit-elle simplement, c’est le drame vécu. » Car la difficulté majeure, c’est de savoir « comment raconter un drame, comment aborder le sujet ». La solution s’est imposée d’elle-même : céder la caméra aux intervenants en laissant émerger les réactions et surtout en arrivant à faire revivre, par un nom, une date, l’existence d’un disparu. Autrement dit, « citer l’absent ».
Si Lamia Joreige s’est intéressée au sujet à cause d’un drame familial similaire, sa recherche d’anonymes rejoint ses propres questionnements sur la disparition de son oncle, qui sera « cité », par un hasard fortuit, par deux personnes qu’elle a interrogées. Ce « diagnostic » langagier, à travers lequel la documentariste se demande si « la guerre est encore présente », atteint fortement et durablement son but. Si la guerre est tapie dans les mémoires, tantôt comme une plaie béante, tantôt comme un déni irrévocable, Houna Wa Roubbama Hounak est un douloureux et remarquable rappel à l’ordre contre l’amnésie mentale, ultime et pathétique rempart placé devant l’obligatoire travail de deuil de 17 ans de guerre inutile.

D.G.
Houna Wa Roubbama Hounak (Ici et peut-être ailleurs), 54 minutes de documentaire réalisées par Lamia Joreige, qui signe ici sa première œuvre. Suivant un cheminement esthétique implacable depuis 1993, celui des traces de guerre, l’artiste « rejoue le parcours du conflit, un parcours guidé par la ligne verte ». À partir d’une question unique, la réalisatrice va à la...