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Hommage - Il y a trois mois, disparaissait Pierre Hélou Un arrêt dans le voyage


Pour la commémoration des défunts, nous avons tous une pensée pieuse pour les êtres chers qui nous ont précédés dans ce qui fait partie de la vie : la mort.
Après la disparition brutale de Pierre Hélou, il y a tout juste trois mois, un sentiment irrépressible de fidélité à nos souvenirs communs qui s’étalent sur plus de soixante ans – mis à part quelques passages à vide de l’existence – me pousse à livrer ces quelques réflexions en guise de témoignage.
L’homme politique était reconnu, qui ne manquait ni de dévouement ni de feu. Pourchasseur des tièdes, il dénonçait avec force la cautèle, l’hypocrisie de certains politiciens qui, dès 1975-76, n’avaient pas su transcender les clivages mesquins et faire les choix courageux. Un soir de cet été-là (1976), il me disait très amer : « Nous assistons aux premières vêpres avant la nuit. »
Cette phrase prémonitoire est restée gravée dans ma mémoire. Depuis l’atroce saignée qu’a connue notre pays, il est resté égal à lui-même, adversaire de tous les fanatismes. Sans jamais forfaire à l’honneur, avec clairvoyance et lucidité, il savait qu’à l’impossible nul n’étant tenu, il fallait parfois composer. Et, « minima de malis », prendre le moins mauvais parti d’une situation donnée pour sauver ce qui peut l’être, c’est à ce Liban qu’il a tant aimé. C’était une forme d’intelligence du cœur, qui répondait parfaitement aux polémiques fielleuses de va-t-en guerre irresponsables.
Si l’on sait à peu près tout de l’homme politique, on connaît moins l’homme tout court, sa culture, son humanisme. Ceux-ci se sont nourris au contact de son beau-père, l’immense Michel Chiha, et au cours de leurs cinquante-quatre ans de mariage, dans la compagnie de Madeleine, son admirable épouse.
Une fois, dans un quartier populeux de Beyrouth, après un magnifique geste de compassion envers des miséreux, il m’a cité Terence : « Je suis homme et rien de ce qui est humain ne m’est étranger. »
Un autre trait de son caractère, c’était sa loyauté. Elle allait de pair avec son attachement profond aux libertés, à la justice, à la dignité de la personne humaine. Les révérences l’horripilaient.
Quelques semaines avant qu’il ne nous quitte, au cours d’une conversation à bâtons rompus par téléphone, lui au Liban et moi en France, il me confiait : « Tu sais, je ne me sens pas vieillir et puis, de toute façon, la mort, comme dirait Gide, n’est qu’un arrêt dans le voyage. » L’auteur des Nourritures terrestres, qui était incroyant, avait retrouvé la foi de son adolescence vers la fin de sa vie.
Au revoir, Pierre.
Au prochain arrêt.
Joe HADDAD
Pour la commémoration des défunts, nous avons tous une pensée pieuse pour les êtres chers qui nous ont précédés dans ce qui fait partie de la vie : la mort.Après la disparition brutale de Pierre Hélou, il y a tout juste trois mois, un sentiment irrépressible de fidélité à nos souvenirs communs qui s’étalent sur plus de soixante ans – mis à part quelques passages à...