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Le différend s’étend à l’ensemble du pouvoir exécutif

N’importe quel sujet qui surgit donne lieu à des empoignades entre les dirigeants libanais, à l’ombre du scintillant système dit de Taëf. Le projet de budget n’échappe pas à cette règle. Les présidents ont affiché, une nouvelle fois, des positions opposées. Mais des sous-controverses mettent également aux prises les ministres. Certains se rangent sous la bannière du régime. D’autres suivent le chef du gouvernement. La troisième force, pour sa part, se divise entre ceux qui penchent pour l’un ou pour l’autre camp, sans s’y rallier complètement, et ceux qui, préférant ne pas se mettre martel en tête, se tiennent à l’écart des disputes. Une tendance prudente, arithmétiquement assez prononcée, puisque réunir un quorum commence manifestement à faire problème. Ainsi, lors de la dernière réunion du Conseil des ministres, il a fallu attendre une heure et quart, en multipliant les appels téléphoniques, pour que le nombre requis soit assuré. Ce qui a porté le chef du gouvernement à inviter les membres du cabinet non seulement à faire acte de présence en Conseil des ministres, mais également à se montrer plus assidus aux séances de la Chambre. Auxquelles ils sont en principe tenus d’assister pour répondre aux questions, sinon aux attentes, des représentants du peuple. Mais jusqu’à présent les pressantes invites haririennes à l’observance des règles d’une démocratie bien comprise ont eu peu d’effet sur les ministres frileux, toujours aussi peu empressés à participer aux débats, que cela soit en Conseil des ministres ou au Parlement.
Quoi qu’il en soit, la nouvelle bataille domestique, relative au budget 2004, est maintenant bien ouverte au sein de l’Exécutif. Le président Lahoud, exerçant son rôle de régulateur, recommande expressément aux ministres d’assumer pleinement leurs responsabilités, chacun à son poste, en s’efforçant d’améliorer leurs prestations propres, dans le cadre d’une participation effective aux débats. Il les prie, comme Hariri l’a fait, de ne pas s’absenter, ni en Conseil ni au Parlement. Ni, bien évidemment, à leurs postes de fonctions, à leurs bureaux dans les départements ministériels qu’ils doivent diriger et animer. Sur un plan moins formel, nombre de ministres se plaignent de la désinvolture que Siniora manifeste à leur égard. En effet, à les en croire, il passe outre dans son projet de budget à leurs demandes, à leurs remarques, aux besoins ou aux réalités de leurs départements. Ils affirment que le ministre des Finances n’a pris la peine de se concerter vraiment avec personne. Et qu’il les ignore comme s’ils n’existaient pas. En distribuant les crédits sans tenir compte des spécificités relatives à la marche des différents ministères. Techniquement, ces ministres s’étonnent du précédent qu’initie Siniora en présentant, en fait, deux projets de budget différents. L’un prévoit un déficit de 31 %. L’autre, qui prend en compte d’éventuelles privatisations, dont le cellulaire, se base sur un déficit réduit de 4 %, c’est-à-dire s’établissant à 27 %. Pour les cadres en question, c’est là une hérésie d’écritures qui risque de beaucoup embarrasser le Conseil des ministres. Car cette instance ne peut évidemment pas adopter deux moutures à la fois et il lui faut choisir. Sous-entendu : il va falloir trancher, arbitrer le conflit qui oppose les présidents justement au sujet des privatisations. À ce propos, les ministres sceptiques notent qu’il faudra voir si l’État, après avoir opté pour la privatisation du cellulaire, pourra tenir ses engagements, alors qu’il n’a pas été en mesure de le faire en ce qui concerne le créneau Paris II. Ils ajoutent, dans le même sens, que la baisse des taux d’intérêt sur la livre décrétée par le gouvernement n’a pas pu être contrôlée de près avec assez d’efficacité. Ce qui porte les milieux spécialisés à craindre une nouvelle hausse de ces intérêts au début de l’an prochain. Alors que nombre d’experts estiment qu’en réalité il faudrait une deuxième baisse, pour soutenir l’effort d’assainissement des finances publiques ainsi que la dynamique des marchés.
En tout cas, sur le plan concret, c’est de nouveau le cellulaire qui cristallise la joute entre les deux camps loyalistes. Si le gouvernement adopte le projet de budget à déficit de 27 % et non de 31 %, cela voudra dire que la privatisation va aller de l’avant et que les offres devront être présentées dans un délai de 60 jours. Pour le moment, le ministre des Télécommunications, Jean-Louis Cardahi, n’a pas réussi à faire prévaloir son point de vue. Pourtant, selon l’un de ses collègues, le ministre possède bien son dossier et doit présenter bientôt au chef de l’État un rapport sur le cellulaire. Dont le personnel de fonctionnement pose problème, comme on sait.
Philippe ABI-AKL
N’importe quel sujet qui surgit donne lieu à des empoignades entre les dirigeants libanais, à l’ombre du scintillant système dit de Taëf. Le projet de budget n’échappe pas à cette règle. Les présidents ont affiché, une nouvelle fois, des positions opposées. Mais des sous-controverses mettent également aux prises les ministres. Certains se rangent sous la bannière du...