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L’EDL affirme que la stabilité financière est vitale pour la survie de l’office Électricité : majoration arbitraire ou mesure préventive ?

Le Conseil des ministres pourrait bien rejeter aujourd’hui la décision impopulaire de majoration de l’abonnement au compteur d’électricité, prise conjointement par le conseil d’administration de l’EDL, le ministère de tutelle et le ministère des Finances. D’autant que le chef de l’État, le général Émile Lahoud, a préconisé mardi la prudence et souligné la nécessité d’appliquer une politique d’assainissement à l’EDL, un mot d’ordre qui sera probablement pris en compte.
Bien qu’il s’agisse d’une décision purement administrative qui n’a pas besoin de l’aval du Conseil des ministres, ce dernier pourrait décider aujourd’hui de la suspendre à la lumière du mécontentement suscité dans les milieux professionnels et syndicaux. Ce n’est pourtant pas l’avis des responsables de l’EDL qui estiment que cette augmentation, qui ne devrait pas affecter lourdement le consommateur, est indispensable pour assurer une certaine stabilité financière dont l’Électricité du Liban a grandement besoin.
L’office, qui souffre depuis plusieurs années d’un déficit chronique, a accumulé à ce jour des dettes qui s’élèvent à 1 milliard 240 millions de dollars répartis entre des dettes d’équipements et des dettes de fonctionnement.
Préconisée par une étude effectuée par une société britannique, la majoration ne peut être justifiée que « par l’augmentation du prix du fuel sur le marché international », affirme une source autorisée au sein de l’EDL. Une manière de répondre à tous ceux qui y voient un moyen de paver la voie à la privatisation, l’abonnement au compteur étant une rentrée fixe et sûre sur laquelle les éventuels acquéreurs peuvent désormais compter.
« Il n’existe aucune corrélation entre cette décision et la privatisation », affirme cette source qui estime en outre qu’il s’agit uniquement d’une « mesure préventive ». Celle-ci a été calculée sur la base de l’augmentation depuis un an et demi du prix des dérivés pétroliers sur le marché international, une tendance qui s’est répercutée négativement sur la situtation financière de l’EDL. Ce responsable s’étonne d’ailleurs que cette mesure puisse susciter une telle réaction, d’autant plus que « c’est la première fois qu’une Administration effectue des prévisions à long terme », rappelant au passage que le ministère pourrait revenir sur sa décision au cas où le prix du fuel-oil viendrait à baisser.
Selon lui, l’office, qui était confronté au choix de relever le prix de la consommation au kilowatt ou celui de l’abonnement au compteur, a choisi « un moindre mal », dans la mesure où la première option aurait été bien plus compliquée à faire adopter – puisqu’une majoration du prix au kilowatt nécessite une décision prise en Conseil des ministres – en tous les cas plus douloureuse à supporter par les citoyens. D’ailleurs, rappelle cette source, l’augmentation de l’abonnement au compteur, qui ne devrait pas dépasser les 10 000 LL pour un abonnement de 15 ampères – c’est le cas de 60 % des consommateurs – sera compensée par une réduction de 50 % sur les frais de tout autre formalité.
À la question de savoir pourquoi faut-il pénaliser le citoyen honnête qui non seulement paie régulièrement ses factures, mais le fait également pour le compte des autres, cette source relève que cette mesure ne vise pas tant à compenser les impayés, qui « ne pèsent plus aussi lourd qu’avant sur la situation financière de l’EDL », qu’à faire face à la fluctuation des prix du pétrole, l’office n’étant pus capable d’assumer les frais de l’approvisionnement en fuel-oil.
Face à cette situation, les experts se demandent pourquoi l’EDL n’utiliserait pas le gaz ou l’eau comme source d’énergie à la place du fuel qui est coûteux. La source de l’EDL répond que le projet qui consiste à substituer le gaz au fuel a été mis sur les rails il y a quelques années et ne sera pas finalisé de sitôt. Seule la centrale de Beddawi sera bientôt opérationnelle au gaz. Quant à l’eau, elle ne peut être utilisée que comme source auxiliaire puisqu’elle ne contribue que dans une proportion de 10 % des besoins en énergie, relève cette source. Préférant mettre l’accent sur les réalisations de l’office que « l’opinion publique tend à occulter », les responsables de l’EDL soulignent que la distribution du courant s’est nettement améliorée depuis un an ainsi que le recouvrement des factures.
« Ce qu’il faut savoir, c’est que l’EDL a réussi à augmenter le taux de perception des factures impayées dans une proportion de 33 % au cours de l’année dernière », indique la source citée en précisant que, pour l’année 2002, les recettes sont passées de 620 milliards de LL à 795 milliards de LL, un chiffre qui devrait atteindre les 900 milliards de LL d’ici à la fin de l’année, ce qui représente une augmentation de 50 %. Il souligne au passage que 140 000 nouveaux compteurs ont été installés en 2002, une année qui a également connu un accroissement notable des contraventions, soit 33 000 procès-verbaux. Peut-on espérer que ces sanctions puissent un jour toucher les hommes politiques qui continuent de se dérober à leurs factures ? « Les contraventions sont faites sur la base de l’irrégularité commise et non du titre et de la position de la personnalité en question », rétorque le responsable sur un ton peu convaincant, en indiquant que les moyens de contrôle sont de plus en plus rigoureux.
Rappelons toutefois que ces pertes, dites « non techniques » – par opposition aux pertes techniques occasionnées à la sortie de l’usine –, sont estimées à près de 30 %. Il s’agit d’un manque à gagner dû aux branchements illicites effectués par certains consommateurs. Cette proportion comprend également la catégorie de consommateurs qui, eux, possèdent un compteur qu’ils traficotent régulièrement. Reste enfin ceux qui se contentent de ne pas payer, comme c’est le cas par exemple des Administrations libanaises, des camps palestiniens et de certaines régions libanaises.
Certains observateurs relèvent toutefois que face à l’incapacité de l’EDL de résoudre le problème du paiement des factures, cette Administration a opté pour la formule de la majoration de l’abonnement au compteur qui est le « le seul moyen d’assurer à l’EDL des rentrées sûres et de rassurer les investisseurs potentiels ».
« Tout le monde sait que seule une décision politique et non administrative pourra contraindre tous ceux qui ne paient pas de s’acquitter de leur dû. Puisque l’État n’est pas encore prêt à prendre une telle mesure coercitive, l’EDL a fini par trouver une solution alternative pour compenser le déficit », affirme un observateur.
Une analyse que réfute le responsable au sein de l’EDL qui affirme que le nombre de consommateurs qui possèdent un compteur et ne paient pas leurs factures n’est pas énorme.

Jeanine JALKH
Le Conseil des ministres pourrait bien rejeter aujourd’hui la décision impopulaire de majoration de l’abonnement au compteur d’électricité, prise conjointement par le conseil d’administration de l’EDL, le ministère de tutelle et le ministère des Finances. D’autant que le chef de l’État, le général Émile Lahoud, a préconisé mardi la prudence et souligné la...