Il reste que nombre d’âmes charitables sont parvenues, à un moment déterminé, à instiller de l’eau dans le gaz entre Hariri et Damas. Notamment en propageant des bruits sur les démarches effectuées à l’étranger par le Premier ministre, sans coordination avec le président Lahoud ou avec les décideurs. L’on a donc jeté des doutes sur les objectifs de ces voyages. En laissant entendre que Hariri mise sur un affaiblissement de la Syrie pour tenter de devenir le maître du jeu politique intérieur. Et pour passer un jour de la défensive à l’attaque. Mais l’intéressé s’est hâté de réfuter ces venimeuses assertions. Qui lui ont causé du tort, puisqu’elles seraient la principale raison de l’arrangement auquel il a dû se soumettre dernièrement. C’est-à-dire de la trêve qui implique une reprise des travaux effectifs d’un Conseil des ministres où le milliardaire n’a plus la majorité. Il y a eu donc une phase, brève mais intense, où les adversaires de Hariri n’ont cessé de marquer des points contre lui.
Mais aujourd’hui, les choses sont plus nuancées. Hariri a certifié aux Syriens qu’il se tient fermement à leurs côtés, quelle que puisse être l’évolution du cours des choses dans la région. Il leur a répété qu’il est stratégiquement, organiquement lié à eux, parce qu’il y va de l’intérêt des deux pays. Ensuite, toujours selon les mêmes sources informées, il leur affirmé qu’il est facile de vérifier sa bonne foi en ce qui concerne ses tournées extérieures. Au cours desquelles il a défendu auprès de ses interlocuteurs la cause commune syro-libanaise. Évoquant les tiraillements avec le régime, Hariri a affirmé aux Syriens qu’ils se limitent à des questions intérieures, notamment économiques ou de développement, sans aucun rapport avec le dossier régional. Il a précisé que des projets pour deux milliards de dollars se trouvent bloqués à cause de ces frictions. Ajoutant qu’on ne peut faire assumer au seul gouvernement la responsabilité du gel des engagements pris à Paris II. Et il a rappelé à ce propos que ce n’est pas lui qui avait exigé, au départ, que la responsabilité et la décision soient partagées dans le domaine économique ou financier qui devait lui être réservé.
Toujours est-il qu’après ces explications, les Syriens ont paru suffisamment convaincus pour souhaiter que les heurts entre les présidents ne dégénèrent jamais, aucun pôle ne devant songer à éliminer l’autre de la scène. Ils ont répété qu’au contraire, les dirigeants doivent agir comme un seul homme, et qu’eux-mêmes se tiennent équidistants de tous. En soulignant qu’en cas de divergences, il faut toujours recourir à l’arbitrage des textes constitutionnels. Pour conclure que la gravité de la situation régionale ne permet pas des crises politiques internes au Liban.
Actuellement, les efforts pour normaliser les relations entre les présidences se poursuivent. Le but est de faire front face aux éventualités régionales. La Syrie veut que la ligne dite nationale soit bien soudée. En rassurant tous ses fidèles : elle ne lâche aucun d’eux.
Encore un détail : les Syriens ont été agacés du lancement prématuré de la campagne présidentielle, dossier qu’ils ont donc rapidement refermé. Ils ont reproché à Hariri d’avoir contribué à ce lancement inopiné, en prenant position contre la possibilité d’une reconduction ou d’une prorogation du mandat de l’actuel hôte de Baabda. Hariri a pris acte de ces remarques, en soulignant qu’il ne s’était exprimé qu’en privé, tout comme le chef de l’État quand il réitère le souhait de le voir partir. Hariri a conclu qu’en tout cas, il ne ferait rien sans coordonner avec la Syrie. On attend donc de voir s’il va s’y rendre bientôt.
Émile KHOURY
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