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Les opposants fortement sceptiques quant aux perspectives de réforme politico-administrative

L’adage est connu : pour enterrer un projet, il suffit de le renvoyer en commission. Aussi les opposants se montrent dubitatifs quant aux commissions formées pour la réforme politico-administrative, à la suite des rapports du Conseil de la Fonction publique et de l’Inspection centrale. D’autant que ces instances s’accordent un court délai, d’un mois à peine, pour publier leurs conclusions. D’autant, aussi que le régime aborde le tournant de sa dernière année. Ce qui limite les chances de voir se réaliser des engagements pris dans le discours d’investiture, notamment pour l’édification d’un État de droit et des institutions, qui sont restés lettre morte par la force des choses. Les verdicts du Conseil de la Fonction publique et de l’Inspection centrale ont soulevé un tollé considérable. Pourtant, ces deux organismes dénoncent régulièrement, depuis de longues années, les lourdes aberrations du système en place. Ils n’ont jamais manqué d’épingler les recrutements massifs de complaisance, le bourrage des administrations comme on dit ; le fractionnement des contrats, les adjudications irrégulières faites sans barème d’évaluation secret ; la multiplication des services qui font double emploi ou sont totalement inutiles ; les désignations de conseillers de ministres ; la présence de non moins de 6 179 particuliers qui touchent des émoluments publics à divers titres sans y avoir droit, aux côtés de 14 911 emplois créés sans justification, sans nécessité. Tout cela sans sanctions, malgré les innombrables avertissements des organismes de contrôle et sans réaction notable des autorités politiques. Ainsi, la décision du Conseil des ministres de larguer les effectifs surnuméraires n’a connu qu’une application symbolique et le nombre de ces privilégiés, payés à ne rien faire, est resté globalement le même.
En 2001, pour ne pas remonter plus loin, l’Inspection centrale tirait à boulets rouges sur la corruption généralisée. Elle citait d’innombrables cas où des ministres prenaient des arrêtés contraires aux décisions du Conseil des ministres. L’Inspection, évoquant le dossier des biens domaniaux maritimes, précisait que sur les 7 milliards de LL de taxe d’exploitation, l’État n’avait pu recouvrer que 150 millions, sous prétexte que l’on n’avait pu notifier les intéressés, leur adresse n’étant pas connue. De richissimes SDF (sans domicile fixe) en somme ! Le même rapport signalait des irrégularités au niveau de la Loterie nationale, par mauvaise utilisation du local de dépôts de billets invendus, ce qui facilitait l’obtention de carnets contenant des numéros gagnants. Du côté des conseillers de ministres, l’enquête de l’Inspection lui avait permis d’établir que ces auxiliaires à rôle consultatif se permettaient d’exécuter directement des travaux ou des formalités, à l’insu du directeur général ou des chefs de services concernés.
La liste des infractions est évidemment trop longue pour être rapportée dans son intégralité. Il faut d’ailleurs croire que les rapports des organismes de contrôle, qui sont remis annuellement aux autorités, sont peu lus. En effet, avant cette année, ces documents n’avaient fait aucun bruit, alors que leur fond est toujours le même. Les opposants se demandent dès lors si le recours à des commissions de suivi est bien sérieux. À leur avis, il aurait fallu que l’État se saisisse d’urgence du dossier au plus haut niveau. C’est-à-dire que le pouvoir exécutif, incarné par le Conseil des ministres, aurait dû consacrer une séance à l’étude des rapports des organismes de contrôle, pour la prise de mesures adéquates. Après quoi, un débat aurait été organisé à la Chambre. Les mêmes sources ajoutent qu’en pratique, on ne peut évidemment rien attendre du système. Car les fautifs restent politiquement protégés. Ainsi, toutes les tentatives effectuées antérieurement pour épurer l’Administration ont échoué. Du fait, évident, que l’on n’a jamais voulu traiter le problème par l’indispensable commencement, c’est-à-dire par la réforme politique en vue d’une vraie démocratisation du système. Passant par des élections législatives dignes de ce nom, libres, équilibrées et égalitaires. En attendant, ainsi que le déclare Béchara Merhej, comment peut-on espérer réformer l’Administration quand elle se trouve noyautée par la politique et qu’un directeur général soit l’homme de tel leader ? Hussein Husseini souligne, de même, qu’il est impossible de rien faire tant que la classe politique reste elle-même corrompue. C’est ce que confirme Anouar el-Khalil, qui avait assumé le portefeuille de la réforme pendant deux ans et qui signale que ses tentatives de correction avaient été sabotées par la politique à relents confessionnels.
Émile KHOURY
L’adage est connu : pour enterrer un projet, il suffit de le renvoyer en commission. Aussi les opposants se montrent dubitatifs quant aux commissions formées pour la réforme politico-administrative, à la suite des rapports du Conseil de la Fonction publique et de l’Inspection centrale. D’autant que ces instances s’accordent un court délai, d’un mois à peine, pour publier...