En 2001, pour ne pas remonter plus loin, l’Inspection centrale tirait à boulets rouges sur la corruption généralisée. Elle citait d’innombrables cas où des ministres prenaient des arrêtés contraires aux décisions du Conseil des ministres. L’Inspection, évoquant le dossier des biens domaniaux maritimes, précisait que sur les 7 milliards de LL de taxe d’exploitation, l’État n’avait pu recouvrer que 150 millions, sous prétexte que l’on n’avait pu notifier les intéressés, leur adresse n’étant pas connue. De richissimes SDF (sans domicile fixe) en somme ! Le même rapport signalait des irrégularités au niveau de la Loterie nationale, par mauvaise utilisation du local de dépôts de billets invendus, ce qui facilitait l’obtention de carnets contenant des numéros gagnants. Du côté des conseillers de ministres, l’enquête de l’Inspection lui avait permis d’établir que ces auxiliaires à rôle consultatif se permettaient d’exécuter directement des travaux ou des formalités, à l’insu du directeur général ou des chefs de services concernés.
La liste des infractions est évidemment trop longue pour être rapportée dans son intégralité. Il faut d’ailleurs croire que les rapports des organismes de contrôle, qui sont remis annuellement aux autorités, sont peu lus. En effet, avant cette année, ces documents n’avaient fait aucun bruit, alors que leur fond est toujours le même. Les opposants se demandent dès lors si le recours à des commissions de suivi est bien sérieux. À leur avis, il aurait fallu que l’État se saisisse d’urgence du dossier au plus haut niveau. C’est-à-dire que le pouvoir exécutif, incarné par le Conseil des ministres, aurait dû consacrer une séance à l’étude des rapports des organismes de contrôle, pour la prise de mesures adéquates. Après quoi, un débat aurait été organisé à la Chambre. Les mêmes sources ajoutent qu’en pratique, on ne peut évidemment rien attendre du système. Car les fautifs restent politiquement protégés. Ainsi, toutes les tentatives effectuées antérieurement pour épurer l’Administration ont échoué. Du fait, évident, que l’on n’a jamais voulu traiter le problème par l’indispensable commencement, c’est-à-dire par la réforme politique en vue d’une vraie démocratisation du système. Passant par des élections législatives dignes de ce nom, libres, équilibrées et égalitaires. En attendant, ainsi que le déclare Béchara Merhej, comment peut-on espérer réformer l’Administration quand elle se trouve noyautée par la politique et qu’un directeur général soit l’homme de tel leader ? Hussein Husseini souligne, de même, qu’il est impossible de rien faire tant que la classe politique reste elle-même corrompue. C’est ce que confirme Anouar el-Khalil, qui avait assumé le portefeuille de la réforme pendant deux ans et qui signale que ses tentatives de correction avaient été sabotées par la politique à relents confessionnels.
Émile KHOURY
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