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La présidence du Conseil retrouve ses problèmes de marginalisation larvée

Comment assurer une participation effective, un partenariat sans confrontation, au sein du pouvoir ? Le problème revient sur le tapis, malgré le changement de République. Dans le temps, les pouvoirs régaliens du chef de l’État réduisaient le président du Conseil à un rôle de « bachkateb » (clerc d’office), selon le mot de Sami Solh. D’où un sentiment de frustration communautaire, Saëb Salam soutenant alors qu’une partie des Libanais étaient « les enfants de l’épouse légitime, et les autres de la concubine ». Image biblique synonyme de discrimination. Chafic Wazzan qualifiait de son côté la présidence du Conseil de « véritable hachoir », car tout le négatif lui retombait sur les épaules, le crédit du positif allant au régime.
Taëf, pour y remédier, a choisi d’attribuer le pouvoir exécutif à un collectif, le Conseil des ministres. Mais les textes concernant la répartition des prérogatives manquent de clarté, ce qui donne lieu à bien des controverses. Dès le départ, Hraoui s’est empoigné sur la question avec les chefs de gouvernement qui se sont succédé sous son mandat. Même Hoss, sous Lahoud, a émis des plaintes au sujet des empiétements altérant ses pouvoirs. Il affirme, dans un ouvrage, que la présidence du Conseil se trouve actuellement au plus mal.
En réalité, comme le relève un ministre, quand il arrive que l’harmonie règne entre les deux présidences, le problème s’efface. Ce qui laisse entendre que c’est surtout une question de pratique. D’autant que les textes, répétons-le, sont assez flous, sinon contradictoires. Ainsi l’article 64 C (Constitution) donne au chef du gouvernement le titre de président du Conseil en précisant qu’il lui appartient de convoquer cette instance. L’article suivant, le 65, indique que le Conseil doit se réunir régulièrement, à son siège propre, et qu’il est présidé par le chef de l’État quand ce dernier y assiste.
On peut penser, mais cela reste justement à préciser, qu’en principe, le chef de l’État ne participe qu’exceptionnellement aux travaux du gouvernement, quand l’ordre du jour comprend des sujets d’un intérêt national transcendant ou présentant un grave caractère d’urgence. Or l’usage fait que l’exception devient la règle, le président de la République n’étant absent aux séances que de rares fois. D’autant que, par courtoisie, le chef du gouvernement reporte le plus souvent la convocation lorsque le président de la République n’est pas disponible. Et quand il arrive que le Conseil se réunisse quand même sans le chef de l’État, les sujets d’importance sont laissés de côté. En d’autres termes, l’Exécutif se retrouve partiellement paralysé, inactif, improductif. C’est la même chose, si le chef du gouvernement se trouve absent.
Pour y remédier, le ministre cité propose qu’il y ait du rendement, en toutes circonstances, vaille que vaille, en base d’un accord préalable entre les deux présidents sur l’ordre du jour. Le Conseil serait ainsi convoqué par le président de la République ou par le vice-président du Conseil, si le Premier ministre n’est pas là. Mais, à bien y regarder, ce ne serait qu’un palliatif. Parce qu’il faudrait bien continuer à geler les sujets qui fâchent, en cas d’absence de l’un ou de l’autre des deux présidents.
De plus, il existe un problème collatéral : le refus du chef du gouvernement, ou d’un ministre, de parapher un décret pris en Conseil des ministres. Ce qui est aberrant, aux yeux des juristes. Mais se trouve possible du fait que les textes constitutionnels n’obligent pas explicitement les responsables à signer des décisions qu’ils n’approuvent pas. Alors même que ces arrêts doivent automatiquement avoir force de loi à partir du moment où la majorité du Conseil l’a voulu. Il faut cependant souligner que l’article 28 du décret organisant les travaux du Conseil stipule que les décisions de cette instance s’imposent à tous ses membres, en vertu du principe de cohésion gouvernementale. Mais comme il ne s’agit que d’un simple décret, les dirigeants passent outre facilement.
L’on avait vu de la sorte Hariri refuser de signer le décret établissant le mariage civil facultatif, adopté à une large majorité en Conseil des ministres, et faire capoter le projet. Aussi, pour éviter la réédition de telles transgressions, certains proposent que l’on annule le décret d’organisation en question, pour le remplacer par une loi qui serait votée à la Chambre. Ce qui donnerait à cette institution le droit de poser la question de confiance à l’encontre de tout membre de l’Exécutif qui ne respecterait pas ses obligations de paraphe.
Émile KHOURY
Comment assurer une participation effective, un partenariat sans confrontation, au sein du pouvoir ? Le problème revient sur le tapis, malgré le changement de République. Dans le temps, les pouvoirs régaliens du chef de l’État réduisaient le président du Conseil à un rôle de « bachkateb » (clerc d’office), selon le mot de Sami Solh. D’où un sentiment de frustration...