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Vie politique Spéculations sur les capacités de résistance passive haririenne

À combien va se monter la facture politique pour Hariri ? C’est la question que l’on se pose dans les cercles concernés, en comptant les premières notes déjà payées par le Premier ministre. Suite à sa décision de faire le dos rond, d’accuser le coup, d’accepter, sous simple réserve, les décisions prises en Conseil des ministres contre son avis, voire contre son intérêt. Cela pour durer jusqu’à la fin du mandat présidentiel. Assez étrangement, c’est le président Hoss qui déplore cet esprit de concessions, en soutenant que « la présidence du Conseil a atteint un pic de faiblesse ».
Le fait, mal camouflé, est que la guerre psychologique n’est pas finie. En effet, des visiteurs de Baabda prennent un malin plaisir à transmettre au président Hariri des propos blessants attribués au chef de l’État. Sans doute pour qu’il en vienne à perdre son self-control et démissionne. C’est d’ailleurs l’objectif déclaré de certains pôles, qui voudraient voir la présidence du Conseil confiée à un autre. Ils espèrent que Hariri fera place nette de lui-même. Sans qu’il y ait de heurt frontal attisant les susceptibilités.
Mais l’intéressé paraît de son côté résolu à rester jusqu’à la fin du mandat présidentiel, quels que soient les sacrifices à consentir à cette fin. Les provocations le laissent froid. Il fait confiance à ses partisans pour qu’ils lui pardonnent l’affaiblissement passager de la position, et du poste, qu’il occupe. Hariri tient du reste aux prérogatives de la présidence du Conseil, du moins sur le plan des principes. D’ailleurs, il pense qu’il ne faut pas ouvrir la voie à une relecture des articles de la Constitution concernant les pouvoirs, parce que cela provoquerait de redoutables querelles intestines. La doctrine de Hariri, qu’il répète sans cesse, est que le Liban ne se gouverne que par consensus. À cause de son pluralisme, le pays ne supporte pas, à son avis, un commandement unifié, de parti ou de personne. Il faut en effet, pour assurer l’équilibre de la balance, que les principaux courants politiques soient représentés au gouvernement. D’autant qu’il n’existe aucune force disposant de 51 % des voix à la Chambre.
Le fait est que la formule d’un vainqueur et d’un vaincu n’a jamais produit au Liban que des clivages aigus, parfois même des révolutions. La composition complexe, délicate, du pays ne tolère pas qu’une frange soit frappée d’un sentiment d’injustice, de peur et de discrimination. Lorsque certains présidents de la République avaient voulu établir une domination unilatérale sur les leviers de commande, ils en avaient finalement payé le prix, et le pays en avait lourdement pâti. Après la redistribution des pouvoirs opérée à Taëf, les empiètements de prérogatives débouchent fatalement sur un déséquilibre général autant que sur des querelles entre dirigeants. Il n’est pas admissible que le président de la République et le président du Conseil apparaissent, à tour de rôle, comme un vainqueur et un vaincu.
Jusqu’à présent, comme le reconnaissent la plupart des Libanais, les interventions syriennes ont permis de colmater les brèches. Sans quoi le pays aurait plongé dans un cycle de secousses sans fin et, sans doute, dans une irrémédiable crise de pouvoir.
Cela n’empêche pas, estiment en même temps les Libanais, que ce pays a droit à recouvrer sa souveraineté. Et son indépendance. Ce qui signifie que l’arbitrage doit sourdre de l’intérieur et non venir du dehors. C’est-à-dire qu’il faut recourir à la Constitution. Or, elle est imparfaite et confuse, c’est le moins que l’on puisse dire. Il faut donc s’entendre sur une nouvelle Constitution, prenant en compte l’évolution des temps depuis Taëf. Car les choses ont changé en profondeur durant les 12 dernières années. Le Liban a manifestement besoin d’un nouveau système.
Réalistes, nombre de professionnels soulignent que les troubles circonstances présentes ne se prêtent pas à une révision de la Constitution et, a fortiori, à un changement de système. Cela serait difficile même en période ordinaire, ajoutent-ils. Car la communauté qui a marqué des points à Taëf n’accepterait jamais de perdre cet acquis. Certains estiment d’ailleurs que les querelles entre les présidents n’ont pas pour cause Taëf même, mais la mauvaise application qui en est faite. Il n’y aurait pas de problème, soulignent-ils, si les préceptes constitutionnels de coordination entre les pouvoirs étaient respectés de tous. On voit donc que même sur la notion de l’entente, il n’y en a pas. C’est ce qui pousse un pôle influent à affirmer qu’en définitive, on ne peut guère sortir de l’arbitrage syrien, qui reste une nécessité évidente, du moment que les Libanais ne peuvent visiblement accorder leurs violons.

Émile KHOURY
À combien va se monter la facture politique pour Hariri ? C’est la question que l’on se pose dans les cercles concernés, en comptant les premières notes déjà payées par le Premier ministre. Suite à sa décision de faire le dos rond, d’accuser le coup, d’accepter, sous simple réserve, les décisions prises en Conseil des ministres contre son avis, voire contre son...