Rechercher
Rechercher

Actualités

Les querelles en suspens, mais la démocratie aussi

Ouvre un œil, ferme un œil, et tu y es, dit suavement l’adage local pour signifier combien le temps passe vite et peut vous prendre en traître. Ainsi, en l’an 2000 c’est à la toute dernière minute, comme le lièvre de la fable, que l’on s’est mis à courir après la fabrication d’une nouvelle loi électorale. Sous le prétexte fallacieux que l’on n’avait plus le temps de mettre au point une formule consensuelle nécessitant des concertations élargies, on s’était rabattu sur un texte pratiquement édicté, parachuté comme nombre de députés de cette cuvée, par les décideurs. Et l’on avait pu assister à une sorte d’autocritique inédite, touchante, d’un chef de gouvernement dénonçant une loi qu’il avait lui-même signée de ses blanches mains pour l’adresser à la Chambre.
Les bénéficiaires alternatifs ou successifs d’un système consacrant la suprématie de la télécommande sont les trois principaux camps loyalistes qui noyautent le pouvoir. Frères ennemis, ils se livrent une incessante lutte d’influence. Et en même temps, ils défendent ensemble un bien commun, ce que l’on appelle la ligne nationale. Ainsi, quand Walid Joumblatt précise que Hariri a perdu son appui, qu’il se range désormais du côté du régime comme des tuteurs, il laisse entendre que ce choix signifie que dorénavant les décideurs privilégient Baabda face à Koraytem. Les haririens interloqués rétorquent qu’ils sont tout autant prosyriens, sinon plus, que le seigneur de Moukhtara. Du côté des lahoudistes et de leurs alliés, on entend deux ou trois cadres de partis anciennement rivaux et maintenant dans la même tranchée, comme le PSNS et les Kataëb, répéter que l’alliance organique avec la grande sœur est plus que jamais sacrée, en ces temps d’épreuves, de défis et de menaces israélo-américaines. Le front, vu sous l’angle d’une approche régionale, reste donc solidement uni. Et toujours docile.
Ce qui implique que comme en l’an 2000, on risque d’attendre le dernier moment pour élaborer une nouvelle loi électorale. La question est d’une importance capitale pour la vie politique du pays. Le mandat de la présente Chambre a été rallongé de huit mois, abusivement sinon anticonstitutionnellement (c’est toujours un petit plaisir de pouvoir placer le plus grand mot de la langue française). Sous prétexte de ne pas bousiller la saison touristique d’été, mais en fait pour ne pas chevaucher de trop près avec l’élection présidentielle, prévue pour l’an prochain. À première vue, il y a encore de la marge, question délais. Mais en fait, l’on a déjà pris du retard. Parce que le dialogue élargi à toutes les fractions, nécessaire pour moudre une loi à caractère national consensuel, seule garantie d’équilibre interne, nécessite au moins deux bonnes années. Et parce que, d’autre part, on n’a encore rien fait du côté de la décentralisation administrative ni, surtout, du côté du redécoupage multiplicateur des districts. Or, en principe et sauf si l’on compte s’amuser une fois de plus à violer Taëf, ce sont les mohafazats qui doivent servir de circonscriptions. Au nombre de six, ils seraient plus que doublés. Tout le paysage politique en serait modifié et il y aurait une bonne possibilité de rétablir des équilibres cruciaux.
Sauf si, contrairement à certaines expectatives, rien ne devait changer, ni sur la forme ni sur le fond. D’ailleurs, dans le cas contraire, le problème pourrait être encore plus aigu : si la loi électorale ne devait pas être, une nouvelle fois, parachutée, quelle chance y aurait-il de voir les Libanais s’entendre entre eux, surtout pressés par le temps ?
I.D.
Ouvre un œil, ferme un œil, et tu y es, dit suavement l’adage local pour signifier combien le temps passe vite et peut vous prendre en traître. Ainsi, en l’an 2000 c’est à la toute dernière minute, comme le lièvre de la fable, que l’on s’est mis à courir après la fabrication d’une nouvelle loi électorale. Sous le prétexte fallacieux que l’on n’avait plus le...