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L’attentat aux relents confessionnels marquera de son empreinte le Conseil des ministres d’aujourd’hui

Il est évident qu’il faudrait inscrire l’attentat à la roquette, dans la nuit de samedi à dimanche contre les locaux de la Future TV, dans le même cadre que les altercations et autres algarades qui ont accompagné la finale du championnat du Liban de basket-ball ; dans le même cadre également que les positions affichées par différents cheikhs dans la foulée de la décision du Conseil d’État au sujet du décret de naturalisations.

Un seul et même cadre donc : ramener sous les projecteurs le confessionnalisme made in Lebanon, comme si certains prenaient un malin plaisir à rajouter de l’huile sur le feu en ravivant les dissensions communautaires, dans le but de porter atteinte à la paix civile et à la stabilité – dans le but, aussi, de miner le climat positif engendré par les positions historiques du patriarche maronite, que ce soit au sujet de la guerre en Irak qu’à propos de la présence syrienne au Liban.
Quoi qu’il en soit, le landernau politique a été particulièrement surpris par ces volontés de retourner aux anciennes odeurs fétides de la guerre et du confessionnalisme. Comme si l’on voulait montrer à tout prix que les Libanais, dirigeants comme citoyens, étaient incapables de dépasser ce sectarisme, de se lancer vers des horizons bien plus nationaux.
D’autant plus que cet attentat survient en plein conflit entre les hauts dirigeants libanais ; comme si ses auteurs avaient voulu profiter de cette mésentente et dynamiter les tentatives d’apaisement entre Baabda et Koraytem. Lesquelles tentatives avaient fini, ces derniers jours, par aboutir plus ou moins. Pour preuves : l’ordre du jour a été établi et le Conseil des ministres aura bien lieu aujourd’hui. Voilà pourquoi les milieux politiques ont pressé les responsables – notamment le ministre de l’Intérieur, Élias Murr – de tout faire pour, obligatoirement, trouver les coupables et révéler leurs desseins.
Parce qu’il serait inadmissible que les services de sécurité ne fassent pas toute la lumière sur cet attentat, et parce que le mystère autour de celui-ci ne ferait qu’épaissir les discordances entre les gens du pouvoir. À l’heure où les cinquièmes colonnes s’emploient à tout faire pour creuser encore plus le fossé entre eux, et à l’heure où de bonnes âmes se démènent pour tirer un trait sur les conflits interprésidentiels et ouvrir une nouvelle page de coopération.
Cet attentat survient également alors que Washington continue de faire pression sur le Liban pour que le Hezbollah et les réfugiés palestiniens soient désarmés, pour que l’armée se déploie au Liban-Sud, en préambule à l’établissement d’une « feuille de route » pour le Liban. Tout cela alors que des sources diplomatiques ont rapporté que les États-Unis ne sont pas particulièrement pressés de mettre au point cette « feuille de route » en question, du moins en ce moment.
Ce qui fait que cette attaque contre la Future TV ne vient pas du tout arranger les choses, vues du moins sous l’angle US. D’autant plus que le message sous-jacent aux deux roquettes tirées n’est pas uniquement adressé au Premier ministre, mais vise également l’ensemble des dirigeants, ainsi que Damas, qui s’est toujours estimé responsable de la sécurité sur la scène interne.
Autre point intéressant dans le timing de cet attentat, qui a eu lieu dans la foulée des mesures adoptées par les autorités militaires et les services de sécurité dans la Békaa, et qui ont abouti à l’arrestation d’un gang de voleurs de voitures. Corollaire : quelles sont les parties qui seraient à même de posséder ce genre d’armes – des roquettes de 107 mm, qui n’ont pas été utilisées depuis la fin de la guerre libanaise.
Enfin, des sources bien informées indiquent que le Conseil des ministres – prévu pour se tenir exceptionnellement aujourd’hui – ne pourra pas éviter d’évoquer ce qui s’est passé durant ce week-end, et que le gouvernement adopterait des mesures visant à maîtriser davantage la sécurité du pays, empêcher le dynamitage de la saison touristique et ternir l’image du Liban. D’où la nécessité, sans doute, de resserrer les rangs et de regarder dans la même direction. Encore faut-il que l’attentat contre la Future TV n’occulte pas les problèmes essentiels dont devraient débattre impérativement les Trente.

Philippe ABI-AKL
Il est évident qu’il faudrait inscrire l’attentat à la roquette, dans la nuit de samedi à dimanche contre les locaux de la Future TV, dans le même cadre que les altercations et autres algarades qui ont accompagné la finale du championnat du Liban de basket-ball ; dans le même cadre également que les positions affichées par différents cheikhs dans la foulée de la décision...