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La course à la présidentielle est déjà lancée !

Deux séances du nouveau gouvernement. Deux bombes lancées. Par des ministres maronites. Respectivement Khalil Hraoui et Sleimane Frangié. Indices largement suffisants aux yeux des professionnels du cru pour considérer que la course à la prochaine présidentielle, dans un an et demi, est déjà sur les rails. Et de la pire des manières, dans un climat d’empoignades. Hraoui a pris à partie Hariri, et Frangié s’est attiré les foudres de Lahoud. On est au bord de l’explosion, ou plutôt de l’implosion, d’un cabinet qui n’est même pas encore investi de la confiance du Parlement. D’ailleurs, la formation même de cette équipe portait en elle plusieurs germes de discorde. Dès les nominations, des impétrants se rebiffaient contre la distribution des portefeuilles. Plusieurs ministres étaient accusés d’avoir posé des pièges en coulisses. Tandis que certains dirigeants se voyaient reprocher une soumission totale aux volontés des décideurs. Qui ne se sont vu opposer aucune objection, même sur des noms qu’on qualifie communément d’impossibles, à cause d’un profil avéré d’incompétence. Ou de rejet populaire. Selon un ministre, la combinaison a été préparée d’avance et imposée telle quelle à tous. Il ajoute que l’opposition d’un dirigeant a la désignation de Jean Obeid aux AE a été traitée par le mépris. Donc, lors de la première réunion du cabinet, pourtant quasi protocolaire d’habitude, Khalil Hraoui s’est dressé contre le Premier ministre avec éclat. En demandant que le thème des privatisations ne soit pas évoqué dans la déclaration ministérielle, puisqu’il était déjà mentionné dans le programme du gouvernement précédent. Et, surtout, puisque le Conseil des ministres avait été tenu ensuite dans l’ignorance du traitement apporté à ce dossier. Il a dès lors souligné qu’au cas où l’on persisterait à inscrire les privatisations à l’ordre du jour, il faudrait assurer aux ministres qu’ils seraient régulièrement tenus au courant des développements ou des projets sur ce plan précis. Pour certains politiciens, la réaction de Hraoui s’expliquerait par le fait qu’on lui a retiré la Défense pour ne lui confier que le titre de ministre d’État. Ce qui serait un handicap en termes d’influence et le pénaliserait comme partant potentiel pour la course à la présidence de la République. Lors de la deuxième séance, Sleimane Frangié a provoqué une tempête en se lançant dans un sévère réquisitoire coulant au pilori les querelles des dirigeants. Ainsi que leur propension à se partager les parts du gâteau ministériel. On sait que le président de la République a riposté sur un ton extrêmement sévère, pour lever ensuite les débats sur une note de fâcherie. Selon les mêmes professionnels précédemment cités, Frangié aurait été surtout indisposé par la promotion accordée à Jean Obeid, autre nordiste maronite, concurrent virtuel à la présidence. On peut noter, à ce propos, que les disputes qui prennent déjà corps entre prétendants au trône réjouissent les loyalistes haut de gamme. Car le meilleur moyen de diluer ces tensions serait encore de promouvoir l’idée d’une reconduction du mandat présidentiel actuel. Toujours est-il que sur le plan pratique, le gouvernement part sur des bases tellement hétéroclites ou contradictoires qu’on se demande s’il pourra fonctionner. Plusieurs spécialistes spéculent d’ores et déjà sur sa durée, en se demandant si l’on n’a pas à faire, finalement, à un nourrisson quasi mort-né. Le péril d’une paralysie étatique a été mis en relief aussi bien par le patriarche Sfeir, lors de son entretien avec la délégation de la Békaa dirigée par Skaff, que par sayyed Nasrallah. Bien que parachutée, l’équipe aura du mal à éviter tous les champs de mines, d’ici à la fin du mandat présidentiel. Beaucoup pensent dès lors que l’élection du prochain chef de l’État, ou la prorogation du bail du présent locataire de Baabda, aura lieu sous les auspices d’un autre gouvernement. À leur sens, le présent cabinet, dont tous les membres sont très proches des tuteurs, n’a d’autre mission que d’appliquer la ligne que Damas aura choisie par rapport au grand problème de l’heure : les exigences américaines. On sait en effet que les USA veulent le déploiement de l’armée libanaise sur la ligne bleue, la neutralisation du Hezbollah, des camps palestiniens, des organisations installées à Damas et la livraison de terroristes présumés. Les nouveaux Trente, selon ces sources, n’ont pratiquement pas d’autre tâche que d’exécuter ce que les tuteurs auront décidé par rapport à ces requêtes US, que les réponses soient positives ou négatives. On en saura plus sur ce point, sans doute, après la visite de Powell à Damas. Ensuite, le gouvernement libanais partirait. On garderait quand même, dans une éventuelle nouvelle mouture, des ministres qui ont été choisis en fonction du traitement du dossier régional et de la fameuse « feuille de route » dont le Liban officiel n’a pas encore reçu copie. Fins connaisseurs de la scène locale, des diplomates occidentaux estiment, de leur côté, que l’actuel cabinet a été formé en partie pour que nombre de présidentiables papillonnants, exclus ou inclus, se brûlent les ailes aux filaments incandescents d’un réverbère allumé trop tôt à dessein. En tout cas, ce n’est un secret pour personne que la quasi-totalité des ministres maronites sont cités dans les salons comme présidentiables. On peut de la sorte mentionner dans le désordre, sans préférence, Sleimane Frangié, Farès Boueiz, Khalil Hraoui, Jean Obeid et pourquoi pas, Jean-Louis Cardahi. En dehors du gouvernement, les noms les plus fréquemment évoqués sont ceux de Michel Eddé, Georges Frem, Robert Ghanem mais aussi, pourquoi pas, Boutros Harb ou Nassib Lahoud. Cependant, répétons-le, de l’avis des observateurs comme des émules concernés, l’on a particulièrement avantagé avant le grand départ Jean Obeid en lui confiant le palais Bustros. Mais il reste beaucoup de temps avant que le starter ne tire son coup de pistolet et que les coursiers ne s’élancent pour de bon sur la piste. Aux étoiles. Philippe ABI-AKL
Deux séances du nouveau gouvernement. Deux bombes lancées. Par des ministres maronites. Respectivement Khalil Hraoui et Sleimane Frangié. Indices largement suffisants aux yeux des professionnels du cru pour considérer que la course à la prochaine présidentielle, dans un an et demi, est déjà sur les rails. Et de la pire des manières, dans un climat d’empoignades. Hraoui a...