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Interview - Le patriarche syrien-catholique évoque la situation des Irakiens « qui vivent dans la souffrance depuis 1980 » Mgr Abdel Ahad : Prier pour une paix basée sur la justice et les droits de l’homme en Irak(photo)

Être proche des syriens-catholiques d’Irak, quand la guerre est sur le point d’éclater. C’est ce qu’a décidé de faire le patriarche de la communauté, Mgr Ignace VIII Abdel Ahad, rentré jeudi dernier de sa première visite pastorale en Irak. Il a passé dix jours entre Bassora, Bagdad et Mossoul, sans avoir eu le temps de remonter plus au nord, vers Kirkouk, une ville qui abrite également une communauté syrienne-catholique. Dans une interview à L’Orient-Le Jour, Mgr Abdel Ahad appelle à « prier pour la paix en Irak ». Pour lui, cette paix devrait être « basée sur la justice, les droits de l’homme, sur la mise sur pied d’un gouvernement autochtone, irakien et la préservation des richesses du pays qui devraient être utilisées pour le développement de l’Irak ». Mgr Abdel Ahad relève que les syriens-catholiques d’Irak « vivent dans la souffrance depuis 1980 », année qui a marqué le début de la première guerre du Golfe entre l’Irak et l’Iran. Il évoque « les souffrances » incessantes depuis des dizaines d’années et rapporte que les fidèles qui se trouvent en Irak ne veulent pas que « le pays soit dominé par des forces étrangères », refusant cependant de donner de plus amples précisions sur ce point. L’Irak compte une minorité chrétienne d’un million d’habitants. Cent mille appartiennent à la communauté syrienne-catholique, qui vit principalement dans les villes, notamment à Bagdad, à Bassora et à Mossoul, et dans certaines zones de la montagne au nord du pays. Au cours de sa visite en Irak, Mgr Abdel Ahad a été favorablement impressionné par l’accueil qui lui a été réservé et surtout par « la ferveur des fidèles qui ont préservé les vieilles traditions de l’Église et qui parlent jusqu’à présent l’araméen, ainsi que par cette Église qui prie et qui souffre d’un mal qui lui vient de l’extérieur ». Et cette souffrance n’a « pas commencé le 20 mars cette année ; elle dure depuis 1980 », indique-t-il, soulignant que « malgré les guerres vécues, l’embargo imposé à l’issue de la guerre du Golfe en 1991, la volonté et la force du peuple irakien, qui est un peuple très fier, très patriotique et attaché à sa terre, n’a pas été brisée ». Solidaires de leurs compatriotes Certes, les diverses guerres et l’embargo ont appauvri l’Irak. Mgr Abdel Ahad se souvient des bienfaiteurs irakiens de la communauté qui donnaient beaucoup à l’Église syrienne-catholique. Ils deviennent de plus en plus rares. Et quand il a lui-même décidé de partir pour l’Irak, il a distribué au nom de l’Église « des aides dans la mesure du possible », relève-t-il, ajoutant que depuis l’embargo, « les Églises chrétiennes d’Irak reçoivent également des aides humanitaires de l’étranger, notamment des Églises occidentales ». Plongé dans ses pensées, il indique encore : « Notre Église en Irak est une Église qui s’incline mais qui ne se brise pas. » Mgr Abdel Ahad revient encore sur ce blocus « qui dure depuis des années et qui pousse beaucoup de jeunes très instruits à quitter le pays, à chercher un travail à l’étranger ». Justement est-ce que les chrétiens d’Irak en général et les syriens-catholiques en particulier sont touchés plus que les autres par l’émigration ? « Non, pas spécialement. Le phénomène touche tous les Irakiens. Et puis, l’Église fait en sorte de les garder sur place. Elle n’encourage pas les fidèles à l’émigration. » Et le patriarche syrien-catholique de poursuivre : « Les chrétiens d’Irak sont avant tout solidaires de leurs compatriotes musulmans. Comme tous les Irakiens, fiers et attachés à la terre, ils défendront leur pays », indique Mgr Abdel Ahad. Et de poursuivre : « Chrétiens et musulmans sont tous touchés par la même guerre, menacés par les mêmes obus, ils font face au même danger. Et ceux qui habitent les grandes villes craignent les guérillas urbaines surtout ». « Quand j’ai quitté l’Irak le 20 mars, la communauté chrétienne, tout comme les autres Irakiens, n’avait pas peur, elle était tout juste inquiète pour son avenir, après les menaces lancées par les grandes puissances », poursuit-il. Et d’ajouter que « les Irakiens ne considèrent pas les forces étrangères comme des forces de libération mais de colonisation et ils estiment que ceux qui viennent maintenant chez eux n’ont pas pour but de défendre les droits de l’homme ». « Les Irakiens sont nationalistes, sensibles et hostiles à tous ceux qui veulent voler leurs richesses, leur pays. Jusqu’à présent, quand on visite leurs musées, ils vous parlent des pièces perdues, volées il y a plus d’un siècle par l’empire ottoman ou transportées au XXe siècle vers l’Occident », raconte-t-il. Mgr Abdel Ahad lance encore un appel : « Il faut prier pour la paix en Irak, une paix basée sur la justice et les droits de l’homme, une paix basée sur un gouvernement autochtone irakien, une paix basée sur le fait que les richesses du pays soient entre les mains des Irakiens et soient utilisées pour le développement du pays ». Pour son retour d’Irak, le patriarche syrien-catholique est rentré au Liban, via la frontière syrienne. Il devait prendre l’avion à partir de l’aéroport d’Amman, mais le déclenchement de l’offensive a cloué au sol quelques vols vers Beyrouth. À part la ferveur et la foi des fidèles de sa communauté, qu’est-ce qui l’a le plus marqué en Irak ? « L’abri de Amiriya à Bagdad, où 400 personnes ont péri au cours des bombardements alliés de Bagdad en 1991. Les traces de leurs corps ont imprégné les murs et l’on peut distinguer jusqu’à présent les mains des enfants et les silhouettes des femmes », souligne-t-il en conclusion. Patricia KHODERÊtre proche des syriens-catholiques d’Irak, quand la guerre est sur le point d’éclater. C’est ce qu’a décidé de faire le patriarche de la communauté, Mgr Ignace VIII Abdel Ahad, rentré jeudi dernier de sa première visite pastorale en Irak. Il a passé dix jours entre Bassora, Bagdad et Mossoul, sans avoir eu le temps de remonter plus au nord, vers Kirkouk, une ville qui abrite également une communauté syrienne-catholique. Dans une interview à L’Orient-Le Jour, Mgr Abdel Ahad appelle à « prier pour la paix en Irak ». Pour lui, cette paix devrait être « basée sur la justice, les droits de l’homme, sur la mise sur pied d’un gouvernement autochtone, irakien et la préservation des richesses du pays qui devraient être utilisées pour le développement de l’Irak ». Mgr Abdel Ahad relève que les syriens-catholiques d’Irak « vivent dans la souffrance depuis 1980 », année qui a marqué le début de la première guerre du Golfe entre l’Irak et l’Iran. Il évoque « les souffrances » incessantes depuis des dizaines d’années et rapporte que les fidèles qui se trouvent en Irak ne veulent pas que « le pays soit dominé par des forces étrangères », refusant cependant de donner de plus amples précisions sur ce point. L’Irak compte une minorité chrétienne d’un million d’habitants. Cent mille appartiennent à la communauté syrienne-catholique, qui vit principalement dans les villes, notamment à Bagdad, à Bassora et à Mossoul, et dans certaines zones de la montagne au nord du pays. Au cours de sa visite en Irak, Mgr Abdel Ahad a été favorablement impressionné par l’accueil qui lui a été réservé et surtout par « la ferveur des fidèles qui ont préservé les vieilles traditions de l’Église et qui parlent jusqu’à présent l’araméen, ainsi que par cette Église qui prie et qui souffre d’un mal qui lui vient de l’extérieur ». Et cette souffrance n’a « pas commencé le 20 mars cette année ; elle dure depuis 1980 », indique-t-il, soulignant que « malgré les guerres vécues, l’embargo imposé à l’issue de la guerre du Golfe en 1991, la volonté et la force du peuple irakien, qui est un peuple très fier, très patriotique et attaché à sa terre, n’a pas été brisée ». Solidaires de leurs compatriotes Certes, les diverses guerres et l’embargo ont appauvri l’Irak. Mgr Abdel Ahad se souvient des bienfaiteurs irakiens de la communauté qui donnaient beaucoup à l’Église syrienne-catholique. Ils deviennent de plus en plus rares. Et quand il a lui-même décidé de partir pour l’Irak, il a distribué au nom de l’Église « des aides dans la mesure du possible », relève-t-il, ajoutant que depuis l’embargo, « les Églises chrétiennes d’Irak reçoivent également des aides humanitaires de l’étranger, notamment des Églises occidentales ». Plongé dans ses pensées, il indique encore : « Notre Église en Irak est une Église qui s’incline mais qui ne se brise pas. » Mgr Abdel Ahad revient encore sur ce blocus « qui dure depuis des années et qui pousse beaucoup de jeunes très instruits à quitter le pays, à chercher un travail à l’étranger ». Justement est-ce que les chrétiens d’Irak en général et les syriens-catholiques en particulier sont touchés plus que les autres par l’émigration ? « Non, pas spécialement. Le phénomène touche tous les Irakiens. Et puis, l’Église fait en sorte de les garder sur place. Elle n’encourage pas les fidèles à l’émigration. » Et le patriarche syrien-catholique de poursuivre : « Les chrétiens d’Irak sont avant tout solidaires de leurs compatriotes musulmans. Comme tous les Irakiens, fiers et attachés à la terre, ils défendront leur pays », indique Mgr Abdel Ahad. Et de poursuivre : « Chrétiens et musulmans sont tous touchés par la même guerre, menacés par les mêmes obus, ils font face au même danger. Et ceux qui habitent les grandes villes craignent les guérillas urbaines surtout ». « Quand j’ai quitté l’Irak le 20 mars, la communauté chrétienne, tout comme les autres Irakiens, n’avait pas peur, elle était tout juste inquiète pour son avenir, après les menaces lancées par les grandes puissances », poursuit-il. Et d’ajouter que « les Irakiens ne considèrent pas les forces étrangères comme des forces de libération mais de colonisation et ils estiment que ceux qui viennent maintenant chez eux n’ont pas pour but de défendre les droits de l’homme ». « Les Irakiens sont nationalistes, sensibles et hostiles à tous ceux qui veulent voler leurs richesses, leur pays. Jusqu’à présent, quand on visite leurs musées, ils vous parlent des pièces perdues, volées il y a plus d’un siècle par l’empire ottoman ou transportées au XXe siècle vers l’Occident », raconte-t-il. Mgr Abdel Ahad lance encore un appel : « Il faut prier pour la paix en Irak, une paix basée sur la justice et les droits de l’homme, une paix basée sur un gouvernement autochtone irakien, une paix basée sur le fait que les richesses du pays soient entre les mains des Irakiens et soient utilisées pour le développement du pays ». Pour son retour d’Irak, le patriarche syrien-catholique est rentré au Liban, via la frontière syrienne. Il devait prendre l’avion à partir de l’aéroport d’Amman, mais le déclenchement de l’offensive a cloué au sol quelques vols vers Beyrouth. À part la ferveur et la foi des fidèles de sa communauté, qu’est-ce qui l’a le plus marqué en Irak ? « L’abri de Amiriya à Bagdad, où 400 personnes ont péri au cours des bombardements alliés de Bagdad en 1991. Les traces de leurs corps ont imprégné les murs et l’on peut distinguer jusqu’à présent les mains des enfants et les silhouettes des femmes », souligne-t-il en conclusion. Patricia KHODER
Être proche des syriens-catholiques d’Irak, quand la guerre est sur le point d’éclater. C’est ce qu’a décidé de faire le patriarche de la communauté, Mgr Ignace VIII Abdel Ahad, rentré jeudi dernier de sa première visite pastorale en Irak. Il a passé dix jours entre Bassora, Bagdad et Mossoul, sans avoir eu le temps de remonter plus au nord, vers Kirkouk, une ville qui...