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Femmes - Yasmina Traboulsi : Appelez-moi Yas(photo)

On aurait pu dire d’elle, on l’a certainement murmuré, que « c’est la fille à papa qui s’amuse à jouer à l’écrivain ». Ce serait bien méconnaître Yasmina Samir Traboulsi… Elle a quelque chose de Sissi l’impératrice, la beauté, le port de tête ou encore cette manière presque théâtrale qu ’elle a de faire son entrée, de s’installer et de prendre possession d’un lieu et des regards présents. C’est aussi la simplicité avec laquelle elle se met à parler qui surprend, ses grands yeux, ses grandes mains pâles et cet accent qui mêle la musique du Brésil, les mots de l’Europe et le charme de l’Orient. C’est enfin cette lucidité qu’elle a développée à l’école, comme un bouclier contre les mauvaises surprises et qui faisait déjà dire à ses professeurs : « La jeune Yasmina possède un esprit trop analytique, trop synthétique. » « J’appartiens à une famille publique, ça m’exaspère et ça m’amuse en même temps. J’entends souvent, “c’est la fille de… alors, elle doit être comme ça…” Je ne fais rien pour les dissuader, ça ne vaut pas la peine. » Yasmina Traboulsi a préféré vivre loin des projecteurs d’une vie mondaine qui ne l’interpelle pas, entreprendre ses voyages autour du monde qui deviennent au retour des voyages intérieurs, faire des rencontres qui l’inspirent et trouver enfin sa voie. De la France où elle est née et a longtemps vécu, à Londres où elle réside actuellement, les escales – de cœur – obligatoires demeurent le Brésil où elle retrouve la famille de sa mère et ses propres repères, et puis le Liban. « Je me sens à la fois Brésilienne et Libanaise, ça dépend d’où je me trouve. Oui, je parle arabe, nous dit-elle, en arabe dans le texte. Je suis fascinée par la littérature orientale. » Et ce qu’elle aime dans ces deux extrêmes du monde, c’est en fait leur ressemblance, « des terres de contrastes, la chaleur humaine, les gens fascinants. » Pour le Brésil, elle ajoute : « Les gens sont pudiques avec le malheur. J’aime leur côté mélancolique et nonchalant en même temps que leur grande intelligence. Il ne faut pas oublier que de là sont issus les plus grandes écoles psychanalitiques, les sportifs, les écrivains et les musiciens célèbres. » Jeune écrivain francophone Yasmina aurait pu, c’est évident, être mannequin, mais aux défilés de mode elle a préféré les cours de justice et notamment celle des communautés européennes où, installée au Luxembourg durant une année, elle s’est occupée de droit de la concurrence. « Puis j’ai tout lâché pour l’écriture. » Elle poursuit : « C’est en rentrant d’un voyage au Brésil que je me suis demandée, qu’est-ce que je fais là ? J’ai commencé à écrire Maria Aparecida à Paris, pour soulager mon manque du Brésil. » À la recherche de Maria, les personnages croisés évoquent dans leur simplicité et leur misère le visage et l’âme du Brésil, et surtout le regard tendre et passionné que porte Yasmina sur cette terre d’adoption. Une amie propose à son insu la nouvelle au concours des jeunes écrivains francophones. Conditions requises : avoir entre 17 et 27 ans et conserver l’anonymat au moment du concours. 1234 textes, 14 finalistes et Yasmina qui remporte le premier prix au palmarès. Elle garde cependant la tête froide. « J’ai été très touchée mais je ne suis pas quelqu’un qui recherche les honneurs et puis, il faut tenir la longueur. » Alors, pour poursuivre l’aventure, elle poursuit ses voyages dans les mots et dans les rencontres. « Mon prochain roman contient quatre nouvelles. » Pour les écrire, elle se plonge dans les ambiances, va jusqu’à visiter des prisons, traîne dans les rues pour saisir des images et des personnages que l’on retrouve d’ailleurs dans Maria Aparecida. Folle d’Afrique, elle entame l’écriture d’un roman qui commence à Damas pour finir à cet autre bout du monde. « Pendant un an, j’ai lu trois à quatre journaux africains par jour. Leur vocabulaire est fascinant. Je veux aller voir. » Et de poursuivre : « Je crois aussi que je vais revenir à Beyrouth et me plonger dans le cœur de la ville et ses quartiers populaires. À la limite, j’aimerais y habiter un moment. Ça me repousserait beaucoup plus d’aller dans un gala mondain. Ce qui m’intéresse, c’est l’humain. » Ses professeurs avaient bien raison. Yas, car elle préfère qu’on l’appelle Yas, le confirme: « Je sens beaucoup les choses, je vais droit à l’essentiel. Je suis très claire dans ma tête. » Alors, lorsqu’on lui demande ce qu’elle veut de la vie, elle répond : « Je sais surtout ce que je ne veux pas. » Carla HENOUD
On aurait pu dire d’elle, on l’a certainement murmuré, que « c’est la fille à papa qui s’amuse à jouer à l’écrivain ». Ce serait bien méconnaître Yasmina Samir Traboulsi… Elle a quelque chose de Sissi l’impératrice, la beauté, le port de tête ou encore cette manière presque théâtrale qu ’elle a de faire son entrée, de s’installer et de prendre possession d’un...