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Actualités - CHRONOLOGIE

Palestiniens - Les jets de pierres continuent à la frontière Les obsèques des deux jeunes tués samedi tournent à la manifestation (photos)

Limiter les dégâts sur l’environnement, faire payer les pollueurs, privilégier des énergies non polluantes et tirer profit de l’eau, un dossier largement négligé au Liban, malgré son importance... telles sont les principales recommandations de M. Nicolas Chammas, économiste. Interrogé par L’Orient-Le Jour sur un éventuel coût de la dégradation écologique, M. Chammas évoque quelques chiffres significatifs : «En Europe, les coûts externes rattachés à l’environnement (embouteillages, dégradation des sols...) représentent environ 2 % du PIB. La facture devrait être beaucoup plus lourde au Liban, vu les divers types de pollution qu’on observe sur le territoire : quelque 80 % des nappes phréatiques sont polluées, plus de 35 mille puits artésiens serviraient d’égouts, les forêts sont passées de 18 % à 7 % du territoire en moins de vingt ans...». M. Chammas a consacré un chapitre de son ouvrage L’Avenir socio-économique du Liban en questions : éléments de réponse, à l’intérêt économique de la préservation de l’environnement et des ressources naturelles. Il s’y indigne du peu de cas que les Libanais font de la richesse naturelle de leur pays. «Peu de peuples se seront, en définitive, acharnés contre leur environnement autant que ne le fit le peuple libanais durant la seconde moitié du vingtième siècle», écrit-il. «À y regarder de plus près, cette autodestruction est injustifiable, même sur le plan économique, et l’expérience d’autres pays montre, sans conteste possible, que toute atteinte à l’environnement finit par coûter à la collectivité plus cher qu’elle ne lui rapporte». Sensibilisation, réhabilitation et répression, les trois axes qui, selon lui, devront déterminer une politique environnementale au Liban. Il affirme qu’on pourrait limiter les dégâts à travers des politiques d’éveil menées à bien par des enseignants, des éducateurs ou des personnes en contact avec l’environnement, à travers la prévention (arrêter la destruction, un rôle essentiel des ONG), et à travers la réhabilitation des sites endommagés, qui devrait être financée par des amendes payées par les pollueurs. Mais il faudrait, pour cela, une décision politique, et je ne pense pas qu’elle existe au Liban, il y a trop d’intérêts en jeu», remarque M. Chammas. «Prenons, par exemple, le dossier des déchets toxiques, ouvert depuis 1995 et toujours pas tranché. Or, selon la loi, les crimes contre la nature sont passibles de prison ! Il faudrait que ces questions soient examinées sous les angles économique et pénal». L’eau, une richesse inexploitée Il rappelle que la dégradation écologique occasionne aussi des coûts indirects : l’impact de la pollution sur la santé par exemple, la facture sanitaire s’élevant à plus d’un milliard de dollars. Mais aussi sur le tourisme, touché de plein fouet par la perte de l’atout écologique. «Le Liban devient un véritable dépotoir, il n’est plus attirant, d’ailleurs le secteur touristique ne contribue plus qu’à 8 % du PIB», fait-il remarquer. Enfin, il souligne que ces charges pèsent surtout sur le contribuable puisque l’État se trouve obligé de compenser ses pertes en se dirigeant vers d’autres sources de revenus : impôts ou dettes. M. Chammas insiste sur deux questions primordiales selon lui : l’utilisation progressive d’énergies propres comme l’énergie solaire, et une meilleure exploitation des ressources hydrauliques. «Ces dernières pourraient avoir des retombées substantielles sur la richesse du pays», dit-il. «Mais, malheureusement, les chiffres fournis par les experts ne concordent pas et nous n’obtenons pas de données précises sur ces ressources». Il rappelle que notre richesse hydraulique est objet de convoitise dans la région, notamment de la part d’Israël, d’autant plus qu’une bonne partie de notre eau est gaspillée. Selon des estimations, 15 à 20 % seulement des 300 mille hectares cultivés au Liban sont actuellement irrigués. M. Chammas fait valoir dans son livre que «les projets importants ne manquent pas (comme la consécration des eaux du Litani à l’irrigation par exemple) et que, vu la rareté des ressources, il faudra impérativement effectuer des arbitrages». Cette tâche devrait être confiée à un seul organisme spécialisé qui «sera également en mesure de déterminer si d’éventuels excédents subsisteront une fois que tous les secteurs et régions auront reçu leur lot. Le cas échéant, il pourrait proposer au Conseil des ministres divers débouchés possibles pour ce surplus : exportation vers le Golfe, en bouteilles ou, comme l’a récemment suggéré un expert, à travers un pipeline...». Pour les autres secteurs reliés à l’environnement, il faudra, selon l’économiste, chiffrer les dégâts, les investissements pour la réhabilitation des sites n’étant pas très lourds. D’ailleurs, à la longue, de tels secteurs peuvent produire des emplois : en France, en 1997, le gouvernement socialiste s’était proposé de créer 700 mille emplois, dont 350 mille dans de tels domaines ! En Europe, la contribution des secteurs liés à l’environnement tourne autour de 5 % du PIB, les bénéfices dépassant donc de loin d’éventuelles pertes. Mais la décision politique d’emprunter cette voie reste indispensable, insiste M. Chammas. «Je compte sur l’apport des jeunes et les appelle à former des partis politiques», dit-il. Ses recommandations ? Faire payer les pollueurs (et renflouer les caisses de l’État, ce qui ne gâte rien), donner davantage de moyens aux municipalités, sensibiliser les agriculteurs sur l’importance de l’environnement, montrer celui-ci sous un jour rentable, prouver que la sauvegarde de la nature revêt un intérêt réel...
Limiter les dégâts sur l’environnement, faire payer les pollueurs, privilégier des énergies non polluantes et tirer profit de l’eau, un dossier largement négligé au Liban, malgré son importance... telles sont les principales recommandations de M. Nicolas Chammas, économiste. Interrogé par L’Orient-Le Jour sur un éventuel coût de la dégradation écologique, M. Chammas...