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Actualités - REPORTAGES

Otages - Marie Moarbès ce matin à Tripoli Les dernières heures avant les retrouvailles(photo)

Après le rendez-vous manqué de la semaine dernière, Sarouat Moarbès n’arrive plus à croire qu’elle verra sa fille Marie au plus tard dans quelques heures. Pourtant, cette fois, les préparatifs libyens sont concluants, quoique discrets. Le ministre d’État français à la Coopération Charles Josselin ainsi que ses homologues allemands et sud-africains sont déjà sur place et s’apprêtent à recevoir, en même temps que le ministre libanais Sleimane Traboulsi, les six otages libérés par le groupe Abu Sayyaf. Pour les autorités libyennes, ce sera l’occasion d’organiser une fastueuse cérémonie qui marquera le retour véritable de la Libye sur la scène internationale. Il fait plus de 40 degrés à l’ombre, mais Mme Sarouat Moarbès s’en soucie peu. Pour elle, Tripoli restera le lieu de ses retrouvailles avec sa fille détenue 126 jours durant à Jolo. Elle était déjà venue en Libye le 15 août lorsqu’on lui avait promis la libération de sa fille et était repartie bredouille au bout d’une semaine. Cette fois, elle a un peu hésité avant de reprendre l’avion. Lorsque l’ambassadeur libyen à Beyrouth l’a contactée dimanche pour lui annoncer la bonne nouvelle, elle s’est confondue en remerciements, avec toutefois une pointe de scepticisme. Ce n’est que lorsqu’elle a vu, à la télévision, sa fille descendre de l’hélicoptère, son père collé à elle, qu’elle a enfin respiré. Dès lors, tout a été très vite et dans son domicile à Adma, le téléphone n’a plus cessé de sonner : les amis, les proches, mais aussi les officiels libanais, tout le monde voulait partager sa joie. Mais le plus important pour elle était d’entendre la voix de Marie. Elle s’est mise à appeler frénétiquement le portable de son mari. Et finalement, ce fut la voix chérie à l’autre bout du fil : «La ligne était mauvaise, raconte Sarouat. Mais c’était bien elle». Depuis, elle n’attend plus que l’instant où elle la serrera dans ses bras. Et c’est avec une simplicité touchante que cette mère qui a vécu l’enfer déclare : «Je veux essayer de me contrôler, d’être forte, comme elle l’a été». Ces retrouvailles, Sarouat ne cesse pas de les imaginer, de les vivre, n’osant trop croire à son bonheur. Les quatre derniers mois ne seront pas faciles à oublier : l’espoir, la crainte, l’angoisse, les rumeurs… Que d’émotions, que de douleur… Le père de Marie, Michel Moarbès, a lui aussi vécu l’enfer dans son luxueux hôtel, à Manille. Selon Joe Béchara – un homme d’affaires libanais installé depuis 21 ans aux Philippines et qui est resté auprès du père tout au long de cette terrible épreuve –, Michel Moarbès a souvent frôlé le désespoir. Béchara, qui a quitté les Philippines samedi dernier, est venu avec la délégation officielle libanaise à Tripoli pour accueillir Marie et son père. Depuis ces 4 mois, il se sent un peu de la famille. À la fin du mois d’avril, l’avocat Issam Aridi l’avait contacté pour lui parler du cas de Marie Moarbès. Il s’enquiert aussitôt de l’adresse du père de Marie par le biais du consul honoraire du Liban à Manille, Fouad Assaad (fils de l’ancienne députée Maha Khoury Assaad). Croyant qu’il s’agissait d’une simple question de rançon, il propose au père de l’argent. Mais l’affaire s’avère plus compliquée. Béchara étant lié au consul syrien à Manille Issam Debs, il l’informe de la situation et ensemble, ils essaient de voir ce qu’ils peuvent faire. Le groupe Abu Sayyaf et les Allemands ayant fait comprendre qu’ils souhaitaient une médiation, Debs met Béchara en contact avec le bras droit de Seif al-Islam Kadhafi, Mohammed Ismaïl. Ce dernier constitue une cellule de travail avec Hussein Halala (consul de Libye à Manille), le Dr Rajab Azzarouk et le Dr Farouk Hassan, choisi comme intermédiaire par le gouvernement libyen. Pour la petite histoire, au cours d’une rencontre avec le commandant Robot (du groupe Abu Sayyaf), Mohammed Ismaïl lui offre sa montre. La France, l’Allemagne, la Finlande et l’Afrique du Sud ayant officiellement demandé une médiation libyenne, Béchara contacte le consul du Liban à Tokyo (l’ambassadeur étant absent à ce moment-là) pour qu’il fasse de même. Selon M. Béchara, ce dernier aurait alors confié à la presse que la Libye s’apprêtait à payer une rançon de 25 millions de dollars, provoquant la colère des Libyens. Ravis de la nouvelle, les ravisseurs contactent à leur tour les familles des otages pour leur proposer la libération de leurs proches moyennant de portes sommes d’argent. La rumeur réveille ainsi des appétits insoupçonnés. Le commandant Robot aurait ainsi, selon M. Béchara, appelé Michel Moarbès dans le même but. La «cellule de médiation» s’empresse de démentir l’information et des contacts sont entrepris avec l’ambassadeur du Liban au Japon pour réparer l’impair. Il faudra beaucoup de patience pour convaincre les 5 chefs du groupe Abu Sayyaf de modérer leurs exigences... Finalement, un premier accord est conclu et prévoit la libération de 9 otages. Le gouvernement philippin, manipulé pour les Américains selon les Libyens, le fera échouer. Nouvelle accord le 15 août et nouvel échec, les ravisseurs voulant libérer d’abord deux otages pour éviter un assaut contre leurs positions. Les médiateurs ne pouvant accepter de choisir deux otages alors qu’ils auraient pu en avoir 9, l’accord échoue une nouvelle fois. Dimanche, cinq ont été libérés et ils sont devenus six hier. À Tripoli, tout le monde est confiant quant à une libération d’ici à un mois de tous les otages. Est-ce la joie de Sarouat Moarbès accompagnée cette fois de sa sœur Medhat et de son frère Samir ? Dans la capitale libyenne, aujourd’hui, l’espoir est contagieux.
Après le rendez-vous manqué de la semaine dernière, Sarouat Moarbès n’arrive plus à croire qu’elle verra sa fille Marie au plus tard dans quelques heures. Pourtant, cette fois, les préparatifs libyens sont concluants, quoique discrets. Le ministre d’État français à la Coopération Charles Josselin ainsi que ses homologues allemands et sud-africains sont déjà sur place...