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Actualités - INTERVIEWS

Interview - L'ex-colistier de Frangié, Mikati et Harb (Nord 2) explique son retrait à l'Orient Le Jour Misbah el-Ahdab sacrifié et consentant (photos)

Misbah el-Ahdab est extrêmement populaire. Et il le sait. C’est peut-être la raison pour laquelle il n’a pas hésité longtemps à renoncer à sa place sur la liste poids lourd de la seconde circonscription du Liban-Nord. Celle qui comprend, par exemple, les ministres Négib Mikati et Sleiman Frangié, les députés Ahmed Karamé, Maurice Fadel, Boutros Harb, Estéphan Doueihy, ou le richissime homme d’affaires Mohammed Safadi. Misbah el-Ahdab est extrêmement populaire, son domicile, hier, c’est-à-dire au lendemain de son retrait de la liste, des rumeurs, des déclarations et des démentis – son domicile n’a pas désempli. De partisans, d’hommes de confiance, d’hommes de main, et de «groupies». Misbah el-Ahdab, c’est un peu comme une rock-star à la mode, et en concert perpétuel, une fois tous les quatre ans notamment, et les fans, les femmes, qui réagissent au quart de tour, «lui qui n’a jamais leurré quiconque, voilà qu’ils le trahissent, qu’ils le trompent, mais ça ne se passera pas comme ça, il triomphera, seul et contre tous». Cela s’appelle de le détermination... Sauf que Misbah el-Ahdab est un homme politique qui a pris l’habitude de défendre ses idées – dans tous les cas, lui, un des plus jeunes députés au Parlement actuel, il essaie. D’après son ancien colistier, le ministre de l’Agriculture Sleiman Frangié, M. Ahdab aurait demandé «trois cent cinquante mille dollars pour se joindre à la liste, une condition que les candidats ont unanimement refusée». La réponse du député de Tripoli à L’Orient-Le Jour a été claire, nette et sans bavure(s). «C’est un jeu qui se préparait d’un commun accord avec les 16 autres colistiers, et depuis un mois, je pressentais ce qui allait arriver, que les rumeurs pouvaient se confirmer». Quelles rumeurs ? «Les membres de la liste à laquelle je devais appartenir sont persuadés qu’Omar Karamé va percer cette liste, alors ils ont décidé de m’exclure de la machine électorale, de me sacrifier». Question d’économie sans doute. Ce qu’il faut savoir, c’est que la machine électorale a été divisée en deux. Mohammed Safadi, Ahmed Karamé, Mohammed Kabbara et Ahmed Hbous d’une part, Négib Mikati, Maurice Fadel, Jean Obeid et Misbah el-Ahdab de l’autre. «Le problème est que MM. Mikati, Fadel et Obeid n’ont que quelques délégués pouvant être présents aux urnes le jour des élections, tandis que ma machine, elle, est assez consistante, cela fait plus de six ans que je travaille sur Tripoli : il n’y a eu aucune réunion de comités pour la coordination entre ces deux groupes, ils ne m’ont fait que des promesses». Misbah el-Ahdab, à l’entendre, ne demandait qu’une chose : des scrutateurs présents aux urnes le 27 août, donc «une participation claire dans une machine électorale regroupée, unie, et dont les dépenses seraient couvertes par la liste – une volonté que partageait à l’époque Ahmed Karamé». Et cette histoire de trois cent cinquante mille dollars ? Manquait-il à ce point d’argent ? «Mais allons donc ! Ce qui s’est fait, c’est que l’on m’a proposé deux cents mille dollars, cent mille de Maurice Fadel et cent mille de Négib Mikati, et c’était à moi de me débrouiller avec, de payer mes scrutateurs». Alors pourquoi avoir refusé ? Question de principe ? «Évidemment, mais pas seulement de principe, c’est un problème technique aussi, et puis à ce niveau-là, le “jeu” devenait limpide : on voulait me sacrifier». Il n’y a que ça ? «On dit que Boutros Harb a mené une campagne interne contre ma présence au sein de cette liste…». Apparemment, le «sacrifice» a bien eu lieu, et Misbah el-Ahdab n’a pas l’air particulièrement malheureux, ou vindicatif, «je n’en veux à personne en particulier, c’est une décision collective, sans aucun doute». Un sacrifice, certes, mais dont la «victime» est consentante. Et s’ils changeaient d’avis ? «Même dans ce cas, je refuserai, il est trop tard maintenant». Et pourquoi pas une participation à la liste opposée, celle comprenant, entre autres, Omar Karamé ou Nayla Moawad ? «Je ne peux pas concevoir le fait que M. Omar Karamé veuille, à lui seul, représenter Tripoli, et indépendamment de cela, je ne peux absolument pas m’entendre avec la Jamaa islamiya présente sur cette liste». Et qu’en a pensé Rafic Hariri, avec qui Misbah el-Ahdab entretient depuis longtemps une étroite amitié – il refuse le mot «mentor» ? «Il m’a téléphoné pour me demander de réintégrer la liste, mais j’ai refusé». Cela s’appelle de la détermination… Garde-t-il l’espoir, maintenant qu’il se présente seul, de pouvoir percer les listes en présence ? «Je suis un battant, j’ai toujours aimé les challenges, plus c’est dur, plus c’est difficile, plus j’aime». Dont acte... Nous avons par ailleurs interrogé M. Ahdab sur la réconciliation nationale, cette incontournable étape dont tout le monde parle et dont on ne voit jamais la moindre application. La réponse du député de Tripoli est sans appel : «La réconciliation nationale passe par la création d’institutions, par le dépoussiérage de l’Administration. Il faut commencer par prendre trois chrétiens et trois musulmans, en choisissant les six meilleurs évidemment, en fonction de leurs qualités et non de leur appartenance à quelque parti que ce soit. Ensuite, les gens accepteront un jour que l’on choisisse les six meilleurs, quelle que soit leur confession». Quant à la redéfinition des relations libano-syriennes, «sur le principe, le retrait doit se faire, mais il faut trouver la formule», Misbah el-Ahdab est définitivement pour, il précise même que c’est «par intérêt pour le Liban, et uniquement pour le Liban, que nous devons entretenir de bonnes relations avec la Syrie, et non pour des considérations clientélistes et personnelles». Bref, en résumé, en conclusion, on ne peut que revenir sur la popularité de ce candidat qui désormais enfourche en solitaire son cheval de bataille. Et une évidence : si M. Ahdab arrive à renouveler de quatre ans son mandat au Parlement uniquement grâce à cette ferveur populaire dont il est l’objet, ce sera quelques pas en avant de plus pour la démocratie. Et un joli pied de nez aux mastodontes électoraux.
Misbah el-Ahdab est extrêmement populaire. Et il le sait. C’est peut-être la raison pour laquelle il n’a pas hésité longtemps à renoncer à sa place sur la liste poids lourd de la seconde circonscription du Liban-Nord. Celle qui comprend, par exemple, les ministres Négib Mikati et Sleiman Frangié, les députés Ahmed Karamé, Maurice Fadel, Boutros Harb, Estéphan Doueihy,...