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Actualités - OPINION

Attaché à son Liban

Nous étions ensemble au collège et nous racontions, en public, des histoires drôles. En été, nous étions souvent en relation, dans la même campagne de Sofar. Il était dans une belle maison dont son père, Émile Eddé, était propriétaire, tandis que je logeais, pour de courtes vacances, chez des parents. Son père était déjà un grand avocat prestigieux alors que j’étais un simple étudiant. Je le revis au collège dans des classes différentes. Ses récits provoquaient les rires de toute l’assistance. Je me contentais de mes récits sérieux. quelque temps plus tard, Raymond Eddé pris l’initiative de faire instaurer le «secret bancaire». J’y adhérais alors que de grands magistrats comme Chucri Cardahi, estimaient qu’il y avait vraiment trop de textes législatifs dans notre Code. En 1958, il était déjà ministre de l’Intérieur, des Affaires sociales et des Télécommunications, dans un gouvernement de 4 membres dont Rachid Karamé présidait le Cabinet, les deux autres ministres étant Hussein el-Oueini et Pierre Gemayel. C’est à cette époque que Raymond Eddé faisait paraître la loi qui supprimait les «circonstances atténuantes». Le juge, pensait-il, devrait condamner tout coupable sans rémission et l’inculpé devait subir la peine de mort. Raymond Eddé allait jusqu’à assister à l’exécution du coupable. Telle avait été la tragédie de «Takmil». Sous mon mandat, en 1968, un autre Cabinet fut composé de MM. Abdallah Yafi, Hussein el-Oueini, Pierre Gemayel et Raymond Eddé qui était ministre des Travaux publics, des Affaires hydrauliques et Électriques et du Plan. C’est sous ce gouvernement que l’aéroport libanais subit l’attaque israélienne et que le gouvernement se décomposa. Je revis Raymond Eddé pour lui proposer un autre gouvernement. Il refusa. Puis arriva l’affaire de l’Accord du Caire que Raymond Eddé condamna dans un discours virulent alors que ce même accord était condamné aussi pour la raison que les deux meilleurs magistrats de la République déclarèrent ne pas le reconnaître, pour diverses raisons dont la première est que le président de la République ne le signait pas. Ce qui rendait nul cet accord. Un attentat fut organisé contre Raymond Eddé, ce qui le conduisit à se rendre à Paris où il termina ses jours. L’homme était inchangeable. Je le savais ainsi et c’est à la suite d’un accident dans sa salle de bains, à 87 ans, qu’il entra dans l’éternité. Aujourd’hui, je continue à regretter cet ancien ami en pensant qu’il était attaché à son Liban, attaché à sa défense et attaché à ce qu’il considérait ses vérités. De toute mon âme, j’aurais souhaité être près de lui au moment de cet accident.
Nous étions ensemble au collège et nous racontions, en public, des histoires drôles. En été, nous étions souvent en relation, dans la même campagne de Sofar. Il était dans une belle maison dont son père, Émile Eddé, était propriétaire, tandis que je logeais, pour de courtes vacances, chez des parents. Son père était déjà un grand avocat prestigieux alors que j’étais...