Une lutte vieille de 30 ans(photos)

La lutte antitabac a commencé aux États-Unis en 1954 (quand le taux de fumeurs dépassait encore les 50 %), mais elle est demeurée inefficace jusque vers 1964. Cette année-là, un rapport sur les dangers du tabac a été publié, constituant un tournant dans le domaine. Des politiques gouvernementales ont été alors adoptées. «C’est une combinaison de facteurs qui a suscité une baisse du taux de fumeurs», précise le Dr Lawrence Green, l’un des experts américains en visite au Liban. «Politiques, programmes et prix : les trois “P” comme nous les appelons». La hausse des taxes sur le tabac a été décidée, ainsi que les avertissements écrits sur les paquets de cigarettes. Ceux-ci sont-ils efficaces, les fumeurs ne les connaissent-ils pas ? «Si, mais il est toujours utile de les leur rappeler», estime-t-il. «De plus, nous restons fidèles au principe que nul produit nuisible ne doit être vendu sans avertissement». L’interdiction des publicités à la télévision et à la radio a constitué une autre étape importante. Mais c’est la réaction des fumeurs passifs à l’encontre de la découverte des risques qu’ils encouraient en parfaite ignorance qui a donné un coup de pouce aux campagnes antitabac. «Même les fumeurs sont devenus plus inquiets de l’impact qu’ils pouvaient causer sur les autres, notamment sur les enfants», fait remarquer le Dr Green. Quand donc les fumeurs libanais auront-ils la même réaction ? Aux États-Unis, les découvertes faites sur les dangers du tabac, combinées aux mesures restrictives, ont provoqué chez le public une attitude très critique envers les compagnies de tabac. «Celles-ci ont été accusées de cacher des preuves de la nuisance du tabac», raconte le Dr Green. «Certains consommateurs, s’estimant lésés, ont intenté des procès à ces entreprises. Le plus spectaculaire de ces procès a eu lieu à Minnesota, où une société a été obligée de dévoiler tous ses dossiers. Il est apparu effectivement que beaucoup d’informations avaient été celées au public». Mais est-ce à des compagnies privées de dévoiler de tels chiffres ? «Le ministère de la Santé et les milieux scientifiques avaient déjà admis et dévoilé les faits», dit-il. «Mais, tant que l’industrie ne l’avait pas clairement reconu, les gens se disaient qu’un produit qui se vendait aussi librement ne pouvait être nocif à ce point». Cela veut-il dire, selon lui, que si le public n’est pas convaincu, toutes les mesures resteront vaines ? «Non, mais si vous votez des lois sans l’éveil populaire nécessaire, elles ne seront pas suffisamment appliquées», répond le Dr Green.