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Actualités - ANALYSE

Vie politique - Un dialogue de sourds qui déroute les libanais Le malentendu s'aggrave entre politiciens et opinion publique

Pour le vulgum pecus, le débat budgétaire s’est résumé à un dialogue de sourds. Le Libanais moyen, peu versé dans les questions techniques, ne peut pas savoir qui a raison, le ministre des Finances ou ses contempteurs. Les chiffres assénés par les protagonistes de la pièce qui s’est jouée place de l’Étoile sont évidemment contradictoires et le téléspectateur s’y est perdu. Il a certes compris qu’il assistait à une joute bien plus politique que financière. Et c’est d’ailleurs là que le bât blesse. Car ce Libanais moyen voudrait bien qu’on lui explique en termes simples et clairs où il en est sur le plan économique, ce qu’il peut espérer pour entreprendre ou regretter pour renoncer. Les passes d’armes entre les camps respectifs de MM. Rafic Hariri et Sélim Hoss, entre l’opposition et le gouvernement n’offraient qu’un intérêt anecdotique aux yeux de l’opinion. Ce qui lui importe, c’est de savoir la vérité. Et la polémique permanente entre professionnels fait écran de fumée. Répétons-le, les gens sont désorientés, parfois même irrités par le fait qu’on ne leur donne pas les moyens de distinguer le bon grain de l’ivraie. C’est dans des cas pareils que l’on ressent l’avantage de l’ombudsman. Ce médiateur politiquement neutre, doté d’effectifs impressionnants, est chargé dans certains pays de défendre et d’éclairer la population vis-à-vis de tout ce qui se rapporte aux affaires publiques. Pour en revenir à nos propres moutons, les Libanais ont entendu les opposants clamer que la situation économique ne fait que se dégrader. Le ministre des Finances a soutenu quant à lui qu’il y a une amélioration sensible; que la détente règne sur le marché monétaire ou financier ; que l’on est sorti du rouge, du marasme ; que le niveau de vie progresse ; que la croissance va repartir de l’avant dès les prochains mois; que le déficit budgétaire et le volume de l’endettement public vont s’amoindrir d’année en année, etc. Or si, dans le vécu quotidien, la population ne perçoit pas un tel bond qualitatif, la crédibilité du gouvernement, la confiance dont il peut jouir en prendraient certainement un coup comme on dit familièrement. Et la contestation, c’est dans les rangs populaires qu’elle se retrouverait demain. La même chose vaut pour l’opposition. Si le tableau sombre qu’elle brosse de l’état des finances publiques et de la stagnation économique ne se vérifie pas de façon concrète, les émissions satellitaires à la dévotion des opposants auraient beau dire, le public jugerait sévèrement les Cassandre qui auraient usé d’évaluations tronquées. Il était peut-être divertissant d’entendre MM. Hariri et Hoss faire assaut d’aménités en s’accusant l’un l’autre de tous les maux du présent, du passé et du futur. Mais à la longue, ce «zajal» quasi folklorique finit par lasser les gens, qui se soucient beaucoup moins de savoir qui est fautif que d’être informés objectivement sur les vraies perspectives économiques du pays. Et sur leurs propres chances de s’en sortir. D’une manière générale, comme tout relève en définitive de la politique, les Libanais admettent que l’opposition tente de dégommer le Cabinet, ce qui est de bonne guerre. Ils sont disposés à appuyer un tel mouvement, s’il est justifié au niveau des réalisations et des options. Mais ils sont par contre prêts à soutenir le gouvernement s’ils sentent qu’il est effectivement sur la bonne voie. Cependant, on semble loin du compte à ce propos. En effet, le bilan des 16 de l’équipe Hoss ne semble pas fameux. Un grand flop pour commencer, avec l’échec de la réforme administrative. Des dérapages, regrettés par le président du Conseil, dans les nominations puis dans l’affaire dite des antiquités. Des défaillances accumulées dans les services publics de base. Une augmentation sensible de l’endettement public et une récession économique qui ne se dément pas. Selon certaines sources informées, «le chef de l’État lui-même commence à considérer d’un œil critique les prestations de certains ministres. Le président de la République, indiquent ces sources, aurait souhaité que les circonstances permissent la mise sur pied d’un Cabinet comprenant de fortes figures politiques. Une telle formation constituerait la première ligne de défense pour Baabda, au lieu que cela soit l’inverse comme c’est souvent le cas avec le gouvernement actuel. On sait en effet que le régime est fréquemment amené à intervenir pour protéger le Cabinet en place quand il est en butte à des attaques politiques». «Le général Lahoud, soutiennent ces sources, ne cache pas que certains ministres le déçoivent. Mais il pense que les circonstances actuelles ne permettent pas un changement de Cabinet précédé d’une crise ministérielle, d’autant que l’échéance des législatives est déjà trop proche».
Pour le vulgum pecus, le débat budgétaire s’est résumé à un dialogue de sourds. Le Libanais moyen, peu versé dans les questions techniques, ne peut pas savoir qui a raison, le ministre des Finances ou ses contempteurs. Les chiffres assénés par les protagonistes de la pièce qui s’est jouée place de l’Étoile sont évidemment contradictoires et le téléspectateur s’y...