Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Tribune Le Liban vu par un ami allemand (photos)

Invité au Liban pendant cinq bonnes semaines, Stefan Völker a évidemment fait du tourisme. De retour dans son pays, ce théologien et philosophe allemand a envoyé à ses amis une lettre dans laquelle il livre ses impressions sur un pays qu’il a «beaucoup aimé». Des observations qui pourraient faire réfléchir plus d’un responsable sur l’urgence d’une action. J’ai eu l’occasion d’être l’hôte du beau Liban durant cinq semaines. En tant que théologien et philologue, et bien que ma connaissance de la langue arabe soit modeste, je m’étais intensivement préparé à ce voyage dont je suis retourné très enrichi par les impressions et le comportement humain. Bien qu’il soit écrit dans la Bible : «J’ai beaucoup vu au cours de mes voyages et j’en ai compris plus que je ne saurais dire», je voudrais tout de même communiquer quelques observations importantes que j’avoue être aussi subjectives. J’ai pu visiter un pays abondamment riche en plusieurs domaines. • Votre Liban jouit en effet d’un grand patrimoine culturel et historique, point de mire de tout savant. Il témoigne de la longue histoire des Phéniciens qui ont profondément marqué l’Occident. J’ai admiré tout simplement les ruines grecques et romaines, aussi bien que celles des Arabes et des chrétiens. Votre pays présente ces trésors d’une façon très attractive, et les guides locaux ne manquent pas de tact et de discrétion dans leur information. • Votre Liban s’efforce avec succès d’effacer les traces de la dernière guerre fatale. Ce disant, je pense d’un côté aux dommages causés aux bâtiments, routes et ponts et de l’autre, aux blessures intérieures des hommes. Aucun parmi les Libanais que j’ai rencontrés ne m’a parlé des adeptes de telle ou telle religion, ni même fait allusion à telle autre couleur de peau. J’espère que cela continuera ainsi et que le Liban redeviendra la perle du Proche-Orient. • Votre Liban offre au touriste des sites et des paysages admirables (qui font rêver) : juste derrière la côte se dresse et s’étend une chaîne de montagnes très variées avec de belles vallées, des gorges et des rivières. En tant que photographe amateur, je n’avançais que lentement dans mes promenades à cause de l’abondance des motifs précieux. J’ai rarement vu des plaines si pittoresques étendues à l’ombre des montagnes. Tout est verdoyant dans ce pays grâce à l’abondance de l’eau qui ne cesse de couler jusqu’à la fin même de l’été. L’agriculture y est bien entretenue grâce à une compétence parfaite dans la production des légumes et des fruits, ce qui m’a vraiment impressionné. • Mais l’impression la plus belle que je garde de votre Liban est et demeurera pour moi l’amabilité et la gentillesse de ses habitants. L’hospitalité des Libanais est un cadeau divin. Quant à moi, je ne me suis aucunement senti étranger ou indésirable parmi eux : leur ouverture d’esprit dans les entretiens, leur disponibilité à l’égard d’un simple Européen, leur accueil généreux pendant les repas resteront pour moi des exemples à imiter. • Par contre, j’ai fait dans votre Liban des expériences qui m’ont fait réfléchir et que je ne voudrais pas laisser sous silence, par souci d’honnêteté. La formule qui les résumerait le mieux serait : «Les Libanais n’aiment pas leur Liban». Et cela se base sur les observations suivantes : * Trop de bruit! Et ce bruit semble être une chose normale dans votre Liban. Car je n’ai eu aucun moment de calme et de silence : nous savons qu’un avertisseur de voiture remplit sa fonction seulement dans un cas précis, c’est-à-dire pour signaler un danger. Mais vos automobilistes, amateurs de bruit, abusent de l’emploi de leur klaxon sans se soucier de la paix des autres. Votre Liban devra remettre en question cet excès de voitures s’il ne veut pas vraiment s’étouffer dans le bruit et les gaz d’échappement et creuser ainsi sa propre tombe : les cèdres, symbole de votre drapeau national, atteints maintenant de maladie, indiquent qu’il y a quelque chose qui ne va pas. * Par ailleurs, pourquoi n’avez-vous pas un système complet de transport en commun mis en fonction? Tout au long de la côte, les rails sont démontés, pas de trains. Est-ce que l’individualisme dans votre Liban est si prédominant que les moyens de transport en commun n’ont pas de chance de voir le jour ? Une comparaison : si tous les Chinois se mettaient au volant de leurs voitures comme les Libanais, en l’espace de deux ans, il n’y aurait plus d’oxygène sur toute la terre. * Que les Libanais semblent ne pas aimer leur pays, cela est signe flagrant d’une pollution catastrophique et d’une destruction de l’environnement. Sur les routes, et des deux côtés, je n’ai vu que des ordures, dans les champs aussi, et l’on brûle ces ordures dans les montagnes d’une manière irresponsable. Ce faisant, l’air est pollué, et surtout l’eau que l’on boit. Les bouteilles qu’on jette des voitures en marche, il n’est pas étonnant que leurs éclats puissent causer des incendies de forêt. Beaucoup de cours d’eau et de ruisseaux se trouvent dans un état lamentable. Ils sont puants à cause de l’eau sale et des ordures qu’on y jette. J’ai voulu, comme je le faisais en Europe, me rafraîchir à l’eau d’un ruisseau, mais la saleté m’en a empêché. Ce qui est plus grave encore, et à cause d’un manque de solution pour se débarrasser des ordures, c’est l’état de la plage tout au long de la côte. Croyez-moi, le tourisme de l’Europe n’atterrira jamais dans votre pays si la mer est pratiquement inutilisable. Dans aucun pays, je n’ai vu l’état de la mer aussi déplorable qu’ici. Est-ce que l’investissement dans les stations d’épuration est-il vraiment impossible ? Pour toute explication, vous ne pouvez pas prétexter que c’est la présence du voisin qu’on n’aime pas, Israël, ou les conséquences de la guerre dans le pays qui en sont la cause. * Vous avez, à peu près, trois cents jours de soleil. Mais vous obtenez l’énergie électrique par les stations thermiques parce que le fuel-oil est importé à bon marché. Pourtant, les moyens techniques favorisant l’utilisation de l’énergie solaire ont progressé à tel point que votre pays peut profiter facilement de cette énergie solaire bénéfique à l’environnement. Ainsi, la nuit, les générateurs bruyants et puants ne dérangeront plus les gens dans leur sommeil. Pourquoi n’ai-je pas vu sur les toits de vos maisons des collecteurs d’énergie solaire autant pour le chauffage que pour l’éclairage ? Les Libanais n’ont-ils pas intérêt à avoir l’air pur et le calme ? Si je me suis permis de formuler ces quelques critiques à l’égard de votre pays, c’est parce que j’aime votre Liban et j’aimerais bien y revenir.
Invité au Liban pendant cinq bonnes semaines, Stefan Völker a évidemment fait du tourisme. De retour dans son pays, ce théologien et philosophe allemand a envoyé à ses amis une lettre dans laquelle il livre ses impressions sur un pays qu’il a «beaucoup aimé». Des observations qui pourraient faire réfléchir plus d’un responsable sur l’urgence d’une action. J’ai eu...