Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGES

INFRASTRUCTURES - En attendant l’adaptation en fonction des aléas L’aéroport de Beyrouth, sécurité ou débrouille ?

L’accident du Concorde, l’été dernier, suivi de celui du GulfAir n’ont rien arrangé pour les phobiques du ciel. À qui la faute ? L’avion ? Le pilote ? L’aéroport ? On se dit que Roissy-Charles de Gaulle, c’est tout de même un aéroport modèle, à la pointe de tout, appelé à être en 2006 le plus grand aéroport d’Europe. Alors, qu’un avion ait pu trébucher au décollage sur un vulgaire morceau de ferraille échappé à un prédécesseur qui venait d’atterrir – et, qui plus est, a poursuivi impunément sa carrière un mois durant avec un morceau manquant ! – ça fait désordre. Plus encore, ça vous augmente les palpitations et autres sueurs froides à l’idée que ça y est, on décolle de Beyrouth, aéroport international, d’accord, mais ayant derrière lui une longue tradition de système D en raison de la guerre – atout ou handicap ?–. Un aéroport qui paraît démesuré dans sa nouvelle mouture, celle des années d’euphorie où l’on se croyait riche avec l’argent qu’on n’avait pas, qu’on n’a toujours pas… Alors, trois ans après son inauguration et quelques centaines de millions de dollars plus tard, question : cet aéroport, comment est-il contrôlé, entretenu ? Est-il fiable ? Sa piste n’est-elle pas semée de crève-pneus ? Y a-t-il quelqu’un dans la tour de contrôle ? Un pilote dans l’avion ? Et qui a pris le temps de dormir entre deux vols de nuit ? Quelles mesures sont-elles prévues en cas de problème ? Et puis quoi de neuf ? C’est à Nouhad el-Rahi, directeur général par intérim de l’AIB depuis le départ à la retraite, le 3 septembre dernier, de M. Fayçal Megdachi, que nous avons demandé des réponses. Cet homme placide et débonnaire fait pratiquement partie des murs de l’AIB. Technicien au sol depuis la fin des années cinquante (l’AIB a été inauguré en 1954), il a vécu l’époque des Caravelle. Casque aux oreilles, il a longtemps transmis en morse plans de vol, météo et autres messages aux pilotes par le biais des 16 stations HF dont il disposait. Autant dire que pour les urgences, il valait mieux respirer un bon coup ! Alors il vous raconte, ébloui, qu’aujourd’hui, avec la technologie du CIDIN, les messages passent en fragments de seconde et l’AIB a retrouvé depuis peu sa place de relais dans le réseau d’échange d’informations aériennes depuis qu’il est équipé en conséquence. «Les technologies liées à l’aviation ont tellement évolué qu’on peut avoir des frayeurs rétrospectives sur les risques qui étaient pris au début. Aujourd’hui, au moindre doute : une petite lumière qui s’allume, s’éteint ou clignote, l’avion est empêché de décoller ou obligé à atterrir. C’est arrivé à deux reprises le mois dernier. Naturellement, les avions n’avaient rien du tout et les passagers en étaient quittes pour une grosse frayeur. Mais c’est la règle». Sus aux oiseaux ! Et le nettoyage des pistes ? «Depuis sa création, l’AIB a toujours été entretenu par ses propres employés, une équipe étant chargée d’inspecter et de nettoyer les pistes, places et passages trois fois par jour. Depuis 1998, c’est une société privée – la Middle East Aircraft Services – qui assure ce travail chez nous aussi bien que dans d’autres aéroports de la région. La surveillance des pistes d’atterrissage et de circulation (Taxiways) est permanente, et un nettoyage de fond est effectué tous les matins à 7h. Depuis l’accident du Concorde, cette opération qui était pourtant routinière a bénéficié d’un surcroît de vigilance dans tous les aéroports du monde. J’ai moi-même adressé une circulaire aux responsables de la MEAS exigeant un renforcement du contrôle». À la suite d’un grave malaise survenu à un passager, une campagne a été menée dans la presse dénonçant l’absence d’une cellule médicale dans un aéroport qui est apparu tout à coup aux yeux du public comme un immense hangar prétentieux et vide de substance. Qu’est-il arrivé ce jour-là ? «Nous avons bien un dispensaire où se relaient en permanence des équipes de deux médecins : cardiologue et gynécologue ou gastro-entérologue et gynécologue. Malheureusement cette cellule est mal située, au troisième étage du bâtiment. Il faut donc en moyenne douze minutes à un médecin pour parvenir jusqu’au passager situé dans les salles d’embarquement. C’est bien un médecin de l’AIB qui a assisté ce malheureux et non pas un passager comme on l’a dit, mais il est arrivé tard. Actuellement nous œuvrons à disposer un dispensaire à chaque étage, bien que de telles situations soient rarissimes». On sait que dans tous les aéroports, une lutte permanente est organisée contre les oiseaux qui peuvent se piéger dans les réacteurs ou s’écraser contre les pare-brise gênant considérablement les pilotes. Qu’en est-il à l’AIB ? «C’est là que le bât blesse un tout petit peu ! En effet, le domptage des pigeons est un sport typiquement beyrouthin (Voir encadré) qu’exercent avec une ferveur toute particulière les habitants du quartier d’Ouzaï – secteur de l’AIB – malgré l’interdiction formelle qui leur en a été faite. Chaque semaine, des volières entières sont réquisitionnées et le plus souvent, malheureusement, détruites. Mais ils recommencent inlassablement, et les FSI sont tout le temps à leurs trousses. Je suis actuellement à la recherche d’un système efficace (sonore ou autre) pour débarrasser les environs de l’aéroport de ce fléau, en l’absence d’une sensibilisation des riverains». La 1735, une merveille Peut-être est-ce leur manière de protester contre la nuisance occasionnée par le survol permanent à basse altitude de leur secteur ? Une nouvelle piste, tracée dans la mer, devait pallier ce problème. On annonçait son ouverture au mois de juin, puis il a été dit qu’elle n’était pas conforme . On a même murmuré qu’elle n’était pas visible de la tour de contrôle. Quelle est la vérité ? La vérité est tout autre, naturellement. Cette nouvelle piste est une merveille d’architecture . C’est la 1735 appelée ainsi en raison de son orientation. Elle parcourt 1 900 m en mer, mesure 3 400 m de long au total pour 60 m de large. Elle habilite l’AIB à recevoir les plus grands avions du monde et présente l’avantage d’éloigner les avions des quartiers habités. Techniquement elle obéit à tous les standards internationaux, mais comme nous recherchons une sécurité de 200 %, nous avons engagé pour ce mois-ci, et durant deux semaines, un avion italien, issu d’un organisme international, qui sera chargé d’effectuer quotidiennement des décollages et des atterrissages de contrôle afin de rectifier les flottements et éventuelles erreurs techniques. Après cela, la piste sera définitivement prête à accueillir les avions dans le courant de l’année 2001. Il ne faut pas oublier que l’AIB est un aéroport tout neuf qui n’a pas encore eu le temps de vivre et de s’adapter en fonction des aléas. Le Liban est membre permanent parmi 33 pays de l’Organisation internationale de l’aviation civile. Depuis 15 ans, le président de cette organisation est un Libanais : le Dr Assaad Koteit. Le rôle de cet organisme est de définir et de contrôler l’application des normes internationales en matière de sécurité, de technologie, d’accueil, etc. Il a la possibilité de sanctionner les contrevenants, allant dans certains cas jusqu’à l’embargo provisoire. L’AIB est un bon aéroport. Il sera encore meilleur quand il aura atteint l’envergure prévue. Fifi ABOU DIB
L’accident du Concorde, l’été dernier, suivi de celui du GulfAir n’ont rien arrangé pour les phobiques du ciel. À qui la faute ? L’avion ? Le pilote ? L’aéroport ? On se dit que Roissy-Charles de Gaulle, c’est tout de même un aéroport modèle, à la pointe de tout, appelé à être en 2006 le plus grand aéroport d’Europe. Alors, qu’un avion ait pu trébucher au...