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Actualités - INTERVIEWS

INTERVIEW - Le ministre italien des AE à Beyrouth avant Damas Lamberto Dini : Oui, le Liban aurait tiré profit de sa présence à Marseille

Le ministre italien des AE, Lamberto Dini, n’aura passé que quelques heures à Beyrouth, une visite-éclair certes, une visite-marathon surtout. Et L’Orient-Le Jour n’aura ainsi pu obtenir, avec Lamberto Dini, que le temps du trajet entre le siège de la nouvelle ambassade italienne place de l’Étoile et la résidence de Rafic Hariri à Koraytem, où le chef de la diplomatie du gouvernement D’Amato était attendu. Soit huit minutes exactement pour aborder deux ou trois thèmes qui n’ont pas été évoqués lors de la conférence de presse qu’il avait tenue auparavant et revenir avec lui sur quelques autres qu’il avait explicités. Lamberto Dini qui est apparu plus que désireux d’éviter toute surenchère, toute dramatisation à outrance certes, mais attentif, vigilant, «je n’ai pas peur non, mais j’appréhende». Prudence doit certainement être mère de sûreté... Parler business... Est-ce que vous considérez, à l’instar de certains hommes politiques libanais et après la triple mise en garde de Kofi Annan, David Satterfield et Philippe Lecourtier à l’État libanais, que ce dernier soit, pour la première fois dans son histoire, en situation d’illégalité vis-à-vis de l’Onu ? «Illégalité ? Je ne dirais pas que l’Onu n’est pas aux côtés du Liban, non. Je pense que les réclamations, justes, que fait le Liban doivent être portées devant le Conseil de sécurité. Et là je suis certain qu’elles recevront toute l’attention qu’elles méritent». L’Onu a en fait reproché au Liban de violer, de ne pas respecter la «ligne bleue» qu’elle a elle-même dessinée. «Je ne voudrais pas dramatiser. Il y a la Finul qui remplit sa mission : observer, vérifier, surveiller sans discontinuer les violations, d’un côté comme de l’autre». Donc, selon vous, le Liban n’est pas en situation d’illégalité par rapport aux résolutions de l’Onu. «Non, pas du tout, je ne pense pas que les épisodes éventuellement relevés soient d’une gravité telle qu’il faille parler d’illégalité». Que pensez-vous de la politique libanaise – comme syrienne – de la chaise vide lors de la Conférence de Marseille sur le partenariat euro-méditerrannéen (Euromed) ? Vous avez dit lors de votre conférence de presse que «les deux pays devaient avoir de bonnes raisons de ne pas y participer», c’est sans doute de la langue de bois, non ? «Non, il y a eu des raisons qui ont été plusieurs fois répétées. La déclaration des chefs d’État et de gouvernement arabes à Doha par exemple..». Certes, mais sept pays arabes y ont pleinement participé, à cette conférence. «Oui, mais le Liban et la Syrie ont voulu souligner leur indignation contre la violence qui s’est accrue (dans les Territoires). C’est donc un choix politique». Tout le monde est d’accord pour dire que cette conférence aurait grandement servi les intérêts du Liban, qu’en pensez-vous ? «J’estime personnellement que la présence est toujours préférable à l’absence. Dans l’ensemble. Et dans le cas où cette absence n’était qu’un épisode isolé, nous espérons qu’elle ne fera pas “jurisprudence”. Parce que la présence du Liban comme de la Syrie est importante au sein de l’Euromed, cela fait deux voix en plus». Le Liban aurait donc tiré profit de cette conférence. «Exactement». Revenons un peu sur la question de la Finul. Est-elle toujours utile ? Sa présence est-elle menacée aujourd’hui pour cause de non-envoi de l’armée libanaise au Liban-Sud ? «Une évaluation générale sera faite au niveau des Nations unies. Mais le fait qu’il n’y ait pas de zones de séparation le long de la ligne bleue rend, je crois, la présence d’une force internationale encore nécessaire pour quelque temps, du moins pour éviter les débordements». On entend dire qu’une des raisons majeures de votre présence au Liban, c’est pour «parler business», et notamment avec Rafic Hariri, c’est vrai ? «Pas nécessairement, nous parlerons de la situation internationale». La privatisation de l’Électricité du Liban est, dit-on, dans l’air. La nomination de M. Hariri à la tête du nouveau gouvernement libanais vous satisfait ? «M. Hariri a été Premier ministre pendant longtemps, et moi-même je l’ai rencontré en 1995. Ça va me faire plaisir de le revoir. Oui, sa présence est une bonne chose : le processus démocratique est toujours une bonne chose». Soit. Vous pensez qu’il a été respecté, ce processus, au Liban ? «Moi je crois que oui. Il y a un Parlement, il y a eu des élections». Et l’ingérence syrienne dans la vie quotidienne au Liban ne choque pas l’Italie ? «C’est un choix fait par les autorités libanaises». Que la Syrie s’ingère dans... «Non, pas “s’ingère”. Pas du tout. Mais que les autorités libanaises souhaitent, en ce moment, des relations étroites avec la Syrie, c’est ça le choix. Nous respectons ce désir». Quid enfin de la présidence française de l’Union européenne. L’Italie en est-elle satisfaite ? «Oui, MM. Chirac et Jospin sont fortement engagés pour trouver la solution adéquate aux problèmes qui se posent». L’Europe des 28 est donc en bon chemin ? «Oui, je crois qu’il y aura de nouveaux membres effectifs au sein de l’UE, probablement avant 2005». Un maximum de contrôle Quelques minutes avant l’interview qu’il nous a accordée, Lamberto Dini avait tenu une conférence de presse, dans les locaux de l’ambassade d’Italie, au cours de laquelle deux thèmes majeurs ont été développés. Le ministre italien des AE a d’abord lancé un appel «urgent» au Liban et à la Syrie. «Il nous a apparu urgent de prendre directement contact avec ces deux pays, en ce moment particulier où la situation est explosive entre Israël et les Palestiniens, et de faire appel à leur sens des responsabilités afin qu’ils n’entreprennent rien qui pourrait créer un nouveau front», a déclaré M. Dini à la presse. Les précisions n’ont pas tardé : «Le Liban doit également éviter tout incident (avec Israël) et donc exercer un maximum de contrôle sur toutes les forces armées qui se trouvent sur son territoire», a-t-il ajouté, estimant que toute extension du conflit aurait des conséquences désastreuses sur le processus de paix. Concernant l’absence de l’armée libanaise au Liban-Sud, le ministre italien a affirmé qu’il serait «préférable, d’un certain point de vue, que l’armée libanaise prenne le contrôle total» de cette région, après le retrait israélien à la suite de 22 ans d’occupation. «Parallèlement, je ne suis pas surpris que les autorités libanaises veuillent procéder avec précaution en estimant qu’une telle présence pourrait constituer en soi une cause de tension, a-t-il avoué. C’est une affaire qui doit être laissée au jugement des autorités libanaises». Et c’est deux ou trois heures plus tard, en début de soirée, que Lamberto Dini, à l’issue de son entretien avec Rafic Hariri, s’est rendu à Damas pour une visite de 24 heures. Il retournera ensuite en Italie. Ziyad MAKHOUL
Le ministre italien des AE, Lamberto Dini, n’aura passé que quelques heures à Beyrouth, une visite-éclair certes, une visite-marathon surtout. Et L’Orient-Le Jour n’aura ainsi pu obtenir, avec Lamberto Dini, que le temps du trajet entre le siège de la nouvelle ambassade italienne place de l’Étoile et la résidence de Rafic Hariri à Koraytem, où le chef de la diplomatie...