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Actualités - ANALYSE

religion - Clôture d’une chaîne de prières à l’intention de la paix au Liban Ces « petits moyens » qui fondent une culture

À côté du Liban politique qui se construit, ou se détruit, c’est selon, à côté des grands moyens que l’on utilise pour bâtir une économie viable et rentable (pour qui ?), à côté des solidarités tonitruantes qui ne nous vaudront, très probablement, que pauvreté et déconvenues, à côté des projets de société uniformes que l’on cherche à nous passer, des rapports de force, des intrigues de notre asservissement il y a un autre Liban qui pousse dans le silence des «petits moyens», ceux du cœur. Un Liban dont la résilience spirituelle est certainement d’une plus grande conséquence pour l’avenir que les gesticulations des dirigeants et les insultes à notre intelligence et à notre dignité. Le Liban des «petits moyens», c’est celui de la pousse qui grandit en silence, de l’Esprit qui élargit son champ de présence. C’est le Liban des priants et des quelques piliers de prières grâce auxquels l’édifice continue de tenir debout. C’est de l’un d’eux qu’il s’agit. Mathilde Riachi est aujourd’hui septuagénaire. Dans les années 60, cette femme ordinaire, menée par le ciel à travers des voies extraordinaires, pressentit l’amoncellement des nuages dans le ciel du Liban, et l’orage qu’ils annonçaient. En 1961, avec une compagne de prière et d’apostolat, elle parcourut le Liban, du Nord au Sud, et d’Est en Ouest, en forme de signe de croix, récitant le rosaire, visitant pratiquement toutes les églises du Liban, et plantant des croix bénies sur terre et sur mer, en particulier aux frontières. En souvenir de ce geste prophétique, le mouvement d’apostolat et de prière qu’elle a fondé, la Congrégation des cœurs unis dans les cœurs de Jésus et de Marie, vient de compléter une chaîne de récitation du rosaire qui s’est étendue sur tout le mois d’octobre et a touché pratiquement toutes les régions libanaises, à l’exception d’un Sud dont les turbulences ont effrayé les pacifiques. Une congrégation religieuse, les Sœurs du Rosaire, et des dizaines de fidèles ont participé à cet effort de prière tout à fait exceptionnel, conclu le 28 octobre par une messe célébrée à Harissa, par Mgr Antoine Andari, vicaire patriarcal maronite. Prières, mais pas inaction La chaîne de prières qui vient de s’achever a été faite «à l’intention de la paix au Liban et dans le monde». Pour Mathilde Riachi et pour beaucoup de ces guerriers de la prière, qui veillent sur le Liban, il n’est de salut que dans la prière. Ce qui ne veut pas dire inaction. Dans son amour passionné, du Liban, terre sainte que les pieds du Christ et de la Vierge ont foulée, une étrange symbiose semble même s’être établie entre la situation générale du pays et son état de santé. Elle est souvent malade quand quelque chose ne va pas, ou qu’un choc se prépare. On écrira un jour l’histoire tout à fait extraordinaire de cette femme aux charismes éprouvés, de cette grecque-catholique à l’obéissance irréprochable, de cette fille de Zahlé aux faiblesses tout à fait communes. Mais la sainteté, dans le christianisme, ne se trouve pas dans la perfection extérieure ; elle réside dans l’amour. C’est aux fruits portés par son mouvement que l’on jugera. Le patriarche maronite, citant Jean-Paul II, rappelait voici peu que c’est dans la culture que s’est incarné l’esprit de résistance du peuple polonais, écrasé entre l’Allemagne et la Russie. Que c’est cette culture qui a préservé l’identité nationale du peuple polonais. Oui, la culture est ce par quoi vivent et résistent les peuples. Mais qu’est-ce que la culture ? Essentiellement, l’aménagement d’un espace pour la liberté, le déploiement d’une moralité publique. C’est à l’état de corruption morale, ou de son absence, que les historiens jugent de la vigueur des civilisations. C’est à lui que nous devons juger si la semence du Liban est encore vivante. Même les économistes vous le diront, c’est à la verdeur de la moralité publique que se mesurera la vigueur du Liban. Les mouvements d’apostolat laïc, tel celui lancé par Mathilde Riachi, sont d’une importance capitale. Ils font un travail essentiel, fondamental, quoique invisible. Ses dividendes, du moins, sont invisibles, puisque le bon grain est semé dans les esprits et les cœurs, et fleurit sous forme de prévenance, d’honnêteté, de piété, d’amour du prochain, des vertus qui, à leur tour, fondent la solidarité sociale et, plus tard, la cohésion politique. Si ce grain est sauvé, le Liban est sauvé. Si ce grain est perdu, le Liban est perdu. Fady NOUN
À côté du Liban politique qui se construit, ou se détruit, c’est selon, à côté des grands moyens que l’on utilise pour bâtir une économie viable et rentable (pour qui ?), à côté des solidarités tonitruantes qui ne nous vaudront, très probablement, que pauvreté et déconvenues, à côté des projets de société uniformes que l’on cherche à nous passer, des...