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Actualités - REPORTAGES

Un village à travers le regard d’un poète

«Je t’ai rêvé, Chartoun, pas tel que tu es aujourd’hui, mais tel que tu as été.» S’il existe quelqu’un qui connaît ce petit village de Aley mieux que personne, c’est sans conteste Latifé Chartouny, poète autodidacte qui y est née et y vit. Le vers cité revient comme un leitmotiv dans l’un de ses charmants poèmes, écrits en arabe parlé. Il exprime la tristesse des années d’exil forcé, quand les images vous trottent par la tête, alors même que vous savez qu’elles ne sont déjà plus que souvenirs... Mme Chartouny se remémore sa jeunesse au village, ne pouvant s’empêcher de sourire à l’évocation des temps passés. «L’enseignement était prodigué au pied du chêne, se rappelle-t-elle. Nous avions une maîtresse pour l’année, envoyée par les sœurs lazaristes. Mais c’est surtout par mes lectures que j’accédais au savoir.» Mariée à un homme originaire, comme elle, du village, l’histoire récente de cette localité semble se fondre avec sa vie. «Nous cueillions, mon mari et moi, les olives et les raisins», raconte Mme Chartouny. De quoi se souvient-elle surtout aujourd’hui ? À l’instar d’autres habitants, c’est surtout «les festivals de Chartoun qui, en 1964 et 1967, concurrençaient ceux de Baalbeck», qui lui ont marqué la mémoire. «Mon fils a contribué à leur organisation», ajoute-t-elle, fière. À l’évocation de l’époque d’exil, ses yeux se voilent de tristesse. «Nous étions hors du village quand les événements ont eu lieu, mais nous croyions pouvoir rentrer bientôt», se souvient-elle. Et les années s’égrènent, jusqu’au retour. Qu’a-t-elle ressenti à la vue de son village natal détruit et abandonné ? «Que voulez-vous que je ressente ?» dit-elle, avec un sourire désabusé. Aujourd’hui, quand elle se remémore le passé, qu’est-ce qui lui manque le plus ? «Ma génération, mes parents, ils sont tous partis», répond-elle. Après un bref temps de réflexion, elle ajoute : «Je suis surtout navrée par la disparition d’une caisse qui contenait tous mes écrits. Je ne peux malheureusement plus les reconstituer.» Actuellement, c’est le retour des jeunes qui lui fait chaud au cœur. «Nous sommes heureux d’être là, malgré les difficultés, souligne Mme Chartouny. Quand je pense à toutes les activités qui étaient organisées dans le village, je ne peux qu’espérer voir les jeunes prendre la relève.» Un groupe de jeunes relié à l’église Saint-Challita, actif depuis quelque temps au village, semble exaucer ce vœu…
«Je t’ai rêvé, Chartoun, pas tel que tu es aujourd’hui, mais tel que tu as été.» S’il existe quelqu’un qui connaît ce petit village de Aley mieux que personne, c’est sans conteste Latifé Chartouny, poète autodidacte qui y est née et y vit. Le vers cité revient comme un leitmotiv dans l’un de ses charmants poèmes, écrits en arabe parlé. Il exprime la tristesse...