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Actualités - REPORTAGES

Méthodologie de la recherche

«Entre deux points donnés, la ligne droite est le chemin le plus court». Cet axiome les géomètres se montrent unanimes à le proclamer, et les oiseaux peut-être les seuls à le mettre en pratique. Mais dans notre vie banale, celle de tous les jours, dans cette faculté de locomotion, que nous partageons avec les mathématiciens et avec les oiseaux, combien d’entre nous suivent habituellement la ligne droite ? À notre époque de vie intense, d’enfièvrement universel, où, pour être de son siècle, il faut avoir été piqué par la tarentule du déplacement, l’homme affairé choisit non la voie, géométriquement la plus courte, parce que la plus droite, mais la plus rapide, celle destinée à le mener au but avec la moindre dépense de temps et d’argent, abstraction faite de la distance parcourue. Toute l’économie des moyens de transport repose sur cette distinction. Elle amène à accorder la préférence aux lignes principales sur les lignes secondaires, fréquemment plus courtes comme longueur kilométrique. C’est sur les premières que circulent les direttissimi. La ligne droite, deviendra décidément la plus courte le jour, prochain peut-être, où les progrès de l’aviation nous élèveront au niveau des oiseaux. La vérité de ces considérations éclate surtout dans le domaine scientifique. Voie la plus courte, chemin des écoliers y deviennent fréquemment synonymes. Si l’on prétend y avancer, aboutir enfin, il faut tenir compte d’un facteur essentiel : le temps. En cette arène, bordée de précipices, semée de casse-cou, de pièges et de traquenards, il est prudent de s’arrêter parfois pour donner un coup de sonde, explorer la solidité du terrain. Rien de dangereux comme de prétendre brûler les étapes, utiliser les sentiers de traverse, les coursières, sous prétexte d’abréger le chemin. On doit se résigner à flâner, accepter de marcher à toute petite vapeur, de subir des haltes prolongées dans des stations de campagne. Prenons un exemple dans l’histoire de l’art. Pour étudier un de nos grands monuments, deux méthodes se présentent. La première, celle des gens nerveux, s’engouffrant tête baissée à l’intérieur, les yeux collés sur leur Baedeker. Cela se voit même à Rome. D’autres, mieux inspirés, commencent par prendre du temps et de l’espace. Ils battent la semelle sur la place, circulent autour de l’édifice, reviennent sur leurs pas pour étudier son emplacement, son enceinte, en un mot, le milieu artistique. Ils cherchent à se donner le recul nécessaire, afin de juger de l’effet, produit par l’ensemble. Fréquemment la réalisation d’un chef-d’œuvre représente «la rencontre d’un grand artiste et d’un grand paysage. Et c’est pour cela qu’il est absurde de séparer le Parthénon de son cadre. Descendez-le de sa colline, ôtez-lui les jeux de la lumière, l’athmosphère brillante et ventilée, où il s’épanouit – le voilà presque rabaissé au niveau du Théseion», le monument trapu, s’abritant aux pieds de l’Acropole. Henri LAMMENS, Le Berceau de l’islam, 1914
«Entre deux points donnés, la ligne droite est le chemin le plus court». Cet axiome les géomètres se montrent unanimes à le proclamer, et les oiseaux peut-être les seuls à le mettre en pratique. Mais dans notre vie banale, celle de tous les jours, dans cette faculté de locomotion, que nous partageons avec les mathématiciens et avec les oiseaux, combien d’entre nous suivent...