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États de femmes La femme monte au filet du livre, qu’elle en soit l’auteur ou le sujet. Voici neuf ouvrages, romans, documents ou textes à thème commun, qui la présentent en tant que fille de son père, de sa mère, mais aussi mère de sa fille. Certaines restent éternelles, par leur destin hors du commun. Quoi qu’il arrive, elle est un mystère pour les hommes, qui la racontent, ou la nient, pour tenter de la saisir (*). Stéphanie Janicot, «Non, ma mère n’est pas un problème», Éditions Albin Michel Dans ce roman, le septième de Stéphanie Janicot, tout l’intérêt réside dans l’alternance des voix de trois narrateurs : celle de Pierre-Aaron, qui se raconte à son thérapeute et qui est raconté par la romancière, et celle de sa mère, Anna, qui raconte, toujours au présent, sa vie de jeune mère et de jeune épouse. Ici, les différences de points de vue, passionnantes et risibles tout à la fois, comme dans la vie d’ailleurs, s’exacerbent : Anna se sent prisonnière et souffre tandis que son fils ne supporte pas la lâcheté de celle-ci, mais sera tout de même tenté de se lancer, comme elle, dans des études de psychologie. La fin du roman, menée à la manière d’un polar, révèle que le psychologue des longues séances d’introspection a été de longues années l’amant d’Anna. Un très agréable récit, complexe juste ce qu’il faut et ramassé à la manière française. Extrait : « - Avez-vous vraiment été heurté ? demande David Holstein. - Je ne sais plus. Je me sens très dépassé par ce genre d’événements. - C’est douloureux ? - Oui, ça doit me rappeler la libération de ma mère car enfin, je crois que c’était bien ce à quoi elle aspirait : se libérer. Les femmes sont très influençables. Elles ont trop écouté les discours de leurs semblables. Les hommes ne sont pas une valeur sûre. Elles préfèrent se raccrocher à ce qui dure : le travail, les copines, les enfants. Nous ne servons plus à grand-chose sur la longueur. » Éliette Abécassis, « Mon père», Éditions Albin Michel 137 pages pour raconter sa vie avant et après la mort de son père : c’est ce que fait, sans pudeur, la narratrice de ce roman aussi poignant que perspicace. Jusqu’à la disparition de l’homme qui donnait à sa vie tout son sens, Héléna n’a jamais été heureuse dans sa vie sentimentale. Quelque temps après le décès de Georges B., dont elle ne se remet pas, elle reçoit une lettre d’un inconnu qui veut la rencontrer pour parler du même Georges B. Elle découvre que Paul M., auquel elle répond d’instinct et qu’elle reçoit chez elle, n’est autre que son demi-frère, parti à la trace de ce père qu’il n’a presque pas connu. Ils font ensemble le chemin douloureux de la découverte du mystère paternel. L’un d’entre eux en sort grandi, tandis que l’autre ploie devant le visage de la vérité. Enfance mal aimée, enfant trop aimée, c’est ce que dévoile ce court roman en forme d’exutoire. Pour commencer une vie d’adulte. Extrait : « Sans cesse, je recherchais l’amour infini du père qui sourit, heureux en son confort, fier et serein, sourire d’à côté, sourire d’en face, sourire de rien, plaisir du bonheur et plaisir de la vie. Je me souviens, ô je me souviens de la grande insouciance de l’enfance, le pacte absolu, le don de lui à moi et de moi à lui. » «Désirs de femmes», Éditions Blanche Les femmes n’ont plus peur de rien, et le porno-chic a envahi la création publicitaire. Alors quand 17 femmes, toutes cachées, comme la jolie tradition des écrits érotiques le demande, derrière des pseudonymes de boudoir, prennent leur plume pour détailler très explicitement leur désir, il y a juste à franchir le pas et à apprécier, avec plus ou moins d’enthousiasme, la capacité de ces dames à rentrer dans le détail de la chose. Certaines histoires sont, bien sûr, plus subtiles et plus croustillantes que d’autres, mais le tout est plutôt agréable, à supposer que la sexualité soit un détail, non négligeable, du quotidien, à considérer sans fard ni tabou. Extrait : « Sur la table en inox que l’on avait recouverte pour la circonstance d’une nappe de dentelle au monogramme de la maison de bouche, le grand plateau en argent m’attendait, rutilant. Je m’y allongeai, épousant de mes omoplates les décors en ronde-bosse. Dans de religieux chuchotements, la batterie de cuisiniers, du plus gradé à l’assistant, s’affaira sous les ordres du maître des lieux, Yves Lelouvre, dont on chuchotait dans la capitale qu’il pourrait bien conquérir sa dernière étoile, tant sa cuisine était devenue inventive tout en respectant un équilibre des saveurs. Ils me parèrent donc selon les idées du maître, allumèrent un feu dans l’âtre imposant où avaient rôti, pas plus tard que la nuit dernière, trois petits cochons arrosés de verjus. » Shere Hite, «Le nouveau rapport Hite, l’enquête la plus révolutionnaire jamais menée sur la sexualité féminine », Éditions Robert Laffont Un énorme pavé, comme tous les best-sellers américains, que ce Rapport Hite, avec un sous-titre très accrocheur. En le parcourant, on apprend qu’il s’agit du doctorat de ladite Shere Hite, qu’elle a terminé en 1977 et qu’elle a enrichi en 2000. Le livre en question est la réplique presque exacte du fastidieux travail universitaire. Celui-ci a dû, comme le prouvent les appréciations de toutes celles qui, par l’intermédiaire d’immenses questionnaires, ont constitué le terreau de la recherche, faire l’effet d’une authentique bombe à sa première parution. Une simple consultation du sommaire permet de s’en faire une idée : neuf chapitres sur, entre autres, la masturbation, l’orgasme, le coït, l’homosexualité féminine, l’amour ou la révolution sexuelle - touchant rappel des années 1970. Principalement composé des témoignages recueillis, chaque chapitre laisse la place à une petite analyse et, éventuellement, à des schémas explicatifs et des tableaux comparatifs. Un peu daté certes, mais révélant combien la femme a dû se battre pour vivre une sexualité aussi épanouie que celle de l’homme. À vérifier dans certains pays. Diala GEMAYEL (*) La seconde partie des nouveautés en librairie paraîtra demain, vendredi.