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Actualités - CHRONOLOGIE

Vient de paraître - « Recommandations dernières » de l’imam cheikh Mohammed Mehdi Chamseddine Le Liban des communautés : du compromis provisoire au choix définitif (photo)

Présenté par Ghassan Tuéni, et préfacé par Ibrahim Chamseddine, un ouvrage intitulé Recommandations dernières, testament politique de l’imam cheikh Mohammed Mehdi Chamseddine vient de paraître aux éditions Dar an-Nahar. L’ouvrage est la transcription fidèle par son fils, Ibrahim Chamseddine, de plusieurs enregistrements effectués par l’imam disparu alors qu’il était traité, en France, pour le cancer qui l’a emporté, le 10 décembre 2001. Le premier enregistrement a été effectué deux semaines seulement avant son décès. Le dernier a été fait à Beyrouth, où il était rentré, les médecins ayant abandonné tout espoir de rémission. La bande sonore de ce dernier enregistrement est restée inachevée, l’imam n’ayant plus trouvé la force de poursuivre tout haut son raisonnement. On a donc entre les mains le « dernier état » de la pensée religieuse et politique d’un homme qui a été étroitement lié aux années de guerre et à toutes les controverses politiques, une « volonté dernière » exprimée par un homme qui était un grand croyant, et qui savait qu’il avait des comptes à rendre. La pensée politique de cheikh Mohammed Mehdi Chamseddine a connu, au cours de la dernière phase de sa vie, une évolution surprenante : la proclamation de son attachement au confessionnalisme politique, ou encore à une démocratie de société, qu’il appelait à parfaire, et son refus de la démocratie du nombre. « Je m’oppose à tout projet d’abolition du confessionnalisme politique, de quelque nature qu’il soit. Il ne faut plus en débattre », affirme-t-il dans son testament politique. Et encore : « L’abolition du régime du confessionnalisme politique est une mesure aventureuse. Elle peut menacer le devenir du Liban. » Cette volte-face était d’autant plus surprenante que l’imam avait lui-même défendu, quelques années plus tôt, l’idée de la démocratie du nombre. Pour quelle raison l’imam était-il revenu sur cette idée ? Sans s’en expliquer totalement, l’imam Chamseddine laisse entendre qu’il s’agit d’une question liée « aux notions de la diversité et du pluralisme politique, à un tournant historique de l’histoire du monde ». L’imam rappelle, dans ses dernières recommandations, que c’est le Conseil supérieur chiite qui, en 1977, a forgé la notion du « Liban, patrie définitive pour tous ses fils », une notion qui allait être adoptée à Taëf et faire son entrée dans la Constitution. Et d’ajouter : « En vérité, ce principe n’a pas été posé pour répondre au vœu des chrétiens et les satisfaire, mais il était nécessaire et il l’est toujours, j’en suis convaincu, pour la pérennité de l’entité libanaise, et non pas seulement dans l’intérêt du Liban et de son peuple, mais dans celui du monde arabe aussi, et même dans l’intérêt du monde islamique (...). » Revenant sur l’accord de Taëf, l’imam en arrivait à déclarer : « Cette formule (la répartition confessionnelle des charges publiques), beaucoup l’ont considérée provisoire, et nous l’avons pensé aussi (...) Moi-même j’ai qualifié (Taëf) d’accord de nécessité, mais aujourd’hui, je dis que c’est l’accord du choix, c’est un accord conforme à la nature du Liban, car il assure tous les moyens possibles de stabilité, de progrès et de prospérité... » Pour parfaire les institutions civiles, l’imam Chamseddine avait envisagé de créer un « secrétariat permanent du Sommet spirituel libanais » au sein duquel toutes les grandes questions pouvant susciter des tensions confessionnelles au sein de la société libanaise devaient être débattues. Évidemment, la présence syrienne au Liban et les libertés figuraient parmi ces grandes questions. Ces recommandations avaient aussi un corollaire, exprimé avec la même urgence : les chiites étaient invités à fuir absolument tout ce qui les encouragerait à se distinguer comme minorité de la communauté nationale où ils sont insérés, à réclamer la défense de leurs droits. « Je recommande à mes fils et à mes frères chiites où qu’ils se trouvent, dans quelque société que ce soit, de s’intégrer dans les nations, les sociétés et les patries où ils se trouvent... » Chamseddine avait sans doute constaté que les appels à la défense des droits des minorités pouvaient devenir facteur de désintégration, et combien facilement on pouvait en jouer pour déstabiliser les pays arabes. Il avait d’ailleurs effectué des missions en ce sens auprès des communautés chiites en Égypte et à Bahreïn. Le souci de l’unité islamique était omniprésent, dans son esprit. Loin de toute notion de minorité chrétienne, l’imam avait également recommandé qu’une place particulière soit réservée aux chrétiens arabes dans le pouvoir de décision, y compris politique. « Je considère qu’il est de la responsabilité des arabes et des musulmans d’encourager, par tous les moyens, les chrétiens d’Orient à retrouver la plénitude de leur présence, de leur efficience et de leur rôle dans le pouvoir de décision et dans le cours de l’histoire ; et qu’il existe un partenariat complet dans ce domaine entre les musulmans et les chrétiens, partout où ils pourront se trouver. » « Les instances intellectuelles, politiques et religieuses, les médias, les autorités du monde culturel devront insister, de toutes leurs forces, sur ce point », dit-il encore. Les dernières recommandations parlaient aussi de la nécessité d’un « secrétariat permanent du Sommet spirituel musulman », de l’Université islamique au Liban, une université que l’imam avait eu le bonheur de voir instituée, et dont il attendait qu’elle contribue à l’édification de l’unité islamique et du Liban. L’une des disciplines prévues au curriculum est l’étude comparée des religions et le dialogue islamo-chrétien, que ce soit au niveau libanais ou aux niveaux arabe et mondial. Ce dialogue, disait-il, est « une des nécessités de civilisation de l’heure ». Au niveau libanais, l’imam disait que ce dialogue était « une nécessité vitale quotidienne ». Voilà, brièvement présentées, les « dernières recommandations » de l’imam Chamseddine. Il serait utile de les méditer, avant de prendre une décision irréfléchie au sujet d’une quelconque abolition du confessionnalisme politique. Sur la fin de sa vie, l’imam avait « découvert le Liban », affirme l’un de ses proches. Découvrons-le à notre tour. Fady NOUN
Présenté par Ghassan Tuéni, et préfacé par Ibrahim Chamseddine, un ouvrage intitulé Recommandations dernières, testament politique de l’imam cheikh Mohammed Mehdi Chamseddine vient de paraître aux éditions Dar an-Nahar. L’ouvrage est la transcription fidèle par son fils, Ibrahim Chamseddine, de plusieurs enregistrements effectués par l’imam disparu alors qu’il...