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Actualités - REPORTAGE

REPORTAGE - Une plage qui s’étire sur douze kilomètres de sable blond Tyr, un bout de paradis bercé par les flots(photos)

Douze kilomètres de sable blond. Une mer limpide aux couleurs qui changent selon les heures de la journée. Et une plage où l’on marche des dizaines et des dizaines de mètres vers l’horizon sans jamais perdre pied. Cela n’est pas de la fiction et l’on est bel et bien au Liban, à 85 kilomètres au sud de Beyrouth, exactement. Tyr. Tyr, une ville «comblée et alourdie au cœur des mers», selon le prophète Ézéchiel. Tyr, ville tolérante et tranquille, vit au rythme des vagues et des saisons. C’est bien à Tyr, sur cette plage, comparable à un bout de paradis, que l’on apprend la meilleure leçon de tolérance. C’est là que l’on assiste, une fois n’est pas coutume dans ce pays, à un véritable brassage de la population. Riches et pauvres, cultivés et analphabètes, en bikini ou en foulard... Bref, tout le monde vient se baigner, vivre et respirer sur cette baie immense qui s’étend, on ne le répétera jamais assez, sur douze kilomètres. Parfois, il suffit de peu pour être heureux. Allez donc à Tyr apprécier les plaisirs simples. Il vous faut une chaise longue et un parasol (si vous tenez à protéger votre peau) que vous pourrez louer aux cabanons qui ont poussé sur une partie de la plage, une grande serviette uniquement si le soleil et le sable ne vous gênent pas, et des flotteurs, des seaux, des pelles et des râteaux si vous décidez de débarquer avec vos enfants. Ils seront aussi ravis que vous de passer des journées entières au bord de la grande bleue. Ici la mer est propre et, depuis le mois dernier, petites et grandes méduses ont quitté les plages sablonneuses du Sud. Certains racontent, à Beyrouth et ailleurs, que les eaux de Tyr sont dangereuses à cause de leurs courants. D’ailleurs, vous trouverez toujours quelqu’un, avant d’aller sur place, pour vous relater la triste histoire d’un noyé. Méfiez-vous des racontars, et sachez par exemple que les courants marins ne peuvent pas emporter des hommes, des femmes ou des enfants qui barbotent dans l’eau. Il faut bien s’éloigner du rivage pour risquer – rarement – d’être emporté par les flots. Accessible en voiture à partir de la vieille ville, la plage de Tyr vous émerveillera. Attention cependant, ne choisissez pas le parking bondé pour assouvir votre besoin de dépaysement. En tout cas, cette dernière sensation vous viendra tout de suite, vous prendra à la gorge, quand vous atteindrez la plage. Une étendue immense où la ville de Tyr avec ses constructions anarchiques au nord et le cap de Ras Naqoura au sud paraissent bien loin. Encore une fois, avant d’étaler votre serviette sur le sable blond, méfiez-vous des idées reçues. Ici, il n’est pas interdit de boire de l’alcool et les soirées bien arrosées peuvent se prolonger jusqu’à une heure tardive de la nuit sur le sable ou dans l’eau. Les gérants de certains cabanons vous serviront le dîner. Optez pour des fruits de mer et du poisson pêchés au large de Tyr. Si les crabes et autres petits animaux qui sortent du sable la nuit ne vous effraient guère, vous pouvez dresser une tente et dormir sur la plage. Revenons maintenant à votre serviette étendue sur le sable, sous le soleil. Ici on ne sent pas le temps passer et le coucher du soleil avec ses couleurs rose et orangée arrivera malheureusement beaucoup trop vite. Ici, une baignade de quelques minutes se transformera en trempette d’une heure. Et ce n’est qu’à contrecœur que vous quitterez la sensation de l’eau imprégnée de sable sur votre peau. Une fois au soleil, installés un peu loin des vagues, vous serez merveilleusement éblouis par une luminosité qui n’existe nulle part ailleurs sur la côte libanaise. Si vous vous promenez sur la plage, vous ferez bien des rencontres: diseuses de bonnes aventures, marchands de fèves, de maïs ou de barbe à papa que vous solliciterez inévitablement. Attention cependant, une partie de la plage, une réserve naturelle protégée par le gouvernement, n’est pas accessible au public. L’espace est le domaine de divers plantes et d’animaux, notamment les tortues de mer, qui viennent y cacher leurs œufs. Et il semble que cette année, environ 700 bébés tortues verront le jour et prendront le large à partir de l’immense étendue de sable blond du Liban-Sud. Tyr a toujours été une ville de pêcheurs et de marins. Les stèles de la nécropole antique en sont témoins. Et le goût du poisson frais de Tyr est inégalable. Une promenade au vieux port de la ville, «navire d’une parfaite beauté», toujours selon Ézéchiel, est de rigueur. Le jour et la nuit vous rencontrerez des marins qui plient et déplient leurs grands filets avant de prendre le large et qui proposent à la vente de la marchandise fraîche. Le cachet du quartier chrétien C’est ce port qui délimite le quartier chrétien de la ville ; le seul secteur ayant préservé son cachet ancien avec ses bâtiments à deux étages, ses maisons à poutres construites au début du siècle dernier, et ses ruelles étroites dont certaines sont uniquement piétonnes. Depuis des années, bien avant la guerre du Liban, Tyr, l’une des premières terres christianisées du monde, a été désertée par ses chrétiens, à majorité grecs-catholiques. C’est bien dans cette cité cananéenne que le Christ s’était rendu pour prêcher et c’est à quelques kilomètres de là, à Cana, qu’il avait fait son premier miracle. Mais comme toutes les régions périphériques du pays, la ville a plusieurs manques à gagner, notamment sur le plan de l’éducation, de l’emploi et des loisirs. Ceux qui ont décidé de s’installer ailleurs et de revenir dans leur ville natale l’espace d’un week-end, d’un été, d’un mariage, ou d’un enterrement sont initialement partis pour assurer des études scolaires et universitaires et un meilleur avenir à leurs enfants. Dans cette ancienne cité phénicienne du Liban-Sud, l’on affirme que jamais chrétiens et musulmans ne se sont disputés pour des raisons politiques ou religieuses. Et la plupart se souviennent d’un évêque grec-catholique, Georges Haddad, originaire du Metn, qui avait sauvé tous les habitants de la ville du désastre, en 1982, à l’issue de l’invasion israélienne. Prévenu que Tyr et ses habitants allaient être bombardés l’armée israélienne, l’évêque, équipé uniquement d’une grande croix de procession, a marché jusqu’au premier tank et négocié des heures durant. Il a réussi à persuader les généraux d’Israël à revenir sur leur décision en trouvant un compromis: en l’espace de deux heures, la ville a été vidée de ses habitants qui ont trouvé refuge sur l’immense plage; au lieu de détruire toute la cité, les soldats israéliens se sont contentés de perquisitionner quelques maisons. À Tyr, ville tolérante du Sud, on célèbre d’une manière particulière la fête de la Sainte Croix. Il y a bien longtemps, le 14 septembre marquait la fin de l’été. Les habitants de la ville côtière faisaient donc leurs adieux à la mer. Actuellement, même si on se baigne jusqu’à la mi-novembre, la tradition est préservée. La veille du 14 septembre, tout le monde se retrouve sur la plage de galets, située dans le quartier chrétien de la ville, pour faire la fête. On se baigne en pleine nuit, l’on jette des fleurs dans les flots dans l’espoir de retrouver la mer l’année suivante et l’on prie pour le repos de l’âme de ceux qui ont été à jamais emportés par la grande bleue. Une grande bleue qui a fait toute la puissance et la splendeur de Tyr dans l’Antiquité. Sur les rivages de la cité, on teintait les étoffes de pourpre, et l’on embarquait, entre autres, le bois de cèdre pour d’autres destinations. Avec ce noble matériau, les bâtisseurs de Tyr s’étaient rendus à Jérusalem pour construire le temple de Salomon. Ce petit lopin de terre a donné son nom au vieux continent ; Europe n’était autre qu’une princesse de la ville ensorcelée et enlevée par le puissant Zeus. Trêve d’histoire ancienne et de vestiges qui ont été appréciés, à leur juste valeur, en 1980: la ville du Liban-Sud fait partie, depuis 22 ans, du patrimoine mondial de l’Unesco. Actuellement, Tyr, bercée par les vagues, se repose paisiblement face aux flots. Une autre forme de splendeur qui vaut peut-être autant que la gloire du passé. «Al-Fanar», une charmante auberge face à la mer L’idée leur est venue il y a quatre ans quand des touristes européens, qui n’avaient pas trouvé de chambre vide dans l’unique hôtel de Tyr, ont passé la nuit chez eux. Les Salha, Raymond, Amal et leur fils Walid, ont décidé de transformer leur vaste maison en auberge. Bâtie initialement sur deux étages au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, la demeure fait face à la mer et à l’ancien phare de la ville, construit sous le mandat français. Bien des choses ont changé depuis la visite des premiers touristes qui avaient dormi au salon, dans leur sac de couchage. L’auberge, située dans le quartier chrétien de Tyr et baptisée al-Fanar (le phare), a ouvert ses portes en l’an 2000. Elle compte sept coquettes chambres (une quinzaine de lits) et deux restaurants, dont l’un est situé sur une terrasse donnant directement sur la mer. Un pub, installé dans les anciennes caves de la maison, ouvrira prochainement ses portes. En retapant les caves, les Salha ont découvert d’authentiques meurtrières dans les murs et un impressionnant puits. Des constructions qui dateraient de l’époque des croisés. Depuis l’ouverture de l’auberge, la maison, avec ses six mètres de hauteur sous plafond, ses balustrades en vieux fer forgé, ses escaliers en pierre, fait peau neuve. Et les projets vont crescendo. Raymond et Amal ne se sont jamais installés définitivement hors de Tyr, se déplaçant entre leur maison au Liban-Sud et leur appartement de Beyrouth. Le record d’exil battu remonte à juin 1982 : ils ont été bloqués trois semaines dans la capitale au début de l’invasion israélienne. Leur fils, Walid, qui a suivi des études d’architecture à Paris et qui a travaillé durant huit ans à Beyrouth, est finalement rentré dans sa ville natale en 1997. Un an plus tard, il a installé un cabanon sur la plage sablonneuse, qui s’étend sur douze kilomètres. L’endroit, ouvert jusqu’aux heures tardives de la nuit, est principalement fréquenté, notamment en week-end, par des étrangers et des Beyrouthins. Tout a fonctionné par le bouche-à-oreille. De petites publicités dans des guides touristiques étrangers et un site Internet ont également fait l’affaire. Les restaurants et les chambres d’al-Fanar reçoivent aussi des groupes de touristes d’importantes agences de voyages libanaises. L’auberge, ses lits et ses restaurants, le cabanon, ses chaises longues et ses tables affichent complet en fin de semaine. Et une réservation pour l’abordable et charmant Bed and Breakfast est de rigueur. De plus, au bord de la mer ou à la maison, vous serez très bien accueillis. Pour plus d’informations, consultez l’adresse Internet alfanar@ville-tyr.com ou contactez les numéros suivants : 07/741111 – 03/665016. Patricia KHODER
Douze kilomètres de sable blond. Une mer limpide aux couleurs qui changent selon les heures de la journée. Et une plage où l’on marche des dizaines et des dizaines de mètres vers l’horizon sans jamais perdre pied. Cela n’est pas de la fiction et l’on est bel et bien au Liban, à 85 kilomètres au sud de Beyrouth, exactement. Tyr. Tyr, une ville «comblée et alourdie au...