Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

L’Irak, nouveau sujet d’inquiétude pour Beyrouth comme pour la région

Il y avait Chebaa, il y a eu Ramallah, il y a maintenant l’Irak. Étrangement, plus le danger se fait lointain, plus il semble mortel. À Beyrouth, tout le monde ou presque convient qu’une guerre américaine contre Saddam risque de disloquer la région tout entière. Selon un ancien diplomate, il est pratiquement certain qu’en tout état de cause, la politique de Washington à l’encontre de Bagdad va déterminer le sort global du Moyen-Orient. Et cela, bien plus que les convulsions dans les Territoires. Une telle situation de bouleversement historique en gestation nécessite une sérieuse mobilisation de la part des Arabes. Et l’ancien ambassadeur exhorte dans le même esprit les Libanais, dirigeants en tête, à laisser de côté les vétilles pour s’unir afin de parer à toute éventualité. Le contentieux irako-américain a par ailleurs figuré au centre d’un colloque informel qui a regroupé nombre de députés, de politiciens, de journalistes et de politologues. Les participants ont sérié les questions de la sorte : – Le président Bush fixera-t-il le timing des frappes contre l’Irak pour avant ou pour après les élections législatives américaines d’automne ? Son staff est partagé sur ce point. Certains soutiennent qu’il faut attendre, pour que les opérations militaires ne fassent pas perdre les républicains, comme Bush le père avait perdu face à Clinton, malgré la victoire dans le Golfe. D’autres pensent qu’il faut au contraire aller vite en besogne, pour exploiter électoralement la chute annoncée de Saddam Hussein. – Qu’arriverait-il si le blitzkrieg envisagé devait échouer et si le régime irakien tenait bon ? Que se produirait-il ailleurs si les masses arabes se soulevaient pour soutenir Bagdad ? Y aurait-il une vague d’anarchie dans le monde arabe, comme le prédit le ministre jordanien des Affaires étrangères, Marwan Moacher ? – Que faire si, après avoir renversé Saddam, les Américains se montraient incapables de le remplacer par un régime fort ? En d’autres termes, comment empêcher une partition de l’Irak entraînant une réaction en chaîne dans les pays avoisinants et se soldant par une dislocation de la région ? – Sur le plan pétrolier, essentiel pour l’économie de la planète entière, quels seraient les effets d’une attaque américaine contre l’Irak ? N’y aurait-il pas un risque de réduction de la production, et d’inflation des prix, si les opérations devaient durer et si des puits étaient détruits ? – Y a-t-il une possibilité que Washington finisse par opter pour une politique donnant la priorité à un changement en Iran, où cela serait plus facile qu’en Irak, selon les défenseurs américains de cette thèse ? –Washington s’obstinerait-il à agir même sans couverture de l’Onu et sans l’appui de ses alliés traditionnels dont la plupart sont contre l’option militaire ? Le ferait-il même si l’Irak acceptait le retour des inspecteurs ? Le président Bush peut-il convaincre les autres capitales et sa propre opinion de la nécessité d’une telle guerre ? Peut-il en expliciter d’une manière convaincante les résultats et en justifier le coût prohibitif ? Peut-il passer outre au concert des nations qui condamne l’aventure militaire comme une grave erreur aux retombées dangereuses pour la stabilité régionale ? – Les États-Unis peuvent-ils miser sur un putsch militaire ou un révolution populaire en Irak pour se débarrasser de Saddam ? Ces questions appellent diverses réponses. Mais, pour l’ancien diplomate cité plus haut, il ne fait aucun doute que Washington a déjà pris sa décision de principe. Et qu’il ne lui reste plus qu’à déterminer la forme, le timing, le volume, l’appareil technique de son attaque contre l’Irak. À son avis, les USA pensent que par le biais de l’Irak, ils peuvent modifier le cours des choses à leur avantage comme à celui des Israéliens dans les Territoires. Ce serait donc une sorte de fuite en avant, face à l’échec des efforts visant à relancer le processus de paix. Surtout que le pétrole est en jeu. Cette personnalité relève à ce propos que les Américains sont intervenus pour régler le conflit au Soudan, à cause de l’or noir. Et ils tentent de s’interposer entre Israéliens et Palestiniens non pas au bénéfice de la paix, mais pour réduire la pression de ce qu’ils appellent le terrorisme. C’est ce même objectif, conclut l’ancien diplomate, qu’ils recherchent en Irak. Émile KHOURY
Il y avait Chebaa, il y a eu Ramallah, il y a maintenant l’Irak. Étrangement, plus le danger se fait lointain, plus il semble mortel. À Beyrouth, tout le monde ou presque convient qu’une guerre américaine contre Saddam risque de disloquer la région tout entière. Selon un ancien diplomate, il est pratiquement certain qu’en tout état de cause, la politique de Washington à...