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Actualités - REPORTAGE

Outre-mer...Georges Irani, « pessimisme de l’intellect et optimisme de la volonté »(photo)

Il existe des individus dotés d’un optimisme tenace et pas forcément facile, qui tentent à leur façon souvent abstraite d’ajouter leur grain de sable à la montagne sacrée de la réconciliation. Georges Irani fait partie de ces gens qui croient en une noble idée de la terre, de l’individu et du dialogue. C’est un peu grâce à ces quelques idéalistes que l’on peut encore construire, dans nos têtes déjà, des châteaux en Espagne, mais surtout au Liban. Un faux air de Graucho Marx, la moustache, peut-être ou le sourire un peu flegmatique et rêveur, une pointe de cynisme qui refuse la dramatisation à outrance et des gestes pressés qui accompagnent ses explications, nombreuses. Lorsqu’il avoue, « la joie de vivre méditerranéenne mêlée au pragmatisme anglo-saxon constitue pour moi un monde idéal » il illustre parfaitement ce qu’il est et ce qu’il pense. Georges Irani, malgré cet accent ramené de ses nombreux exils, n’a rien perdu de son attachement pour la terre mère qu’il a quittée il y a plus de trente ans. Pour faire des études d’abord, il a obtenu une licence en sciences politiques à l’Université de Milan, une maîtrise puis un doctorat en relations internationales à l’Université de Southern California, et pour faire une vie. Pourtant, ses nombreux objectifs, son travail de réflexion et d’enseignement et ses incessantes interventions à travers le monde tournent autour du Liban. « Ce qui motive le plus mon travail, c’est mon amour pour le Liban malgré tous les défis et les péripéties vécus, et cette amertume de voir que ce pays, “ un message pour l’humanité ”, n’arrive pas à être ce qu’il devrait être, un modèle de brassage de cultures, surtout après le 11 septembre. » « Lorsque je me présente, poursuit-il avec ce même sourire, je dis que je suis un juif catholique islamisé. » C’est en fait de tolérance que ce monsieur tient le plus à parler, et de rapprochement. Un combat dans lequel il s’est engagé depuis des années avec pour seules armes des recherches, des études, des parutions et un travail ponctuel sur le terrain pour tenter de réunir un peuple encore séparé par le souvenir de la guerre. « Au Liban, nous n’avons pas eu de processus de réconciliation, à la différence d’autres pays. Nous devons faire le jugement du passé, qui est responsable de la disparition ou de la mort de ces centaines de milliers de personnes ? Tant que cette blessure n’est pas fermée, je pense que la guerre civile n’est pas complètement finie. » Le dialogue intercommunautaire Durant ces longues années d’interrogations, qui sont loin d’être finies, Georges Irani a beaucoup pensé, parlé, d’incessantes conférences dans le monde avec pour thèmes le processus de réconciliation au Moyen-Orient, le pardon, la paix au Liban, les défis des chrétiens du Moyen-Orient ou encore le fondamentalisme dans cette même région. Il a également publié de nombreux travaux, dont sa thèse de doctorat sur le « Rôle du Vatican au Proche-Orient, » suivie en 1990 par « Le Saint-Siège et le Proche-Orient. » Professeur à l’US Institute of Peace, à Washington College puis à la Royal Roads University au Canada où il réside actuellement, « une université virtuelle » dans laquelle il enseigne l’analyse et la résolution des conflits, il entame ses recherches sur ce sujet qui le hante, le rituel de réconciliation. Avec le Dr Hratch Gregorian, président d’une ONG à Washington, il tente de faire des propositions concernant le rapprochement des différentes communautés. « L’idée est de consolider le sentiment de citoyenneté chez le Libanais en tant qu’individu et créer une espèce de civisme. » Pour ce faire et concrétiser le projet sur le terrain, le groupe de travail à choisi de réunir trois villages du Chouf encore blessés par la guerre. « La première étape consiste à établir un dialogue intercommunautaire entre les déplacés et les résidents des villages à travers des réunions séparées. Le processus à suivre pour arriver à la réconciliation commence par l’aveu, puis l’excuse, la compensation morale et matérielle et enfin le pardon. » Pour en arriver là, le chemin est long, il passe par le Liban, les États-Unis, le Canada et l’Europe. Mais George Irani ne désespère pas. « Mon adage préféré ? Le pessimisme intellectuel et l’optimisme de la volonté. » Carla HENOUD
Il existe des individus dotés d’un optimisme tenace et pas forcément facile, qui tentent à leur façon souvent abstraite d’ajouter leur grain de sable à la montagne sacrée de la réconciliation. Georges Irani fait partie de ces gens qui croient en une noble idée de la terre, de l’individu et du dialogue. C’est un peu grâce à ces quelques idéalistes que l’on peut encore...