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Actualités - INTERVIEWS

Interview - L’ancien président de la Chambre rejette l’idée d’un compromis Hussein Husseini : Le 1er septembre, l’État devrait gérer le réseau GSM avec les structures des deux sociétés(PHOTO)

«L’actuel gouvernement est mort et on attend que la date des obsèques soit fixée. Tout ce qui se passe actuellement vise à détourner l’attention générale du vrai problème de l’endettement de 32 milliards de dollars et du rapport de la Cour des comptes publié en 1999 sur le secteur de la téléphonie mobile, qui réclamait aux deux sociétés la publication des chiffres réels de leurs revenus. » Hussein Husseini n’a jamais été tendre avec le gouvernement et son président, mais cette fois, son indignation est d’autant plus grande que la situation est grave. Il ne parvient plus à surmonter sa colère face à ce qu’il considère comme une violation constante des lois et de la Constitution. Mais, chez lui, la colère ne se traduit jamais par des insultes, comme c’est le cas chez de nombreux politiciens. Il développe ses arguments calmement et, pour lui, à partir du 1er septembre, l’infrastructure des deux sociétés devrait passer à l’État, tout compromis ne pouvant que nuire à ce dernier et donc aux citoyens. Entre la carte du Liban datant de la fin du XIXe siècle – dont il est très fier – et les schémas démographiques qui ornent les murs de son bureau, à côté du document de l’entente nationale, Hussein Husseini a constamment en tête les problèmes de ce pays. Il cherche inlassablement de nouveaux arguments, de nouvelles idées, et rien ne semble le décourager, ni le marasme actuel ni l’absence visible d’issue. Ayant suivi depuis le début le contentieux de la téléphonie mobile, il est l’un des rares à avoir les idées très claires sur ce sujet. La grande histoire d’une petite phrase Selon lui, la clé du problème réside dans le rapport de la Cour des comptes de 1999, dans lequel il était demandé aux deux sociétés de cellulaire de dévoiler leurs chiffres d’affaires réels. Ce qui n’a jamais été fait et, en 2001, lorsque l’actuel gouvernement a rompu le contrat avec les deux sociétés, ce sont celles-ci qui ont réclamé des indemnités, faisant oublier ce qu’elles devaient à l’État. Pour Husseini, ce n’est pas un hasard, mais un plan bien étudié, qui s’est concrétisé par les rumeurs que le gouvernement a fait circuler, laissant entendre que les deux sociétés peuvent continuer à gérer le service, en attendant l’aboutissement de l’adjudication et des enchères. « Le président du Conseil a introduit une petite phrase en ce sens, à l’insu des ministres, au texte renvoyant au Parlement le projet d’adjudication. C’est de la fraude pure et simple, puisque le rajout a eu lieu un mois après l’adoption du texte par le Conseil des ministres. Il n’a donc aucune valeur légale. » Pour Husseini, confier la gestion aux deux sociétés pour une période transitoire exige un nouveau contrat, basé sur une nouvelle loi. En attendant, tout le secteur devrait revenir à l’État. Husseini précise que cette disposition était prévue dans le contrat établi en 1993, avec les deux sociétés, puisqu’au bout de dix ans, toutes les structures devaient être remises à l’État. Rompre le contrat deux ans avant son expiration n’annule pas cette clause et elle doit donc s’appliquer à partir du 31 août, même si, toujours selon Husseini, la rupture était une erreur. Mais désormais, elle est un fait accompli. L’ancien président de la Chambre affirme qu’au lieu d’axer la polémique sur la légalité ou non du cahier des charges établi par le ministre des Télécommunications, il faudrait essayer de connaître les véritables ressources des sociétés, pour savoir si l’adjudication sera dans l’intérêt de l’État ou non. Au passage, Husseini salue l’ancien président du Conseil, Omar Karamé, qui, selon lui, a remis les pendules à l’heure, en rappelant qu’il est indispensable de connaître les revenus des deux sociétés, pour avoir une idée précise de ce que peut rapporter le secteur. Selon Husseini, il faut donc avoir accès aux comptes des deux sociétés, remettre sur le tapis une plainte au parquet du ministre des Télécommunications, lui demandant d’enquêter sur d’éventuelles malversations de la part des sociétés, comme cela figure dans le rapport de 1999 et faire une étude comparative entre les prix fixés par les sociétés au Liban et ceux qui ont cours dans les autres pays. Les sociétés de cellulaire, plus puissantes que l’État Husseini rappelle avoir déclaré, dans un discours au Parlement, que le budget de l’État est de 6 milliards de dollars, dont trois sont consacrés à l’intérêt de la dette. Le reste est partagé entre les salaires et les dépenses obligatoires. Il reste entre 200 et 300 millions de dollars pour tout l’État. Dans ces circonstances, les deux milliards de dollars que peut rapporter le secteur de la téléphonie mobile sont une véritable aubaine. « C’est pourquoi, ajoute-t-il, le cellulaire est plus puissant que l’État. C’est d’ailleurs ainsi que naissent les Républiques bananières, lorsque les sociétés privées mettent l’État à leur service ». Husseini critique la médiation effectuée par le président de la Chambre. Selon lui, ce n’est pas dans l’intérêt du pouvoir législatif que son chef cherche à rapprocher ainsi les points de vue, bafouant au passage le principe de séparation des pouvoirs. « L’idée d’un compromis entre les pouvoirs ne peut se faire qu’aux dépens de la Constitution, et donc de l’intérêt général. Ce n’est plus de l’entente, mais de la complicité ». Pour lui, il ne faut donc pas craindre le 31 août, mais rendre à l’État ce qui lui appartient. Husseini se désole du rejet par le Conseil constitutionnel du recours contre la loi sur les cellulaires qu’il avait présenté avec quelques collègues. D’après lui, le cahier des charges est partie intégrante de la loi, selon la Constitution, puisqu’il comporte des clauses contractuelles qui portent sur les relations des sociétés avec l’État et des clauses administratives qui portent sur les droits des usagers. D’ailleurs, une commission d’experts, présidée par l’ancien ministre Joseph Chaoul, a estimé que le recours était recevable, mais le Conseil constitutionnel, contrôlé par l’autorité politique, en a jugé autrement, estime-t-il. Husseini évoque aussi le recours du ministre de la Justice au service du contentieux (organisme consultatif) qui relève de son propre ministère. Selon lui, c’est une procédure illégale, puisque c’est au ministre spécialisé de demander un avis ou une consultation à ce service et, de toute façon, il ne s’agit pas d’un recours à un organisme juridique, puisqu’il fait partie de l’appareil exécutif. Enfin, Husseini estime qu’un changement de gouvernement est indispensable. « Ce n’est pas une question de personne, mais il faut remplacer ce gouvernement par une équipe ayant un plan d’action. Il faut cesser de violer la Constitution, en réduisant le gouvernement à une personne. En tout cas, pour moi, mon conflit avec le président du Conseil n’est pas une affaire personnelle. Qu’il abandonne les trois secteurs qui m’inquiètent : le cellulaire, Sukleen et la société foncière, et je suis prêt à lui donner ma confiance ». Scarlett HADDAD
«L’actuel gouvernement est mort et on attend que la date des obsèques soit fixée. Tout ce qui se passe actuellement vise à détourner l’attention générale du vrai problème de l’endettement de 32 milliards de dollars et du rapport de la Cour des comptes publié en 1999 sur le secteur de la téléphonie mobile, qui réclamait aux deux sociétés la publication des chiffres...