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Actualités - OPINION

Un conflit aigu, qui reste cependant limité par des interdits politiques

Selon un professeur français, cité dans un article de Ghassan Tuéni, le président Lahoud, rencontrant un groupe de Libanais dans un café de la Côte- d’Azur, leur aurait déclaré que le chef du gouvernement se trouverait bientôt, très bientôt même, contraint au départ. Ajoutant, d’après le même témoin, qu’à ce moment cesseraient ces scandales dont le pays est saturé. Et qu’il importe peu que la livre soit dévaluée. Mais les cercles proches de Baabda démentent que le président ait pu s’exprimer de la sorte. À les en croire, il est inimaginable que M. Lahoud évoque les conflits interprésidentiels, pour indéniables qu’ils soient, en public dans un café. Pour le fond, le ministre de l’Information, Ghazi Aridi, médiateur et analyste, souligne qu’il existe une équation incontournable. Le chef de l’État est constitutionnellement inamovible le long de son mandat. Et le chef du gouvernement est politiquement intouchable. Dès lors, il n’est pas possible de pousser un litige à sa dernière extrémité, entendre à l’éviction de l’un ou de l’autre. D’où le ministre déduit qu’ils sont condamnés à s’entendre. Cependant, certains continuent à réclamer un nouveau cabinet qui serait d’union nationale. La plupart n’ont pas d’objection à ce que cette formation soit également dirigée par le président Hariri. À condition qu’il n’en soit pas le potentat. Et qu’on en modifie la balance de composition. Mais d’autres exigent que l’on fasse appel à un nouveau Premier ministre. En expliquant que c’est la seule façon de résoudre un problème qui tient tout entier dans les rapports entre MM. Lahoud et Hariri. Une solution que des pôles rejettent. En rappelant que la mise à l’écart du leader sunnite, dont l’assise politique est aussi large que solide, provoquerait sans doute une crise majeure, probablement insoluble. Ces personnalités estiment du reste que changer de gouvernement en gardant M. Hariri ne modifierait probablement pas le rapport de forces au sein du Conseil des ministres. Car il faudrait nécessairement assurer des places au sein du cabinet aux grands blocs parlementaires. Dont celui de M. Hariri et ceux de ses alliés à la Chambre. Et il ne serait sans doute pas possible de disposer d’une majorité opposée au Premier ministre, afin que l’on puisse régler les litiges par vote. Contrairement à ce qui se passe aujourd’hui, où la procédure est bloquée. En d’autres termes, selon ces pôles, il est inutile de provoquer une crise ministérielle puisqu’au fond rien ne risque de changer. Il ne pourrait donc y avoir, au mieux, qu’une opération cosmétique. L’occasion, peut-être, pour les formations représentées, d’effectuer une rotation entre leurs cadres. Ces groupes, rappelons-le, sont les blocs de MM. Hariri, Berry et Joumblatt, le PSNS, le Baas, le bloc parlementaire arménien, en sus de figures de proue comme M. Sleiman Frangié. Élargir l’éventail de la représentation, pour mettre sur pied un cabinet qu’on pourrait doter du label d’union nationale, est presque impossible. Il faudrait choisir les impétrants, en évinçant nombre de prétendants ; et, du même coup, sélectionner les sortants, car il n’y a pas de place pour tout le monde. Par ailleurs, on ne peut plus en pratique recourir à l’ancienne voie de sortie qui consistait à faire appel à des géants. Pour la bonne raison qu’il n’y en a plus. Ou, plus exactement, que s’il s’en trouve quelques-uns à l’Ouest, on ne peut pas leur décliner de pendants en face. Il est donc révolu le temps où la communauté maronite, par exemple, pouvait présenter des leaders de la stature de Camille Chamoun, Sleiman Frangié, Pierre Gemayel ou Raymond Eddé. Aujourd’hui, on cherche en vain, bien souvent, une quelconque légitimité incontestable de délégation politique. Ainsi, un ministre se demande quelle serait la réaction du président Amine Gemayel, qui est à la tête d’un mouvement de base, si les Kataëb devaient être représentés par la direction que préside M. Karim Pakradouni. Le même ministre ajoute qu’il faudra décider, choix délicat, si le Bloc national et le PNL, par exemple, doivent être présents au détriment de certaines personnalités maronites indépendantes comme Nassib Lahoud, Boutros Harb, Sleiman Frangié, Khalil Hraoui, Jean Obeid, Robert Ghanem, Farès Boueiz, etc. Bref, c’est un casse-tête chinois. Et, pour tout arranger, il faudrait que tout ce monde, venu d’horizons si opposés, s’entende sur un même programme gouvernemental. Et se mette d’accord sur des questions aussi épineuses que les relations avec la Syrie, le Sud, les camps palestiniens, l’abolition du confessionnalisme politique, les naturalisations, la décentralisation administrative. Et le code électoral. Émile KHOURY
Selon un professeur français, cité dans un article de Ghassan Tuéni, le président Lahoud, rencontrant un groupe de Libanais dans un café de la Côte- d’Azur, leur aurait déclaré que le chef du gouvernement se trouverait bientôt, très bientôt même, contraint au départ. Ajoutant, d’après le même témoin, qu’à ce moment cesseraient ces scandales dont le pays est...