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Actualités - OPINION

Pas d’arbitrage... mais des « conseils » syriens pressants

La sémantique, c’est l’art des nuances. Les loyalistes de tous bords (formule contradictoire qui en dit long par elle-même), se retrouvent pour chanter les louanges de l’actuelle retenue syrienne. Dans ce sens que les frères, sans doute écœurés des tâches ménagères que leurs poulains leur infligent depuis des années, ont cette fois décidé de s’en laver les mains. Ils n’interviennent donc pas dans la quête directe d’un arrangement entre leurs bons amis libanais sur le dossier du cellulaire. D’autant qu’ils ne souhaitent pas tremper dans une affaire de gros sous, pour ne pas être accusés de favoriser les entreprises, ou les sociétés, des uns, des autres et des troisièmes. Mais, fraternellement, ils prodiguent des conseils conciliatoires sinon rudes du moins pressants. En invitant sévèrement les protagonistes à faire montre de plus de maturité. Pour régler les choses au mieux. Et, surtout, au plus vite, car la situation régionale reste volcanique. Ce qui nécessite une mobilisation à plein du potentiel multiforme de soutien libanais. Ainsi qu’une stabilité intérieure à toute épreuve. Apaisement que commande aussi la fragilité économique du pays. Les Syriens veulent donc que le jeu se calme. Mais ne lancent pas de diktat précis. Ils s’en remettent, côté mécanismes, à la médiation (la deuxième du genre dans la même affaire) qu’entreprend le président Berry. Avec le concours actif de plusieurs pôles, dont le ministre Ghazi Aridi. Notoirement, mais officieusement, mandaté par Damas, le président de l’Assemblée nationale se trouve ipso facto agréé comme juge de paix par les deux parties en conflit. Comme sa démarche bénéficie du soutien moral des démiurges, de leur bénédiction en somme, peu d’observateurs doutent de sa réussite finale. Dans un premier temps, l’ombudsman désigné a procédé en auditeur attentif. Il a recueilli les arguments de l’équipe haririenne ainsi que du ministre des Télécoms, Jean-Louis Cardahi, fer de lance in situ du camp lahoudiste. Plusieurs rencontres alternées ont permis de dégager un éventail assez élargi de suggestions. Fondées, bien entendu, sur la loi promulguée à l’issue de la première médiation berryiste. Ces idées, le président de la Chambre les garde pour le moment par-devers lui, préférant n’en rien divulguer avant de les avoir exposées au chef de l’État à son retour de congé. Du côté du ministre Cardahi, on confirme qu’il campe sur ses positions. Qu’il s’en tient à la lettre de la loi 393 et du décret 8 206, surtout en matière de délais. Il se propose de développer son plan d’action jeudi devant le Conseil des ministres. Son objectif reste, ajoutent ses proches, qu’à la date 31/8 le contrat BOT conclu avec LibanCell et Cellis prenne effectivement fin. Pour que le secteur du mobile revienne à l’État. Peu lui chaut ensuite, affirment ses confidents, quel pourrait être l’organisme qui ferait fonctionner le réseau, du moment que cela serait pour le compte de l’État, destinataire unique des redevances. Pour le ministre, il ne peut y avoir d’adjudication ou d’enchère tant que le portable n’est pas de fait entre les mains, et sous la direction de l’État. Tout en affirmant qu’il ne compte pas polémiquer, ses proches indiquent qu’il a la ferme intention de bien s’expliquer face à l’opinion publique. Et de répondre fermement à toutes les critiques, à toutes les attaques dont il se considère l’objet. Du côté des haririens, on répète que le dossier a été politisé à dessein. On impute au ministre Cardahi la responsabilité des entraves. En lui reprochant d’agir suivant les directives de Baabda et non du Sérail, alors qu’il est membre du cabinet. On affirme que l’intéressé a dévié exprès le problème, malgré tout le soutien reçu initialement de la part du président du Conseil. Qui, précisent ses partisans, a de fait décidé de prendre directement les choses en main. Ce qui signifie que, passant outre aux vues du ministre, M. Hariri a l’intention de soumettre au Conseil des ministres de jeudi son propre programme. Lui aussi a préféré ne pas révéler les grandes lignes de ce plan avant de les avoir exposées au chef de l’État. Sinon par courtoisie républicaine, ou par fair-play, du moins pour qu’on n’aille pas l’accuser d’avoir tiré dans le dos. Une sage réserve qui fait les affaires du président Berry. Car cela lui donne trois jours pleins, d’ici à jeudi, pour arriver à un compromis. Avec l’aide, répétons-le, du ministre Aridi qui effectue une incessante navette entre son collègue des Télécoms, le Sérail et la résidence du médiateur en chef à Aïn el-Tiné. Et si d’aventure ces efforts n’aboutissaient pas ? Alors la balle serait dans le camp du Conseil des ministres. Une chose est presque sûre, d’après les professionnels : en dépit des règles constitutionnelles, l’affaire du cellulaire ne sera pas mise aux voix. Parce que le régime, échaudé par les précédentes expériences de Solidere et de Sukleen, ne favorise pas le recours à la procédure de vote. Ses partisans expliquent, un peu laborieusement, que ce n’est pas du tout parce qu’il ne dispose pas d’une majorité au Conseil. Mais parce que dans ce pays composite, tout ce qui ne se fait pas par consensus représente un danger d’explosion ou de césure irréparable. Cela étant, M. Hariri convient lui aussi, pour le cellulaire, qu’il faut un consensus. Philippe ABI-AKL
La sémantique, c’est l’art des nuances. Les loyalistes de tous bords (formule contradictoire qui en dit long par elle-même), se retrouvent pour chanter les louanges de l’actuelle retenue syrienne. Dans ce sens que les frères, sans doute écœurés des tâches ménagères que leurs poulains leur infligent depuis des années, ont cette fois décidé de s’en laver les mains....