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Actualités - CHRONOLOGIE

MUSIQUE Parution de « Cheftak », le troisième album du duo électronique libanais, en concert ce soir place de l’Étoile Soap Kills, le talent de la contradiction(photos)

Deux mots, deux sensations différentes, presque contradictoires : Yasmine Hamdane et Zeid Hamdane sont – presque – à l’image de leur nom de scène, Soap Kills (le savon tue). Né en 1997, ce duo se range dans une catégorie à part du paysage musical local : l’électronique arabe. Tellement à part d’ailleurs, que leurs compositions ne sont jusque-là appréciées que par un public restreint : trop « électro » pour l’audience arabophone, trop « arabe » pour les amateurs de musique occidentale. À l’instinct Pourtant, le mélange vaut largement le détour : les deux membres du groupe composent et chantent en même temps qu’ils réinterprètent à leur manière des morceaux oubliés du répertoire de la chanson arabe. Troisième caractéristique : leur apprentissage de la musique s’est façonné hors des sentiers balisés du solfège et du conservatoire. Pour eux, il s’agit plus de fonctionner « à l’instinct » et, comme le leur est bon, le résultat est plus qu’attrayant pour les oreilles qui aiment être un peu bousculées dans leurs habitudes auditives : c’est Cheftak, le troisième album du groupe, après Lost en 1997 et Bater en 2000. Commentaire immédiat de Zeid Hamdane : « C’est le dernier album des Soap Kills en train d’enregistrer tout seuls dans une chambre ». Pour en savoir plus sur la nouvelle direction musicale du duo, ils répondent en chœur : « Assistez aux concerts », ce qui tombe bien, puisqu’ils se produisent ce soir à 21h, place de l’Étoile, à l’occasion de la Fête de la musique. Solennité déconstruite Mais si Cheftak, c’est déjà loin pour les Soap Kills, il n’en reste pas moins que ces huit titres, d’une durée totale de 30 minutes, sont, une fois de plus, une réussite, qui comprend les faiblesses, les hésitations d’un groupe autoproduit depuis le début. Dans cet album, un mot domine : l’intimité. « Contrairement aux deux autres enregistrements où nous avons travaillé avec d’autres musiciens, celui-ci s’est recentré sur nous », dit Zeid Hamdane. Aranis, le délicieux morceau d’ouverture, donne le ton : guitare acoustique et voix susurrée pour raconter les cris et les bruits de la ville, auxquels est greffée une autre chanson, issue des souvenirs de Yasmine Hamdane et qui évoque la vie du Beyrouth des années 40, « quand les jeunes filles regardaient passer les marins français dans les souks », expliquent les deux musiciens, dont l’amour pour les chansons arabes les pousse à dénicher des airs totalement ignorés, hors du cercle clinquant de la variété. C’est le cas de Tango, le troisième morceau : totalement réorchestré à la sauce électronique, la voix grave de Yasmine Hamdane donne à l’ensemble une solennité déconstruite : les contradictions se poursuivent en se nourrissant l’une de l’autre. Paroles d’humour et du quotidien La nervosité du tempo, la puissance de la basse et la voix électronisée de Zeid Hamdane sont le pendant essentiel des sons chaloupés et de la voix « de proximité » de sa partenaire. Exemple abouti de cet état des choses : le quatrième morceau, Kazdoura, où les paroles, toujours très proches du langage quotidien – les Soap Kills chantent en libanais et pas en arabe – , sont remplis d’humour et sans une once de prétention d’auteur, au contraire. Pour preuve Cheftak, le deuxième morceau, une petite mélodie entêtante sur fond de « dub » et Wadih, le sixième morceau, syncopé et nerveux, est très certainement la retranscription d’une conversation avec un des amis du duo. Les trois autres titres, Marcoslow, Dub4me et Rnbullshit sont des instrumentaux où l’inventivité et l’expérience acquise dans le domaine technique sont hautement appréciables. Mais les Soap Kills sont déjà loin sur leur route et ils se prennent à rêver de leur idéal, « la puissance de l’électronique avec la virtuosité du jazz ». En clair, « trouver de bons musiciens et se servir de leur technique pour l’accrocher à notre son », précise Zeid Hamdane. Un duo, aussi insatisfait qu’exigeant avec lui-même, entre désenchantement et rythme énergisant, qui, une fois n’est pas coutume, fait un authentique travail d’auteur-compositeur. À suivre de très près et à découvrir live ce soir. Diala GEMAYEL
Deux mots, deux sensations différentes, presque contradictoires : Yasmine Hamdane et Zeid Hamdane sont – presque – à l’image de leur nom de scène, Soap Kills (le savon tue). Né en 1997, ce duo se range dans une catégorie à part du paysage musical local : l’électronique arabe. Tellement à part d’ailleurs, que leurs compositions ne sont jusque-là appréciées que par...