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FESTIVAL - Un secteur qui jouit d’une santé insolente Bédéistes et « fanzineux » à Angoulême

Le Festival international de bande dessinée (FIBD) d’Angoulême, qui reçoit chaque année plus de visiteurs que le Festival de Cannes, a ouvert en fin de semaine sa 29e édition et a décerné dès le premier jour ses prix. Vitrine d’un secteur d’une santé insolente, à la production en pleine expansion, le festival est pour beaucoup des 200 000 visiteurs l’occasion de voir leurs dessinateurs préférés et ils ne s’en privent pas, s’engouffrant en foule dans les chapiteaux où les éditeurs présentent leurs livres et où les auteurs, forçats de la dédicace, les attendent. Le FIBD, c’est aussi le moment où les lecteurs peuvent admirer les originaux et des dizaines d’expositions sont programmées à cet effet : l’expo vedette consacrée à l’ironie provocatrice de Martin Veyron, grand prix de la ville d’Angoulême 2001 et président de l’édition 2002, d’autres grandes expositions comme celles permettant la découverte de l’ancienne comme la jeune création américaine ou la redécouverte de valeurs sûres comme Loisel, Rochette, Morris, Derib, Carlos Nine, mais aussi des expo dédiées à la BD «alternative». Ainsi, «Trait contemporain», qui regroupe une mosaïque de 76 auteurs du monde entier pour bousculer les codes du neuvième art : ils sont détonants, acides, expérimentaux, ébouriffant les planches sans toujours se soucier de la «belle ouvrage», du dessin léché et des cadrages savants. « Underboom » Encore plus alternatifs, les «fanzineux» ont également envahi Angoulême avec un espace réservé aux œuvres de ces amateurs en recherche mais aussi, pour la quatrième année, un festival off, l’«Underboom», avec spectacles, concerts et happenings underground. Pour les studieux, il y a le «Forum Leclerc». Le partenaire principal du festival, Michel-Edouard Leclerc, anime jusqu’à dimanche une série de rencontres-débats avec les auteurs, conférences thématiques et projections de films (dessins animés ou documentaires où l’on pénètre dans les ateliers de création de BD). Les jeunes désirant se lancer ont eux aussi leur place au FIBD avec l’espace «jeunes talents». Pour la troisième année, les bédéistes en devenir peuvent y recevoir toute l’information sur les filières de formation et voies d’accès aux métiers de l’image et même rencontrer des auteurs chevronnés, leur montrer leurs réalisations et demander conseils. La rue enfin est aux couleurs de la BD avec bateleurs et vendeurs de gadgets. Mais tout ne s’assombrira pas avec la fin du festival, Angoulême en portant l’empreinte toute l’année. Les plaques des rues ont la forme de «bulles», une grande statue de «Lucien» orne un carrefour, le «Marsupilami» trône dans la gare et nombre de murs autrefois aveugles sont peints. Le dernier en date, à inaugurer pendant le FIBD, est l’œuvre de Florence Cestac, grand prix 2000 : quatre étages d’un foyer de jeunes travailleurs où les «Déblocks» à gros nez éclatent de rire et de couleurs vives. Enfin, Florence et Claire Bretécher (la seule autre femme à avoir été grand prix) se sont partagées chacune un côté d’un bus municipal et l’ont décoré à leur fantaisie. Cela aussi est du solide et du permanent. Le palmarès Peinture et bande dessinée se sont heureusement rencontrées lors de ce festival avec l’attribution du prix du meilleur album de l’année écoulée à Christophe Blain pour Isaac le pirate, l’histoire d’un peintre voguant vers le grand sud. Décerné, en grande cérémonie au théâtre de la ville, le jour même de l’ouverture de la 29e édition du FIBD, le palmarès qui récompense les meilleurs albums de l’année écoulée, a donc mis en vedette un jeune homme de 32 ans, révélé d’ailleurs il y a deux ans dans ce même festival quand il obtint le prix du meilleur album réalisé par un jeune auteur pour Le réducteur de vitesse, une histoire de bateau déjà. Choisi par le jury parmi sept «nominés» pour l’Alph’art (nom donné à Angoulême aux prix en hommage au dernier album posthume et inachevé de Hergé) du meilleur album de l’année, Isaac le pirate (Dargaud) raconte les tribulations d’Isaac Sobel, peintre d’enseignes dans le Paris du XVIIIe siècle, et embarqué comme peintre de marine sur un étrange navire pirate dont le capitaine entraîne son équipage hétéroclite vers le «sud du sud», les terres australes les plus inconnues. Le texte désinvolte cache derrière sa légèreté apparente une mélancolie certaine et le dessin est enlevé avec une galerie de tronches inénarrables (dont celle d’Isaac au nez pointu). Christophe Blain s’est souvenu du temps où il était peintre, dans une vie avant la BD, pour la ravissante silhouette et le frais minois d’Alice, jeune fille libre et «fiancée du pirate». Le palmarès 2002 a également primé quatre autres albums dans les autres catégories en lice, mêlant auteurs confirmés et jeunes prometteurs. Ainsi, l’Alph’art du meilleur dessin est revenu à Jacques Tardi pour Le Cri du peuple (Casterman), son adaptation du roman éponyme de Jean Vautrin. Pavés parisiens mouillés, butte Montmartre vierge de tout Sacré-Cœur mais portant fièrement les canons du peuple et Louise Michel en passionaria pour cette histoire à la gloire de la Commune de Paris. L’Alph’art du meilleur scénario a été attribué à Marjane Satrapi, l’Iranienne de Paris, pour Persepolis 2 (l’Association). Autobiographique, l’album raconte l’adolescence de Marjane sous les ayatollahs tenant Téhéran. Marjane, qui a également obtenu cette année le prix France-Info de la meilleure BD d’actualité, avait déjà été primée à Angoulême l’an dernier, prix du meilleur premier album pour Persepolis 1, l’histoire de son enfance. Une mention spéciale scénario (une première) a également été décernée à Rural d’Étienne Davodeau (Delcourt), un BD-reportage, résolument écolo, sur des agriculteurs bios se battant pour leur survie et contre la mondialisation. L’Alph’art du meilleur dialogue fait un détour vers l’Amérique, pays vedette de l’édition 2002, en primant Terrain vague de Kaz (Cornelius). Ce sont des gags en quatre pages à l’humour punk déchiré, très underground. Kaz, dont le dessin rappelle celui de Crumb, travaille aussi pour la revue Raw (cru) celle de Spiegelman, le créateur de Maus. Enfin, l’Alph’art du meilleur premier album est revenu à Matthieu Blanchin pour Le Val des ânes (Ego comme X).
Le Festival international de bande dessinée (FIBD) d’Angoulême, qui reçoit chaque année plus de visiteurs que le Festival de Cannes, a ouvert en fin de semaine sa 29e édition et a décerné dès le premier jour ses prix. Vitrine d’un secteur d’une santé insolente, à la production en pleine expansion, le festival est pour beaucoup des 200 000 visiteurs l’occasion de voir...