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Actualités - CHRONOLOGIES

ART DÉCO - Visite à Beyrouth d’Alain Caradeuc, directeur général d’Hugues Chevalier SA, Paris - Le mobilier H.C. : les valeurs sûres du plaisir

On ne peut s’intéresser au mobilier art déco sans connaître l’entreprise Hugues Chevalier qui fête aujourd’hui ses 26 ans ; ses meubles sont indémodables, pièces uniques ou à série très limitée, authentiques, aux lignes épurées et au finissage parfait. De Lionel Jospin à Madonna, en passant par Claudia Schiffer et Sharon Stone, beaucoup de célébrités goûtent, au quotidien, au confort des canapés Chevalier. Aujourd’hui, Hugues Chevalier coule une douce retraite à Cannes, après avoir vendu sa société au groupe familial Finov (Financière Ogliastro-Vuitton). Quant à la direction générale de la Maison H.C., elle a été confiée, il y a sept ans, à Alain Caradeuc. Un homme très actif, au parcours atypique, qui était de passage à Beyrouth «pour du travail et beaucoup de plaisir», à l’invitation de la boutique Ardeco. Rencontre. Alain Caradeuc connaît bien son sujet qui le passionne depuis de longues années. «J’étais destiné à être banquier. J’ai fait HEC et puis, un jour, j’ai rencontré mon destin. J’y crois, il suffit d’être patient et de vouloir le trouver», affirme-t-il. Il passe d’abord 20 ans dans la mode. C’est lui qui monte la société de Thierry Mugler, dont il sera l’associé pendant six ans. Il travaille ensuite avec Azzeddine Alaïa, Guy Paulin et autres créateurs. Il est aussi, pendant cinq ans, un des responsables européens du groupe Esprit. «Et puis, il y a sept ans, j’ai eu envie de tourner la page, raconte-t-il. J’avais depuis très longtemps de l’intérêt pour le design. M. Chevalier cherchait à prendre sa retraite. Il était en train de vendre sa société aux arrière-arrière-petits-fils de Louis Vuitton. Je suis donc rentré dans cette société que j’ai complètement prise en main. En essayant d’inventer le futur de la Maison, en créant de nouveaux produits et une nouvelle dynamique de marque. Nous avons changé le logo, l’image ; nous avons totalement rénové l’usine, créé un nouveau magasin et ouvert une nouvelle distribution». «Bref, ajoute-t-il dans un sourire, je crois ne pas avoir trahi l’esprit Chevalier depuis que j’y suis». L’art déco, on le sait, a été une période très faste qui, en France, a connu son âge d’or dans les années 30 avec Jean-Michel Frank, Ruhlmann, Dunand, Chareau, Printz… «Lorsque la société Hugues Chevalier est créée en 1976, il s’agissait de répondre effectivement à une sorte de redécouverte de l’art déco de la part de la presse et de la clientèle, parisiennes au départ», explique Caradeuc. Motivée par le désir de pouvoir proposer de nouveaux produits que l’art déco «ancien» n’avait pas exploités, la Maison Hugues Chevalier se lance dans la création de canapés et de fauteuils. «Au départ, l’idée d’Hugues Chevalier était de proposer des canapés dans une inspiration proche de celle qui a permis à l’art déco d’exister, mais en y apportant un côté confortable, une commodité et un côté astucieux qui sont un peu le reflet du temps car à l’époque de l’art déco, c’était surtout le côté représentation que l’on recherchait». Et c’est ainsi qu’est née l’histoire Chevalier. Les derniers des Mohicans La Maison H.C. propose un produit haut de gamme, en série limitée ou à l’unité, dans un registre qui est le sien, à savoir la tapisserie, l’ébénisterie et le travail de laque traditionnels. Or, le design, illustré par le travail de grands designers comme Philippe Stark, est souvent perçu comme des productions répétitives, de masse, mécanisées. Est-ce à dire qu’Hugues Chevalier est un artisan de luxe plutôt qu’un designer ? Pour Alain Caradeuc, «le design est une réponse esthétique et technique à un problème donné. Il peut utiliser des techniques de “mass production” (avec des plastiques injectés, des fonds d’aluminium, des contreplaqués moulés) ou des techniques artisanales, mais il doit toujours faire la jonction, le syncrétisme, entre la forme et la fonction, insiste-t-il. «Il est évident que la technique permet de faire aujourd’hui ce qu’on ne pouvait pas faire il y a 70 ans. La science permet au designer d’accéder à un certain type de production qui n’était pas disponible dans le passé. Si Ruhlmann ou Chareau avaient connu ce que nous avons aujourd’hui, ils auraient peut-être créé autrement leurs modèles». Le mobilier Hugues Chevalier est fabriqué à partir de matériaux nobles. «Nous préférons rester dans une tradition artisanale pour garder ce niveau de finition, ce type de qualité, de précision, que seule la main de l’homme peut donner, souligne M. Caradeuc. Nos meubles ont un côté vécu, humain, car chaque pièce est différente de l’autre. C’est l’image de marque de la société Chevalier et nous y sommes très attachés. Nous sommes des amoureux de l’objet unique, fabriqué de façon artisanale, qui est la traduction d’une culture, d’une passion et que l’on exprime forcément moins bien lorsque l’on fabrique 10 000 chaises en plastique dans une machine. Il y a donc cette dimension culturelle dans une production comme la nôtre, que je trouve très importante et qui est vraiment le reflet d’un monde qui passe. Dans 20 ans, plus personne ne fera ce produit. Nous sommes un peu les derniers des Mohicans». La mode et le design. Dans le design de mobilier, les grandes tendances de mode jouent sur une période beaucoup plus longue que dans la mode prêt-à-porter, «mais cela bouge quand même, indique Alain Caradeuc. Je crois que ce qui crée les tendances, c’est la volonté d’apporter de la nouveauté, dans les finitions par exemple, les couleurs de bois, etc. Quant aux formes, je pense qu’elles évoluent beaucoup, grâce à la façon dont on évolue soi-même dans l’utilisation que l’on fait des meubles. Chez Hugues Chevalier, les meubles que l’on crée aujourd’hui sont déjà différents de ceux d’il y a quelques années. Et les prochains seront plus profonds, un peu plus bas, très influencés par le multimédia, par le fait qu’on passe beaucoup moins de temps à table de façon formelle que dans le temps, et beaucoup plus de temps devant la télévision. On dîne d’un sandwich ou d’un plateau-repas, en face du petit écran, en discutant avec des amis. Tout cela nous influence, nous oblige à réagir à cette demande du public». Et de poursuivre qu’«il y a aussi la volonté de se faire plaisir en sortant de nouvelles couleurs, parce qu’on en a envie. Nous voulons donner au public le sentiment que, même s’ils ont une espérance de vie assez longue et qu’ils s’inscrivent dans la durée, nos produits bougent quand même. Qu’ils peuvent apporter une fantaisie ou un tissu différent ; bref, qu’ils sont toujours d’actualité». Fabrication traditionnelle et artisanale La société Hugues Chevalier se caractérise par trois types de compétences : les boiseries, la tapisserie, les laques et finitions. Trois fonctions artisanales qui sont le fruit d’une grande expérience et d’une connaissance acquise en 25 ans de pratique. «Nous travaillons avec de petits ateliers. Nous en avons un nous-mêmes dans l’Est de la France, dans les Vosges, où une trentaine de personnes fabriquent nos meubles. Autour de cette petite usine, nous avons des sous-traiteurs exclusifs qui traitent pour nous toute la partie boiserie. Nous faisons les finitions, les tapisseries ; nous montons les canapés, nous faisons le contrôle de qualité et expédions les meubles. D’autre part, ajoute-t-il, nous avons créé, il y a cinq ans, dans la région de Meda (Nord de l’Italie), une filiale de production Hugues Chevalier Italia qui fait certains modèles pour le compte de notre société française. Cela nous permet de faire appel à d’autres techniques, car, la collection évoluant, nous allons avoir besoin de technologie plus contemporaine ; chose que l’on trouve facilement dans cette partie de l’Italie et qui constituera un bon complément par rapport à notre production». Alain Caradeuc rassure les inquiets : «La Maison Chevalier ne passera jamais à la grande série, même s’il nous arrive de faire appel à certaines technologies, comme aux machines numériques que nous utilisons parfois pour découper le bois. Cela nous permet d’avoir un meilleur contrôle et d’obtenir une précision parfaite dans la répétition. Mais ensuite, les bois sont repris par la main d’homme, poncés, ajustés, vernis et montés». Un autre chapitre dans lequel la technologie joue un grand rôle : le vernis. «C’est une chimie très complexe, note M. Caradeuc. Car nos meubles voyagent dans le monde entier et doivent pouvoir résister à toutes les températures». La marque Hugues Chevalier est présente dans tous les pays d’Europe. «Nous avons notamment une boutique exclusive à Londres qui compte une belle clientèle arabe et libanaise». Il existe également une société Hugues Chevalier à New York. «Par ailleurs, nous avons commencé à travailler avec le Brésil et nous avons de très bons clients à Casablanca. Malheureusement, la crise asiatique nous a un peu freinés mais nous avions une bonne distribution à Taïwan, à Hong Kong, à Pékin, à Singapour, à Tokyo». Et le Moyen-Orient ? «C’est une grande découverte pour nous. C’est la première fois que nous sommes véritablement présents à Beyrouth, par le biais de la boutique Ardeco. Nous commençons à réaliser l’importance d’être ici, sur place, pour offrir un service, un conseil. Le produit H.C. est un produit qu’il faut savoir expliquer, présenter, vendre. Il est indispensable d’assurer également toute la sécurité sur le plan de l’installation et de résoudre les problèmes qui peuvent se poser par la suite (l’après-vente)». Lorsque la famille Ammatoury (Ardeco) lui propose, il y a un an, de travailler avec lui, Alain Caradeuc n’hésite pas longtemps avant d’accepter. «Nous avions plusieurs propositions mais nous avons finalement choisi les Ammatoury parce qu’ils ont à la fois la compétence et la passion. Personnellement, j’accorde beaucoup d’importance à la dimension passionnelle et je suis convaincu que rien ne se fait sans passion. Implanter une collection comme la nôtre n’est pas évident. Il y a tout un problème de logistique, de moyens, de patience». Mais quand on est passionné… À l’occasion de son séjour express à Beyrouth, Alain Caradeuc a également rencontré Mme Philippe Lecourtier… dans le bureau Hugues Chevalier de la Résidence des Pins. Et le «repreneur» de M. Chevalier de conclure : «Je ne suis pas surpris que la collection Hugues Chevalier plaise au Liban parce qu’il y a ici le goût de la qualité, une bonne connaissance du vrai luxe, des choses authentiques et sérieuses. Malgré le côté léger et en apparence insouciant, il y a une grande profondeur, les engagements humains sont sérieux… On a envie de se faire plaisir en même temps que d’avoir des objets de valeur. Et je crois que cela correspond bien à la mentalité de la Maison. Nous avons une collection sérieuse qui respire la confiance. C’est du solide, c’est fait pour durer, et je suis convaincu que nous ferons un grand succès à Beyrouth».
On ne peut s’intéresser au mobilier art déco sans connaître l’entreprise Hugues Chevalier qui fête aujourd’hui ses 26 ans ; ses meubles sont indémodables, pièces uniques ou à série très limitée, authentiques, aux lignes épurées et au finissage parfait. De Lionel Jospin à Madonna, en passant par Claudia Schiffer et Sharon Stone, beaucoup de célébrités goûtent, au quotidien,...