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Actualités - CHRONOLOGIES

Droits de l’homme - Le rapport annuel d’Amnesty International rendu public - Au Liban, des centaines de jeunes continuent à être arrêtés

Le Liban peut s’estimer satisfait. Dans le rapport annuel d’Amnesty International sur la situation des droits de l’homme dans le monde, il n’a droit qu’à quelques paragraphes. Qui dénoncent certes les arrestations arbitraires, notamment celles des étudiants, et les procès massifs, souvent politiques, devant le tribunal militaire, mais ce n’est rien en comparaison avec ce qui se passe chez ses voisins et même dans la plupart des pays du monde. Pour l’association basée à Londres, qui a ouvert en octobre dernier un bureau régional au Liban, la lutte continue et les défis se multiplient. L’instant est solennel pour ceux qui s’y intéressent. Simultanément dans tous les pays du monde, à 11h (heure de Greenwich), le rapport annuel d’Amnesty International sur la situation des droits de l’homme dans le monde est rendu public. Le responsable du bureau au Liban, Kamal Obeïdy, le résume devant les représentants de la plupart des médias, insistant pour ceux qui auraient des doutes sur l’indépendance, le sérieux et l’objectivité du travail de l’association. D’ailleurs, en feuilletant le rapport, on se rend vite compte qu’il n’y a là aucune complaisance envers les gouvernements en place, qu’ils soient occidentaux, officiellement démocratiques ou plus simplement moins ambitieux dans les classifications. Concernant la région du Moyen-Orient, les violations régulières israéliennes des droits de l’homme sont sévèrement dénoncées, mais le maintien de l’état d’urgence en Syrie est aussi pointé du doigt ainsi que les arrestations pour des raisons politiques en Jordanie, les violations des droits de l’homme en Arabie séoudite, au Yémen, en Tunisie, au Maroc, au Soudan... Bref, un rapport qui en dit long sur l’état du monde ou plutôt sur l’état de l’homme dans le monde. Mondialisation et appauvrissement D’ailleurs, le rapport remarque très judicieusement que si la mondialisation a été porteuse d’une certaine prospérité pour quelques pays, grâce notamment à l’ouverture de nouveaux marchés, pour beaucoup d’autres, elle a été synonyme d’appauvrissement, de création de nouvelles inégalités et donc d’accroissement de l’injustice. Le constat est sévère, mais il est surtout déprimant, car plus on a l’impression que le monde évolue et plus les injustices se multiplient tout en changeant parfois de forme. Dans les 149 pays où a enquêté Amnesty, ce ne sont qu’arrestations pour des motifs politiques, disparitions, tortures et parfois peine de mort, quoique celle-ci soit en régression, même au Liban, où tout au long de l’année écoulée, les sentences de peine capitale n’ont pas été exécutées. Dans les détails, Amnesty dénonce l’arrestation de centaines de personnes au Liban, dont des étudiants, pour des raisons politiques, notamment d’opposition au gouvernement. Deux militants des droits de l’homme (l’avocat Mohammed Moghrabi et M. Kamal Batal) ont été inquiétés et traduits en justice, alors que des milliers de prisonniers ont été jugés hâtivement par les tribunaux militaires. Des centaines de demandeurs d’asile ont été refoulés et certains ont été arrêtés avant d’être rapatriés. Le rapport dénonce aussi les mauvais traitements, voire la torture dans les prisons libanaises, notamment celle de la Sûreté générale où ont été détenus les demandeurs d’asile venus entre autres d’Irak et du Soudan. Il affirme aussi que les suspects dans l’affaire des incidents de Denniyé ont été maltraités dans leur lieu de détention et maintenus en situation d’isolement total. Enfin, le rapport évoque aussi le problème des personnes disparues pendant la guerre et dont le sort demeure inconnu malgré la formation de deux commissions officielles chargées de traiter le dossier. En Syrie, l’état d’urgence est toujours en vigueur et en dépit de la libération de tous les prisonniers politiques, des centaines de personnes continuent à être portées disparues, après avoir été emprisonnées. Les contraintes sur la liberté de presse ont certes été allégées, mais le prisonnier d’opinion Nizar Nouyouf est toujours en détention. Le rôle des médias On pourrait multiplier les exemples, tant, partout dans le monde, les gouvernants utilisent pratiquement les mêmes procédés, avec toutefois des fréquences variables. Israël a droit à une mention spéciale, l’État hébreu ayant eu, selon l’association qui a envoyé quatre délégations sur place, une année riche en violations des droits de l’homme. L’association mise d’ailleurs beaucoup sur les médias et reconnaît que ceux-ci ont le rôle le plus important dans la sensibilisation de la société civile aux questions des droits de l’homme, sensibilisation qui mène à la protestation et aux pressions sur les gouvernements. D’ailleurs, c’est après avoir lu un article dans un quotidien britannique que Peter Benenson a décidé de fonder Amnesty International, le 28 mai 1961, c’est-à-dire il y a quarante ans. Depuis, cette association qui n’a cessé d’étendre son influence dans le monde, sans jamais céder aux pressions officielles ou à la tentation d’accepter une aide financière des gouvernements ou des États, n’a cessé de lutter en faveur des droits de l’homme, de l’abolition de la peine de mort et de la disparition de la torture. Le chemin est certes encore long, mais la plus grande victoire de l’association est justement que son rapport annuel est attendu par la plupart des États de la planète comme une sorte de palmarès des cancres, chaque pays craignant le verdict qui tombe toujours sans appel. Après avoir ouvert un bureau régional à Beyrouth, on pouvait croire que l’association serait moins vigilante ; il n’en est rien et M. Obeïdy précise que les responsables n’ont pas cherché à intervenir dans le travail du bureau dont il a la charge. Le Dr Chebli Mallat, conseiller juridique de l’association, ajoute qu’en ouvrant un bureau régional au Liban, Amnesty International a montré que ce pays est à la pointe de la sensibilisation aux droits de l’homme dans la région. Il salue aussi le rôle de l’association pendant la libération du Liban-Sud, affirmant que c’est un peu grâce à la présence d’une délégation sur place qu’il n’y a pas eu d’exactions ou d’abus divers. Quarante ans après sa fondation, le rôle d’Amnesty demeure le même : demander des comptes aux gouvernements pour leur comportement et le défi qu’elle s’est lancé ne cesse de grandir. Pour les milliers de personnes dans le monde soumises à des pressions à cause de leurs opinions politiques, l’association fondée par Peter Benenson demeure l’unique espoir de salut ou, à défaut, de la reconnaissance de leur existence.
Le Liban peut s’estimer satisfait. Dans le rapport annuel d’Amnesty International sur la situation des droits de l’homme dans le monde, il n’a droit qu’à quelques paragraphes. Qui dénoncent certes les arrestations arbitraires, notamment celles des étudiants, et les procès massifs, souvent politiques, devant le tribunal militaire, mais ce n’est rien en comparaison avec...