Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIES

musée Nicolas Sursock - « Les archives de Michel Chiha, pages d’histoire » - Une croisade politique et morale pour rêver le Liban

Une phrase de Michel Chiha, dont trois bustes sont exposés au rez-de-chaussée du musée Nicolas Sursock, a inspiré l’atmosphère feutrée et sobre de cette grande manifestation inaugurée par le ministre de la Culture M. Ghassan Salamé : «Une douce manie mais, après mon départ, dans la chambre où j’ai travaillé, j’aime qu’une lumière demeure, et qu’à mon retour, brille cette lumière, symbole de la pensée active, de l’être et de la vie … L’important c’est que derrière nous une lampe éclairée demeure, parce que ce qui est derrière nous, c’est devant nous qu’il reparaît … Une flamme derrière soi, c’est pour demain le jalon sur la route». Farès Dahdah, Bernard Khoury et Joumana Ghandour Atallah ont conçu un décor peu ordinaire où les «Pages d’histoire» sont transformées en source unique de lumière. La salle du musée est littéralement illuminée par les documents et les photographies qui sont étalés sur des tables appelées «abreuvoirs» (light tables) d’une quinzaine de mètres de long chacune. Située de côté, une lucarne s’ouvre sur l’univers «sacré» de M.C. : son bureau. Une table en chêne massif sculptée sur laquelle repose une lampe art déco baignant la pièce d’une atmosphère fascinante ; un vase en argent garni de roses rouges ; et sur un chevalet, le portrait à l’huile du penseur libanais, par Georges Corm. Des écrits d’une lancinante actualité Michel Chiha, député, éditorialiste et beau-frère du président Béchara el-Khoury, est considéré comme un des plus grands auteurs libanais de langue française et un homme politique ayant eu une influence décisive sur le déroulement des événements qui ont abouti à la naissance de l’État libanais. Exposés par thèmes, ses archives racontent une période cruciale de l’histoire du Liban : la Conférence de la paix et la proclamation du Grand Liban ; les relations du Liban avec la France et l’étranger, la légation et les ambassadeurs ; les six révisions de la Constitution dont le manuscrit original, en français, rédigé à la main par Michel Chiha, les premières éditions dactylographiées et corrigées ainsi que le texte final en arabe ; le drapeau libanais auquel Chiha a apporté sa contribution sur le plan de la symbolique et de l’esthétique. Il a travaillé sur la forme du cèdre et sur la teinte du rouge qu’il voulait comme la pourpre phénicienne de Tyr, celle extraite alors du murex. Les échantillons de couleurs dites pourpres qui lui ont été envoyés par le British colour council for the coordination of colour and design sont exposés au musée. Il y a aussi la correspondance au cours des négociations de l’accord monétaire de 1948 ; l’hommage rendu à Michel Chiha au Cénacle libanais mais aussi des extraits sur les troubles en Palestine : il a été un des premiers à avoir alerté l’opinion arabe et internationale sur la gravité du danger sioniste et sur les explosions qu’il entraînerait. En bref, voilà la mémoire d’un homme qui a régné sur la vie politique de 1919 à 1954. Éditorialiste en vogue (Le Jour) et critique écouté, Michel Chiha a traité des sujets qui semblent être écrits aujourd’hui, pour aujourd’hui, avec une lancinante actualité. Comme pour dire que nous avons toujours droit à la dénonciation des effets pervers de l’argent, à la critique de l’immobilisme, à des réflexions sur la démocratie et la liberté. Sans ménagement, Chiha dénonce «un régime ne s’inspirant que des platitudes, des peurs et des lâchetés de l’époque ottomane. Ce sont des hommes qu’il nous faut ; ce ne sont pas des esclaves et des pachas ». Mais encore : «Il faudrait que l’administration cesse d’être l’illustration de la faveur et du privilège … pour trouver un siège à quelques hommes d’aujourd’hui et de demain, on mette la République sens dessus dessous…» Censeur redoutable, il écrit : «Il nous faut non pas des hommes politiques qui ne veulent être que des hommes d’affaires, mais des hommes politiques intègres et des hommes d’État». Michel Chiha s’est penché également sur nos relations avec la Syrie. Ouvrons tout simplement les guillemets : «… Ils doivent savoir que nous aimons l’indépendance autant qu’eux et que le Liban est le pays des libertés autant et plus qu’aucun autre». Au cours de la visite, le public peut d’ailleurs écouter des extraits de textes, diffusés comme un fond de musique. À titre d’exemple, ce morceau choisi datant de 1953 : «Au Liban, la jeune génération ignore à peu près tout de l’histoire contemporaine libanaise ; et la Constitution de ce pays, dont chacun parle, est pour la plupart un texte aussi confidentiel que la législation de Hammourabi…» ! De même, la projection d’un film documentaire, réalisé dans les années 70 par Télé-Liban est prévu au programme. Il raconte, à travers un nombre de témoignages, l’homme qui a passionnément aimé le Liban, l’ordre, la paix et la justice. Une exposition à voir absolument. Des écrits à (re) lire. May MAKAREM
Une phrase de Michel Chiha, dont trois bustes sont exposés au rez-de-chaussée du musée Nicolas Sursock, a inspiré l’atmosphère feutrée et sobre de cette grande manifestation inaugurée par le ministre de la Culture M. Ghassan Salamé : «Une douce manie mais, après mon départ, dans la chambre où j’ai travaillé, j’aime qu’une lumière demeure, et qu’à mon retour,...