Communautés - « Le Liban est l’arc-en-ciel du M-O », affirme le représentant de Jean Chrétien - Sfeir : « Notre droit est inscrit dans notre histoire. Nous ne frapperons pas aux portes » - Ontario (Canada), de notre envoyé spécial Habib CHLOUK

Le patriarche maronite, le cardinal Nasrallah Sfeir, a couronné sa visite à Toronto (Ontario) en rencontrant la représentante de la reine Elizabeth d’Angleterre Hillary Weston, hier après-midi. Mardi soir, il avait été reçu par l’archevêque de Toronto, à la table duquel il a déjeuné, et qu’il a remercié pour l’attention pastorale spéciale qu’il accorde aux catholiques libanais, en coordination avec Mgr Joseph Khoury, évêque maronite de Montréal. Par la suite, le patriarche Sfeir a reçu en sa résidence une délégation de responsables de l’organisation chrétienne World Vision, active au Liban, et d’habitants du village frontalier d’Aïn Ebel, dont certains ont dû fuir leur pays pour échapper aux rigueurs de la justice, quand d’autres ont accepté de purger des peines de prison ou rester sur place, dans des conditions économiques et politiques difficiles. Le soir, le cardinal Sfeir a célébré une messe solennelle en la cathédrale Saint-Michel. Dans l’homélie qui a suivi l’Évangile, le patriarche a parlé de la lettre et de l’esprit de la religion, affirmant que «les pharisiens étaient attachés à la lettre de la loi, sans en comprendre l’esprit. La loi existe pour le bien des hommes, et non pour les accabler. Mais la loi, posée pour le bien des hommes, peut parfois les asservir, violer les droits de l’homme». «L’une des causes du drame que nous avons vécu au Liban, c’est que chacun d’entre nous a voulu jouer un rôle qui ne lui appartient pas au départ», a déclaré le patriarche. En soirée (mercredi à l’aube, heure de Beyrouth), le patriarche a assisté à une grande soirée offerte en son honneur à l’hôtel Sheraton par la paroisse Notre-Dame du Liban à laquelle assistait un représentant du Premier ministre canadien Jean Chrétien. Prenant la parole en cours de la soirée, ce dernier a décrit le Canada comme étant «le pays de la coexistence véritable» et rendu hommage aux Libanais qui ont «beaucoup apporté au Canada». «Le Liban est l’arc-en-ciel du Moyen-Orient», a-t-il déclaré. Pour sa part, le patriarche Sfeir a encouragé les Libanais de Toronto «et en particulier ceux qui, parmi vous, ont pu prendre part aux combats» à tourner la page. Nul ne peut écrire l’histoire à sa guise, s’il désire faire la vérité, a dit le patriarche qui, citant saint Augustin, a déclaré : «Le passé est passé, l’avenir est à Dieu, et nous ne disposons que de l’instant présent. Nous devons en profiter pour édifier l’avenir. Coopérez entre vous en toute sincérité. Aidez vous mutuellement à éliminer les obstacles, petits ou grands. Rien n’est impossible aux grands cœurs et vos cœurs sont grands s’ils sont ouverts à l’amour de Dieu et à l’amour fraternel». À ceux qui avaient fait de longues heures de voiture pour le voir, le patriarche a déclaré : «Nous sommes venus pour vous, et pour personne d’autre. Notre visite est d’abord pastorale. On a beaucoup écrit là-bas (au Liban), au sujet de notre tournée. Redisons-le : le Liban a un droit naturel, celui d’être indépendant, souverain et libre. Ce droit, nous ne le réclamerons à personne. Il est entre nos mains. Nous ne frapperons pas aux portes. Notre droit est inscrit dans notre histoire. Le Liban a souvent été en danger et il l’est peut-être aujourd’hui, mais il a toujours su, à travers l’histoire, surmonter les dangers et rester le Liban. Nous ne sommes hostiles envers personne ; on aura beau nous diviser, nous resterons, chrétiens et musulmans, unis. C’est naturellement que l’homme, ayant atteint ses 18 ans, cherche à être indépendant, à se libérer de toute tutelle. Le Liban est fort s’il sait unifier ses rangs». Hier matin, le patriarche a reçu des représentants des Forces libanaises, du Courant national libre et des Kataëb, qui lui ont remis une déclaration commune. Le patriarche se rend aujourd’hui à Londres (Ontario), quatrième étape de son voyage au Canada. Il sera de retour au Liban le 27 mars.