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Actualités - REPORTAGES

Johnny Nassif : il n’a plus de nom, seulement un numéro

Johnny Nassif est né en 1974. Il avait 16 ans en octobre 1990. Violette Nassif, sa mère, lui a rendu visite le 12 octobre au matin à son poste, sur le front de Dahr el-Wahech. Selon elle, Johnny «pressentait que l’assaut allait être donné le lendemain». «Dans la soirée du 13, j’ai fait le tour des hôpitaux et des morgues, sans résultats. Le commandement de l’armée m’a informé qu’il était possible que mon fils ait été enlevé, se souvient-elle. Puis des amis m’ont dit qu’ils avaient reconnu mon fils dans un convoi syrien près de Anjar. C’est alors que j’ai commencé à effectuer mes contacts auprès des officiers syriens. L’un d’entre eux m’a promis de libérer mon fils à condition que je lui livre les noms des personnes qui l’avaient vu dans un convoi en partance pour la Syrie. J’ai bien entendu refusé». Fin 1990, un officier du ministère de la Défense lui aurait affirmé que son fils se trouvait en Syrie avec cinq autres soldats. Violette Nassif montre le document 9299/AD/MM, daté du 27 décembre 1990, émanant du commandement de l’armée, qui stipule que le caporal Johnny Nassif et 5 autres soldats ne sont pas morts durant les combats. «En 1991, j’ai été à Qordaha et là, des personnes influentes, qui n’ont pas à solliciter un permis de visite, m’ont obtenu une rencontre avec Johnny, à condition que cela se déroule sous le sceau du secret. Ils l’ont placé devant moi, de manière à ce qu’il ne puisse pas me voir. On m’a sommé de ne pas lui parler», raconte Violette Nassif. Pourquoi avoir attendu aussi longtemps pour révéler cet épisode ? «Maintenant, c’est différent. Il faut parler. Quand on veut vous faire signer des déclarations de décès alors que vous avez la certitude que votre fils est vivant, il n’est plus possible de se taire. Nos enfants n’étaient pas des partisans de Aoun. C’étaient des soldats qui recevaient des ordres». Et Mme Nassif dénonce l’attitude du commandement de l’armée, «qui, à chaque fête de l’armée, lui envoie un petit cadeau en me souhaitant le retour de mon fils». «À quoi bon, s’ils continuent à nier la présence de Johnny en Syrie…», s’indigne-t-elle. En 1994, lors de la fête des Rameaux, grâce aux multiples contacts qu’elle a effectués, un permis de visite en provenance de la Syrie lui est délivré. Mme Nassif affirme «avoir traversé plusieurs montagnes» avant d’arriver à la prison où se trouvait, selon les autorités syriennes, son fils. «Avec beaucoup d’égard, ils m’ont conduit à l’intérieur de la prison. Le directeur du centre de détention m’a regardée puis il a intimé à son assistant de faire venir Johnny du “grand hangar”». L’autre a répondu : «Mais mon général, ceux-là se trouvent dans le hangar numéro 5». Le général a alors pris le dossier de mon fils, l’a ouvert et m’a dit : «Votre fils est l’un des soldats du 13 octobre 90 ? Il ne se trouve pas chez nous»… «En 1995, poursuit Mme Nassif, un docteur à l’Hôpital américain de Beyrouth, qui était professeur du fils d’un officier supérieur syrien, m’a promis de me débrouiller un permis de visite. Il m’a ramené le dossier de Johnny et m’a affirmé que mon fils était détenu à Palmyre avec 164 autres Libanais. Il m’a également précisé que les seuls permis de visite valides pour les soldats du 13 octobre 1990 seraient désormais ceux délivrés et signés par le président Hafez el-Assad». Et depuis 1995 ? «En 1998, j’ai appris, à travers des responsables syriens, que mon fils était encore à Palmyre. On m’a assuré que désormais, il n’a plus de nom, mais seulement un numéro». Elle déplore l’attitude des autorités libanaises. «Il ne sert à rien de nier la présence de ces personnes en Syrie. Moi, j’ai des preuves concrètes : j’ai vu mon fils. Et je suis déterminée à aller jusqu’au bout pour qu’il soit libéré. Nous demandons seulement à être traités comme tous les autres… Nous n’en pouvons plus. La plupart d’entre nous ont passé plus de temps en Syrie que dans leurs maisons ces dix dernières années… Et personne ne nous écoute… Jusqu’à quand… ?».
Johnny Nassif est né en 1974. Il avait 16 ans en octobre 1990. Violette Nassif, sa mère, lui a rendu visite le 12 octobre au matin à son poste, sur le front de Dahr el-Wahech. Selon elle, Johnny «pressentait que l’assaut allait être donné le lendemain». «Dans la soirée du 13, j’ai fait le tour des hôpitaux et des morgues, sans résultats. Le commandement de l’armée...